Sans Stadler Rail, Bussnang resterait un village thurgovien inconnu. La gare pourrait d'ailleurs être rebaptisée Stadler Station: le plus gros des six sites de production du fabricant de trains régionaux, trams et crémaillères y est accolé - les autres se trouvent à Winterthour et Altenrhein pour la Suisse, Berlin et Weiden pour l'Allemagne, Budapest pour la Hongrie.
Quand en 1989 le conseiller national UDC Peter Spuhler a racheté la société âgée de 47 ans comme lui, dix-huit employés y travaillaient pour un chiffre d'affaires annuel de 4,5 millions de francs. Aujourd'hui, la PME s'est transformée en un groupe international: 1800 collaborateurs, dont 825 à Bussnang, travaillent pour Stadler Rail. Les ventes devraient atteindre 800 millions en 2006. Depuis près de 20 ans, une croissance des ventes à deuxchiffres est monnaie courante chez Stadler.
Moteur de la réussite actuelle: «Flirt» (flinke, leichte, innovative Regional-Triebzug). C'est le nom, trouvé par un collaborateur, d'un train régional novateur avec lequel Stadler Rail a gagné son premier contrat en septembre 2002. Les CFF passaient alors une commande de 330 millions de francs pour 42 rames. Trente à quarante ingénieurs ont travaillé sur le projet durant six à huit mois. La première rame a été livrée en été 2004.
La moitié des ventes
Deux ans plus tard, le succès est là. «Nous avons livré 50 «Flirt» à nos clients, et 263 ont été commandés, dont 14 récemment pour la Pologne», dit Peter Spuhler. Aujourd'hui, le train régional représente environ la moitié du chiffre d'affaires de Stadler Rail.
C'est à Bussnang que «Flirt» est construit, dans la plus grande des trois énormes halles de montage. «Actuellement, nous trouvons difficilement des électriciens», souligne au passage la porte-parole Sylvia Bär. Le premier atelier est consacré aux automotrices articulées, le produit qui a permis à Stadler de décoller en 1995. Le second est dédié aux crémaillères. «Celle-ci partira pour la Grèce, l'autre pour le Valais», ajoute Sylvia Bär. Quant au troisième, divisé en sixlignes de production, il est réservé à «Flirt».
«Nous commençons la production du RER pour Budapest», commente la porte-parole. Au sous-sol, les serruriers en aluminium découpent à l'aide de chalumeaux les énormes plaques qui formeront l'armature. A l'étage intermédiaire, les monteurs assemblent minutieusement le système de traction, avec le moteur et les freins.
Nouveau projet
Différentes raisons expliquent le succès de «Flirt». Ce produit haut de gamme est modulable et très confortable. Le client peut notamment choisir le nombre de wagons, le type de sièges et diverses fonctionnalités. «Flirt consomme moins d'énergie que les trains concurrents grâce à la récupération d'énergie au freinage. De plus, les coûts d'entretien durant le cycle de vie sont moins élevés que chez les concurrents», dit Peter Spuhler.
L'an prochain, les CFF mettront au concours un projet de train régional à deux étages, la valeur du contrat s'élevant à 1,4 milliard de francs. Stadler Rail veut précisément élargir son offre à ce type de rames. Mais pour remporter la mise et ainsi franchir la barre de un milliard de francs en chiffre d'affaires, l'entreprise thurgovienne devra battre ses principaux concurrents: Siemens, Bombardier et Alstom.