Événement
Le peuple suisse se prononcera le 27 septembre sur un congé paternité de 2 semaines pour les nouveaux pères. Ce projet est-il vraiment acceptable? Et n’est-il pas trop couteux, comme le suggère l’UDC? Revoir le débat en vidéo
Tous les pères auront-ils droit à un congé paternité ? Si oui, auront-ils droit à un congé payé de deux semaines dans les six mois qui suivent la naissance de leur enfant?
Le peuple suisse se prononcera le 27 septembre sur un congé paternité de 2 semaines pour les nouveaux pères. Selon un sondage réalisé par l'Institut Link, 71% des Suisses y seraient favorables. Mais ce projet est-il vraiment supportable? Et n’est-il pas trop couteux, comme le suggère l’UDC?
Pour en débattre, deux personnalités politiques étaient présentes:
- Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/NE)
- Yves Nidegger, conseiller national (UDC/GE)
La modération était assurée par Vincent Bourquin, journaliste et chef de la rubrique suisse pour la rédaction du «Temps».
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Nous sommes dans une crise économique. Est-ce le bon moment d’introduire ce congé paternité?Réponse donnée par Céline Vara et Yves Nidegger à 18:28
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): On dit toujours, avoir un enfant ce n'est jamais le bon moment! Cette dépense va être financée par les travailleurs et les employeurs, elle est relativement modeste, on parle de 230 millions de francs maximum par année, si tous les pères prenaient leurs congés. Je souhaite mettre cela en perspective avec d'autres dépenses que l'on pourrait faire, notamment des milliards pour des avions de combat...
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Je suis assez d'accord sur le fait que ce n'est jamais le bon moment. Mais si il y a quelque chose qui est important, c'est la question économique évidemment. Il y a surtout l'état de nos régimes obligatoires sans lesquels nous ne pouvons pas vivre et qui sont alarmants... On peut vivre sans ce régime d'assurance que l'on souhaite nous imposer, il n'y a aucun lien entre l'engagement familial et cette question étatique là. C'est assez superficiel.
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Les entreprises vont-elles devoir prendre en charge à 100% le coût de ce congé paternité? Quid des PME qui sont loin de rouler sur l’or en ce moment…Réponse donnée par Yves Nidegger et Céline Vara à 18:31
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Je suis inquiet pour les PME. Ce qui est visé, c'est l'égalité entre les hommes et les femmes, et cela ne s'arrêtera jamais tant que les hommes n'auront pas le même nombre de semaines que les femmes. Et donc une hausse des coûts. Très rapidement nous aurons de nouvelles propositions pour augmenter graduellement ce congé, une nouvelle fois...
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): Cela va être un énorme avantage pour les PME car aujourd'hui ce sont surtout les multinationales qui en proposent... Elles seront aussi beaucoup plus compétitives sur le marché, notamment pour attirer de la main-d'œuvre qualifiée.
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En quoi le congé paternité facilite-t-il réellement le retour au travail des femmes qui auront dans tous les cas plus de congés?Réponse donnée par Céline Vara à 18:34
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): La société a évolué telle que les familles ont aujourd'hui des modèles très différents. A la fin, la femme peut se retrouver toute seule. Les dépressions sont très nombreuses après les naissances. Par ailleurs, l'enfant ne s'en portera que mieux s'il a aussi la possibilité de pouvoir passer plus de temps avec son père.
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Un père pourra-t-il librement prendre son congé quand il le souhaite? Son entreprise peut-elle dire non?Réponse donnée par Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge) à 18:35
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Non, l'entreprise ne pourra pas lui dire non. Mais il faudra une discussion entre l'employeur et le salarié, pour fixer des dates qui conviennent aux deux parties.
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Ne faut-il pas plutôt solutionner en priorité les problèmes sur nos retraites que réfléchir à un congé paternité de deux semaines qui va être très coûteux?Réponse donnée par Céline Vara et Yves Nidegger à 18:43
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): L'un n'empêche pas l'autre. Si on veut mettre en lien le congé paternité et l'assurance vieillesse: qui paye l'assurance vieillesse aujourd'hui? Les jeunes... Donc soit on fait une immigration importante, soit on fait des bébés. Et si on veut cela, il faut mettre en place des structures adéquates.
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Tous les prélèvements obligatoires qui ne sont pas nécessaires sont à déconseiller car ce qui compte pour l'économie, c'est que les entreprises n'aient pas trop de charges et que les travailleurs aient un pouvoir d'achat le plus large possible. Les masses d'argent en jeu, sur la question des retraites sont tellement importantes qu'on ne peut pas tirer de conséquences directes entre les deux choses. Mais si le Parlement avait un réel sens des priorités, il aurait mis sur la table la pérennisation de l'AVS.
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Est-il normal que des salariés, qui sont idéologiquement contre le fait d’en avoir, notamment au regard de la situation de notre planète, participent à financer un congé paternité et donc soutenir des gens qui en ont? Où est la logique?Réponse donnée par Yves Nidegger à 18:47
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): La question est surtout de savoir s'il faut faire une assurance sociale obligatoire. Pour moi, c'est non. C'est pour ça qu'il faut réserver cette obligation, cette brutalité, a tout ce qui est essentiel. Et le reste à la liberté de chacun. Je comprends la question, et c'est pour cela que je suis hostile - pas à ce que les pères restent près de leurs enfants - mais d'en faire une obligation.
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Monsieur Nidegger, êtes-vous totalement contre le congé paternité ou y seriez-vous favorable sous une autre forme? Pourquoi?Réponse donnée par Yves Nidegger et Céline Vara à 18:51
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Je suis contre l'obligation de cotiser pour créer un nouveau régime obligatoire.Mais évidemment pas contre le fait d'arrêter de travailler, c'est étatiser tout cela qui me gêne.
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): Il n'y aura pas une forte bureaucratisation, c'est un système éprouvé aujourd'hui, il n'y a rien de nouveau. Cela fonctionne depuis de nombreuses années dans les pays qui nous entourent.
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Vous êtes favorable à ce congé paternité, Céline Vara. Mais deux semaines sont-elles réellement suffisantes?Réponse donnée par Céline Vara à 18:53
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): Evidemment non, mais il faut bien commencer. La politique suisse est ainsi, elle est lente. J'espère qu'un jour on aura un vrai congé parental, comme dans les pays nordiques. Mais on doit tout d'abord pérenniser cela, comme avec le congé maternité. Quatre semaines aurait été le minimum du minimum.
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Dans quelle mesure un congé paternité peut-il changer positivement, ou négativement, la famille aujourd’hui? (Sarah)Réponse donnée par Céline Vara et Yves Nidegger à 19:00
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): Merci pour cette question! C'est fondamental aujourd'hui! En Suisse, nous sommes souvent mal notés sur notre politique familiale. D'ailleurs, 75% des femmes enceintes aujourd'hui ont peur pour leur carrière. Ces combats là ne sont pas simples à porter, et ce congé paternité nous l'attendons, c'est une pierre essentielle à l'édifice, et il doit absolument passer pour aller de l'avant pour tendre vers une politique familiale adaptée.
Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Il s'agit d'une construction idéologique qui ne changera absolument rien au rapport entre les hommes et les femmes, à la démographie. C'est un pur gadget, cher!
ConclusionRéponse donnée par Yves Nidegger et Céline Vara à 19:04Yves Nidegger, conseiller national (UDC/Ge): Il faut voter non, c'est une question de cohérence. L'amour paternel n'a pas de prix. On ne peut pas l'acheter avec un sucre vacancier. La seule certitude c'est qu'il y aura moins sur votre fiche de salaire. Le reste c'est du flan.
Céline Vara, conseillère aux Etats (Verts/Ne): On peut parler de tout, d'argent, de business, mais quand on parle de la vie, il faut savoir la mettre au centre. Il n'y a rien de plus important que d'être à côté de son fils ou de sa fille pendant les premiers jours de sa naissance. Peu importe le prix.