Jeudi 27 janvier 2022 à 17:00
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Imposer des tâches à ses salariés n’est pas la bonne manière pour les faire progresser et se sentir bien au sein d’une entreprise. Mais alors, comment apprendre à déléguer et responsabiliser les collaborateurs? Dans quelle mesure les faire progresser peut être bénéfique pour les acteurs d’un ensemble professionnel?

Pour en parler, nous avons mobilisé Corinne Martino. Après l’obtention d’un diplôme d’économiste d’entreprise HES, elle a acquis une solide expérience dans le management des équipes au sein de PME et de grandes sociétés nationales et internationales telles que La Poste, la CGN ou McDonald’s. Elle est aujourd’hui formatrice freelance et intervient en entreprise sur tous les thèmes liés aux compétences managériales.

Elle a livré ses conseils pour mieux déléguer et responsabiliser pour faire progresser ses salariés avant de répondre à vos questions.

Existe-t-il un profil de manager idéal?

Corinne Martino: Un bon manager n’est pas celui qui sait, c’est celui qui sait faire faire. C’est la grande différence avec les managers des années 80 où on lui demandait de tout faire. Aujourd'hui, un bon manager sait avant tout s’accompagner de gens très compétents, souvent plus que lui, pour tirer son équipe vers le haut et assurer la bonne marche de l’entreprise. Le bon manager, finalement, c’est celui qui dispose d'excellentes compétences sociales.

Mais doit-il forcément se montrer toujours exemplaire?

Tout le monde peut faire des erreurs. Le point majeur est de savoir les reconnaître pour progresser et faire mieux les prochaines fois.

D'ailleurs, ne sommes-nous pas parfois trop sévères envers nos managers?

C’est tout à fait vrai. On parle souvent des «méchants managers», parlons aussi des «méchants collaborateurs»! Dans un mode idéal, les deux ont un rôle à jouer. Si je dispose de collaborateurs difficiles à gérer, cela rendra mon travail de manager plus compliqué. Et l'inverse est aussi vrai. L’objectif est aussi de s'adapter pour pouvoir bien collaborer.

Pourquoi certains managers ne délèguent-ils pas si cela est réellement efficace pour faire progresser ses collaborateurs?

Quand on parle de délégation, certains managers peuvent se braquer. Certains disent manquer de temps pour le faire. D'autres pensent que leurs collaborateurs ne sont pas assez compétents pour exercer une tâche précise. Il y a aussi la crainte - nettement moins avouée - de perdre le contrôle, le pouvoir, et donc son travail.

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Image d'illustration. Il n’est pas évident de continuer à faire vivre la culture d'entreprise sans échanges spontanés ni discours sans écrans interposés. — © Getty Images
Image d'illustration. Il n’est pas évident de continuer à faire vivre la culture d'entreprise sans échanges spontanés ni discours sans écrans interposés. — © Getty Images

Les nouvelles générations ont-elles des attentes particulières en matière de management?

Personnellement, je pense qu’il y a une réelle différence entre les jeunes et les plus anciennes générations. Les jeunes collaborateurs et les jeunes managers veulent tout autant s’impliquer dans le travail. Cependant, les activités annexes au travail ont pris beaucoup d’importance. Ces générations sont nettement moins prêtes à sacrifier ce temps libre.

Avec le développement du télétravail, comment responsabiliser ses salariés?

Mais qu'est-ce qui est si différent entre un management en présentiel et un management en distantiel? En réalité pas grand-chose: les questions restent les mêmes. La grande difficulté, j'en conviens, c'est la distance. Je pense néanmoins - paradoxalement - que la délégation est plus simple à appliquer en télétravail, car nous sommes obligés de nous appliquer des objectifs clairs et de tenir des délais précis. C’est un management plus exigeant, mais qui peut tout à fait possible.

Et comment montrer à ses collaborateurs sa satisfaction?

Le «feedback» (retour sur expérience) est l’outil de management numéro 1. Tout manager doit apprendre - en priorité - à donner un retour positif et constructif à son collaborateur. C’est la base, et tout «feedback» doit être factuel, avec un exemple concret à donner.

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Parlons des entretiens de fin d’année. Restent-ils un indispensable de tout bon manager? 

Cet outil n'est pas le plus essentiel. Ce qui est important, c’est l’accompagnement tout au long de l’année de ses collaborateurs avec les nombreux retours qu'ils vont recevoir. En réalité, dans un entretien d’évaluation, on ne devrait rien avoir de nouveau à se dire. Cela devrait rester un simple bilan pour préparer l’avenir. Manager, c’est être dans le présent, mais aussi et surtout prévoir l’avenir.

Maintenant, mettons-nous dans la peau d'un collaborateur. Que peut-il faire face à un chef autoritaire qui refuse de déléguer?

On peut tenter le «feedback» ascendant pour voir comment il est réceptif. Si ce n’est pas possible, il sera très difficile de le faire évoluer. Le monde est vaste: il ne faut pas hésiter à quitter l’entreprise.

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Le chef très autoritaire et tout puissant, un modèle qui n’a plus lieu d’être dans les entreprises en 2022.           — © (Pictorial Press Ltd / Alamy Stock Photo)
Le chef très autoritaire et tout puissant, un modèle qui n’a plus lieu d’être dans les entreprises en 2022. — © (Pictorial Press Ltd / Alamy Stock Photo)

Finalement, tout le monde peut-il être manager?

Manager est un vrai métier. Et comme tous les métiers, cela s’apprend. Il peut être très utile de suivre une formation pour développer des compétences sociales, c’est surtout cela qui est attendu du management et des collaborateurs. Cela ressort bien avant les compétences techniques.