Une start-up valaisanne veut réparer les cartilages
Medtech
Après plusieurs années de recherche à la Chaire de l’ingénierie biomédicale de l’EPFL, Thierry Schwitzbuebel a fondé ChondroNest. La jeune pousse peut compter sur le soutien de Frédéric-Edouard Koehn, fondateur notamment de Compex et ses électrostimulateurs

Des millions de personnes dans le monde souffrent d’arthrose, une pathologie qui résulte d’une dégradation du cartilage. Cette maladie peut toucher de nombreuses articulations, aussi bien les genoux, la hanche que la colonne vertébrale. Pourtant, peu de traitements existent pour la soigner. «Il n’y a pas de solutions mis à part la pose d’une prothèse», constate Thierry Schwitzguebel, fondateur de ChondroNest. Cet ingénieur chimiste, qui, à l’âge de 43 ans, a effectué un master en ingénierie biomédical, s’est penché sur cette pathologie. Après plusieurs années de recherche, notamment à la Chaire de l’ingénierie biomédicale de l’EPFL, il pense avoir trouvé une solution pour reconstruire du cartilage. «Ce produit pourrait retarder la pose des prothèses et traiter des patients souffrants, par exemple, d’ostéoporose», espère-t-il.
Thierry Schwitzguebel a créé sa start-up en octobre 2015 à Conthey (VS) dans l’incubateur de PhytoArk pour développer son invention. Il s’agit de deux pâtes injectables et façonnables par le chirurgien. L’une contient de l’acide hyaluronique et l’autre du collagène. A cela s’ajoutent des polymères. Une fois mélangées et injectées, ces deux pâtes durcissent pour former une matrice basée sur des éléments naturels. «Cette matrice devrait non seulement pouvoir combler, par exemple, un trou dans le cartilage mais nous espérons qu’elle puisse être colonisée par des cellules chondroyctes, celles qui forment le cartilage», prévoit Thierry Schwitzguebel.
Phase risquée
ChondroNest a finalisé son prototype et doit désormais faire des tests sur des têtes de fémurs. A cet effet, elle a conclu un accord avec l’AO Foundation à Davos auprès de qui elle peut avoir accès à des bioréacteurs permettant de simuler des genoux et connaître la réaction des chondrocytes. «Nous traversons actuellement la phase la plus risquée», constate Thierry Schwitzguebel qui a déjà une expérience d’entrepreneuriat pour avoir créé, il y a quelque temps, SwissBiotech, active dans le domaine de l’ingénierie tissulaire.
La start-up valaisanne, qui compte dans son comité scientifique le professeur honoraire à l’EPFL en chimie organique Pierre Vogel ou Marcy Zenobi Wong de l’Institut du cartilage de l’EPFZ, a réalisé un premier tour de financement de 500 000,00 francs, grâce à la Commission pour la technologie et l’innovation (CTI) et à l’investisseur Frédéric-Edouard Koehn. Celui-ci, fondateur des sociétés Neocutis ou Compex, évalue le taux de succès de cette matrice à 10%. «Ce qui est beaucoup dans le capital-risque. Si cela fonctionne, ce produit révolutionnera l’orthopédie, marché qui attire de nombreuses sociétés.» Plusieurs groupes à travers le monde cherchent en effet à réparer les cartilages. Certains travaillent sur des solutions de thérapie cellulaire. D’autres développent des approches plus mécaniques, avec des matrices artificielles.
«En cas de succès, l’accès au marché se fera très rapidement car ChondroNest développe un dispositif médical et non un médicament, précise Frédéric-Edouard Koehn. D’ici deux ans environ, ChondroNest pourrait passer en phase clinique.»
La start-up espère développer un outil industriel dans la région valaisanne et maintenir ainsi une tradition dans le secteur de la chimie. «Nous espérons pouvoir produire le polymère dans le Valais. Par contre, pour assurer la commercialisation du produit, il faudra passer par un grand groupe qui possède les forces de vente nécessaires», prévoit Frédéric-Edouard Koehn.