Le Temps: Faut-il soutenir plus activement l’apprentissage?
Pierre Weiss: L’apprentissage n’est qu’une des quatre filières de formation, et il faut impérativement garder un traitement équitable entre celles-ci. Entre les universitaires très bien formés et les jeunes non diplômés qui terminent l’école obligatoire sans formation, il reste une partie très importante de titulaires de CFC. Pour cette dernière catégorie, il est important que la collectivité marque sa reconnaissance pour l’importance de leurs efforts.
– Concrètement?
– Dans le cas des entreprises qui vont mal, c’est-à-dire qui n’ont plus assez de travail, l’intervention de l’Etat ne serait pas justifiée. Maintenir les gens au travail artificiellement n’aurait pas de sens. Pour celles que le coût marginal d’un apprenti pourrait faire hésiter à embaucher en période de récession sévère, on peut imaginer une sorte de «soudure», d’aide complémentaire et temporaire de l’Etat. La loi sur le chômage prévoit par exemple le versement d’allocations pour favoriser le retour à l’emploi pour les chômeurs plus âgés. Or si on accepte de subventionner temporairement des postes pour des adultes ou des chômeurs de longue durée, pourquoi ne pas le faire pour des jeunes? Un tel soutien ciblé, individualisé et conjoncturellement motivé serait envisageable, même souhaitable, à mon sens.
– Egalement dans le cas d’UBS, qui n’embauchera pas une centaine d’apprentis cette année?
– Il est vrai qu’UBS a déjà beaucoup reçu. Cela dit, l’aide du contribuable visait d’abord à garantir la stabilité du système financier suisse et international. Dans ce sens, en appliquant une analyse pragmatique, je pense que la fin justifie les moyens, même s’ils ne sont pas toujours «casher» selon la doctrine libérale.
– Le discours extrêmement pessimiste de l’USS, du PDC et du PS laisse les professionnels dubitatifs. Y a-t-il de la récupération dans l’air?
– Je le pense en effet. Les mesures d’intervention que j’ai proposées doivent être prises en compte de manière globale. Il faut un signal politique clair pour récompenser les jeunes qui ont fait l’effort de se former. Cela dit, je regrette le côté approximatif de certains effets d’annonce. Il ne faut pas nier les réalités. D’abord, le nombre de places d’apprentissage augmente. Les chiffres de la rentrée 2009 ont rien d’alarmant.