C’est ce qui ressort d’un rapport publié lundi, le premier qui fait le lien entre l’emploi et la transition écologique, par l’Organisation internationale du travail (OIT) sise à Genève. Catherine Saget, son auteure principale, s’en félicite. «C’est tout de même 0,3% de l’emploi total au monde, s’exclame-t-elle. Et ce nombre est appelé à croître si, grâce à une prise de conscience, l’économie circulaire – récupération, réparation et recyclage – prend son essor. Ce secteur qui remplacerait le modèle traditionnel basé sur «extraire, fabriquer, utiliser et jeter» a un potentiel de créer 6 millions de places de travail supplémentaires.»
Aux Etats-Unis aussi
Les nouveaux emplois seront créés grâce à une plus grande utilisation d’énergies renouvelables, des voitures électriques ou encore à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments. Le rapport donne un exemple en Inde. Ce pays qui connaît un développement important de l’énergie solaire et éolienne devrait recruter 25 500 spécialistes en 2017-2018. En revanche, quelque 6 millions d’emplois seront, au niveau mondial, détruits sur la même période, notamment dans l’exploitation d’énergies fossiles et des mines qui sont des sources de pollution.
Les estimations de l’OIT ne tiennent pas compte du fait que les Etats-Unis, l’un des principaux pollueurs au monde, se sont retirés de l’Accord sur le climat après l’arrivée au pouvoir du président Donald Trump. «Les politiques environnementales se mettent en place aussi dans les Etats, les villes et les entreprises, temporise Catherine Saget. Les Etats-Unis créeront au moins 1,9 million d’emplois verts d’ici à 2030, contre 2 millions en Europe.»
Emplois dépendants de la santé de l’écosystème
Au fait, qu’est-ce qu’un emploi vert? «Il s’agit d’un travail qui aide à la préservation de l’environnement; il est réalisé dans des conditions décentes, permet le recyclage des matières usagées et émet moins de gaz à effet de serre», explique Catherine Saget. Qui ajoute qu’il n’existe pas encore une estimation des emplois verts dans le monde. Selon un projet pilote de l’OIT mené en Mongolie, pays d’Extrême-Orient qui dépend largement de ses ressources naturelles, 11% des emplois peuvent être classés verts. «C’est un maximum à ce stade», souligne l’auteure du rapport.
Une exploitation durable requiert plus d’emplois
Catherine Saget
Et aussi: 95 000 emplois verts
En effet, des millions d’emplois dépendent directement de la santé de l’écosystème. La qualité de l’eau et de l’air, la fertilisation des sols, le contrôle des parasites, la pollinisation sont déterminants pour l’agriculture, la pêche, la foresterie et le tourisme qui emploient 1,2 milliard de travailleurs.
La Suisse prévoyante
Pour rédiger son rapport, l’OIT a conduit des études dans 27 pays, la Suisse exclue. «Mais il va sans dire que la Suisse est parmi les meilleurs élèves en matière de transition écologique», explique Catherine Saget. Par exemple, la part de l’agriculture biologique dans l’ensemble de la production est de 12% alors que la moyenne européenne est de 3%. «Une exploitation durable requiert plus d’emplois», relève-t-elle. La Confédération a en effet une stratégie pour le développement de la cleantech, tant pour le marché intérieur que pour l’exportation. Selon l’OIT, la Suisse ajoutera 17 700 emplois dans la branche. A présent, elle compte 487 000 personnes actives dans des secteurs liés directement à la nature, c’est-à-dire l’agriculture, la pêche et les forêts.
Selon l’auteure du rapport, Berne a su identifier et prévoir les besoins en compétence et les universités ont pris le relais pour dispenser l’éducation en la matière. Le rapport de l’OIT demande en effet aux Etats non seulement d’adopter des politiques environnementales, mais aussi de prendre des mesures d’urgence pour former les travailleurs nécessaires pour mener la transition écologique. «Très souvent, c’est l’insuffisance du recrutement de professionnels qui freine la transition écologique», conclut-elle.