
Capturer le monde
L’ancien champion du monde de freeride Emilien Badoux et le photographe de sports extrêmes Antoine Truchet habitent le monde en aventuriers. Leur fil rouge? La quête de performance, qu’elle soit sportive ou artistique. Leur secret? Une détermination sans faille et une capacité à se dépasser à la force du physique et du mental. A l’occasion du lancement des nouveaux modèles de la collection Royal Oak Offshore, Audemars Piguet les a réunis pour repousser leurs limites. Une expérience hors du temps aux confins du possible…
Texte: Elia Cahn - Photos: Antoine Truchet
Atteindre des sommets enneigés à des altitudes insensées et faire sa trace sur leurs pentes abruptes, s’envoler au-dessus des cimes des montagnes en parapente, surfer de redoutables barrels et faire de son quotidien une aventure: c’est cette vie à mille à l’heure qu’ont choisie Emilien Badoux et Antoine Truchet. Chacun avec ses domaines de prédilection et ses disciplines favorites, le freeride, le parapente, le surf et le yoga pour Emilien, la photographie et la vidéo de sports extrêmes pour Antoine. Deux parcours de vie hors des sentiers battus qui les ont menés aux quatre coins du monde, par-delà les frontières de l’impossible, dans des lieux souvent retirés ou quasi inaccessibles.
Leurs chemins étaient forcément amenés à se croiser. A l’occasion du lancement des nouveaux modèles de la collection Royal Oak Offshore, Audemars Piguet les a invités à se rencontrer pour sortir de leur zone de confort et dépasser leurs limites. Au programme de cette journée automnale placée sous le signe de l’adrénaline, l’ascension de l’Allalinhorn, un sommet valaisan culminant à 4027 mètres d’altitude, un enchaînement de virages en freeride à la lisière des crevasses béantes et un saut en parapente depuis le sommet suivi de deux sessions de surf dans les rouleaux d’Alaïa Bay, le premier bassin de surf d’Europe continentale ouvert au printemps à Sion.
Ce matin-là, les premiers rayons du soleil n’ont pas encore atteint le petit village valaisan de Saas-Fee mais les cimes des montagnes qui découpent le ciel de leur couleur rose vif laissent déjà présager de conditions météorologiques idéales pour une aventure intense dans le massif des Mischabel. Il a neigé quelques jours plus tôt, pas un nuage à l’horizon. Pas de vent non plus. Cette journée n’aura pourtant rien d’une promenade de santé. Elle exigera des efforts physiques intenses, une détermination sans faille et une capacité à se dépasser, tant sportivement qu’artistiquement, de la part des deux hommes.
La notion de temps est essentielle dans leurs métiers respectifs. «On ne peut pas risquer de se faire piéger en haut de la montagne, rappelle Emilien. Le vent peut se lever et la neige se réchauffer au cours de la journée avec des dangers potentiels. Quand on monte, on sait par expérience que c’est la montagne qui décide.» Anticiper? «On a beau se préparer, on ne peut pas tout prévoir, souligne Antoine. Ce qui est essentiel pour obtenir de belles images, c’est surtout la qualité de la lumière. Alors il faut être flexible, s’adapter en fonction des conditions.» Etre rapide et efficace également. La bonne photo n’attend pas, elle peut se présenter sans que l’on s’y attende et elle suppose d’être prêt à se surpasser tout en gardant la tête froide. «On est capable d’aller loin pour une photo, admet Emilien. Mais c’est crucial de garder notre capacité de discernement.»
Repousser ses limites physiques et mentales, faire preuve de courage et constamment élargir le champ des possibles rythment le quotidien du freerider et du photographe. Le projet de toute une vie dédiée à parcourir le monde tout en explorant leurs propres ressources intérieures. A 38 ans, le snowboarder suisse Emilien Badoux fait preuve de lucidité et d’une grande sagesse. De l’eau a coulé sous les ponts depuis ses premières compétitions de snowboard freestyle il y a près de 25 ans. A l’époque, le snowpark est son royaume, un terrain de jeu où il exprime ses talents d’acrobate avec insouciance. En toute liberté et avec un style singulier, il excelle et se fait rapidement remarquer. Il a déjà l’âme d’un compétiteur et l’amour de la glisse chevillé au corps. «Je n’avais pas l’impression de faire un travail, se souvient-il. Le freestyle, c’était avant tout une passion, un rêve qui me procurait essentiellement du plaisir, une sensation de liberté et un mode d’expression. Ça a aussi été une école de vie; j’ai énormément appris sur moi-même. Je sais aujourd’hui qu’il faut faire des sacrifices et être très sérieux pour aller au bout de ses rêves.»
Après un titre de champion suisse de half pipe, il quittera la compétition avec le sentiment de ne pas en avoir atteint le sommet. «J’y suis revenu beaucoup plus tard avec le freeride, poursuit-il. Je fêtais mes 26 ans et j’avais le regret de ne pas être allé au bout de ma première carrière en compétition. J’ai énormément travaillé, avec une grosse pression mentale. Dans cette discipline, on sait qu’une chute peut être mortelle. Et cela exige d’être capable d’aller chercher très loin en soi, de se dépasser et donc d’accepter de se mettre dans une zone d’inconfort. En même temps, plus on pratique un sport, plus on repousse les limites et les dangers. Ce sont l’expérience et les connaissances acquises qui permettent d’aller toujours plus loin.» En 2014, il décrochera le titre de champion du monde de freeride à Verbier lors de la finale du Freeride World Tour. Une consécration. «Ce jour-là, j’étais prêt physiquement et mentalement. Au sommet de la montagne, j’ai souri. En réalité, je faisais déjà abstraction des enjeux. Je l’ai vécu comme une compétition entre moi et la montagne.»
Pour Antoine Truchet, pas de compétition officielle dans ses domaines d’activité, la photographie et la vidéo de sports extrêmes. Plutôt une envie constante de progresser, de donner le meilleur de lui-même. Il n’a que 25 ans mais capture le monde à travers son objectif depuis déjà de nombreuses années. «Pour mes 7 ans, je ne voulais qu’une seule chose: un appareil photo!» se souvient-il. L’âge de raison ne parvient pourtant pas à le faire devenir raisonnable. Au contraire: pour Antoine, l’appareil photo s’avère être le medium parfait pour s’exprimer et pimenter sa vie. Pour obtenir les meilleures images et réaliser des vidéos toujours plus impressionnantes, il est capable d’aller loin, très loin. Il ose et croit à l’impossible sans se freiner mentalement.
Antoine n’est pas seulement un artiste. Il est aussi un sportif accompli capable de suivre des athlètes dans de multiples environnements. En snowboard, en vélo de descente ou en VTT enduro quand il s’agit d’explorer la montagne, il est aussi à l’aise dans l’élément aquatique, en plongée sous-marine, en surf, en wakeboard ou en wakesurf. Un esprit touche-à-tout, compétiteur dans l’âme, qui repousse constamment ses limites dans l’exercice de son métier pour créer des images qui valent mille mots.
En cette fin de journée passée dans les redoutables barrels d’Alaïa Bay, il a dû chercher loin en lui-même pour réussir à rester jusqu’aux dernières secondes aux côtés d’Emilien et capturer chaque instant de cette expérience extrême au cœur des éléments. Et ce avec une ténacité et un esprit d’aventure qui évoquent la force de caractère des nouveaux garde-temps de la collection Royal Oak Offshore.
Tout en conservant les codes distinctifs des premiers modèles lancés en 1993, la manufacture Audemars Piguet a une fois de plus repoussé les limites de sa créativité en dévoilant cinq chronographes inédits qui combinent un boîtier ergonomique de 43 mm, des associations innovantes de matériaux élégants et robustes, un chronographe conçu pour l’aventure et un système innovant de bracelet interchangeable. Un pur concentré de puissance et d’audace, idéal pour gravir des sommets, apprivoiser des vagues redoutables et dompter les courants aériens, pour résister aux chocs et aux chutes dans des environnements extrêmes. Ce jour-là, aux poignets d’Emilien Badoux et Antoine Truchet, deux des nouveaux modèles Royal Oak Offshore participaient à cette expérience unique et hors du temps, entreprise par Audemars Piguet. Une aventure humaine aux confins du possible, à la croisée de la détermination et du dépassement de soi.
Emilien Badoux: «Je me suis souvent surpris à aller bien au-delà de ce que je croyais possible»
Dominer la peur pour éviter qu’elle ne prenne le contrôle, gérer les montées d’adrénaline, être tenace, confiant et déterminé pour dépasser ses propres limites sont autant de notions qu’Emilien Badoux et Antoine Truchet doivent maîtriser dans la pratique de leurs disciplines respectives. Regards croisés…
Qu’il s’agisse de sports extrêmes ou de photo d’aventure, la peur est-elle une composante incontournable qu’il est nécessaire d’apprivoiser?
Antoine: Elle fait naturellement partie du monde de l’aventure. Il faut y être attentif et savoir la décoder, elle permet d’éviter de faire des choses trop dangereuses. Au moment de shooter Emilien pendant la session de surf, je reconnais que je me suis fait peur. Il fallait que je reste près de lui et je craignais de finir englouti par la vague ou que la planche ne manque de me passer par-dessus. J’ai surmonté mon appréhension et j’y suis allé à tâtons pour me rapprocher au maximum. Dans cette situation, la peur était garante d’une certaine prudence. Cependant, il faut souvent la surpasser afin d’aller plus loin.
Emilien: Dans mes activités, la notion de peur est toujours présente et j’ai dû apprendre à la dompter, notamment pour ne pas freiner ma capacité à progresser. En cela, la pratique du yoga m’a énormément aidé. A chaque fois que je prends mon snowboard ou quand je décolle en parapente, la peur est là, elle se manifeste de manière plus ou moins intense et je sais justement que c’est quand l’attention se relâche que le pire peut arriver. Lors de cette journée à Saas-Fee, j’ai ressenti une certaine pression au moment de m’élancer en parapente. J’aime sentir l’adrénaline monter. Elle m’oblige à rester éveillé, bien concentré et pas trop euphorique.
Jusqu’où iriez-vous pour obtenir l’image parfaite?
Antoine: Il faut s’adapter, être flexible en fonction de chaque situation. Il faut s’en remettre à l’expérience, à la confiance que l’on a en soi et que l’on place en l’autre.
Emilien: Je me souviens d’une face qui me faisait rêver depuis longtemps, sur l’Aiguille de l’Amône, près de Chamonix. J’y étais allé deux fois en hélicoptère mais on avait dû renoncer. La troisième fois, le pilote a tourné sept fois autour du sommet sans savoir comment se poser. J’ai insisté, je le sentais, je savais que c’était le bon jour. La face est ultra-pointue et la moindre erreur peut avoir de lourdes conséquences. C’était un défi complètement fou que je ne relèverai pas une deuxième fois. C’est d’ailleurs très rare que je prenne autant de risques pour une photo.
Vous êtes physiquement entraînés à vivre des expériences extrêmes. A quel moment le mental prend-il le relais?
Emilien: Pour moi ça commence la veille. Je me prépare mentalement en imaginant ce que je vais pouvoir accomplir. Durant l’effort, lorsque cela devient dur physiquement, le mental permet de dépasser les limites du concevable. Je rejoins Mike Horn quand il dit que quand tu ne peux plus faire un pas, tu peux encore en faire un autre. Il faut cesser de réfléchir, ne pas user son énergie inutilement et y aller. C’est une affaire de concentration et de détermination. On en a besoin pour y croire, trouver la force de continuer quand le corps semble être au bout. Cette journée entre Saas-Fee et Sion a été chargée d’émotions et d’adrénaline!
Certains apparentent la pratique du sport à une expérience de méditation. D’autres recherchent plutôt la performance ou une sensation de liberté. Et vous, que recherchez-vous?
Antoine: Je suis très compétiteur dans tout ce que je fais. Que ce soit dans les sports que j’ai pratiqués – le tennis, le BMX cross, la natation, ou dans la photographie et la vidéo, je cherche toujours à m’améliorer, à être le meilleur dans mon domaine. Cela me conduit à constamment repousser les limites de ma créativité.
Emilien: Je recherche avant tout une forme de bonheur. Avec le surf, je m’offre des montées puissantes d’adrénaline. En parapente ou en freeride, je suis plutôt en quête de liberté. J’aime être au cœur des éléments, en symbiose avec la nature. Ma pratique du sport répond aussi à une recherche de performance, un besoin de toujours chercher à repousser mes limites. Quand j’estime que j’ai atteint un sommet, j’ai besoin de me fixer de nouveaux défis pour pouvoir être toujours dans la progression, la découverte, le plaisir, le challenge. Je suis un compétiteur dans l’âme.
Les limites, justement, sont mouvantes. Connaissez-vous les vôtres?
Emilien: Avec l’expérience, j’ai l’impression que je me suis souvent posé des limites à moi-même. Avec les années, en relevant certains défis ou en réalisant certains rêves, je me suis souvent surpris à aller bien au-delà de ce que je croyais possible.
Lors de votre rencontre à Saas-Fee, qu’avez-vous cherché à exprimer à travers vos images?
Antoine: Dans mes photos, j’essaie toujours de montrer la beauté incroyable de la nature et de mettre en valeur les athlètes au cœur des éléments. C’est une façon de transmettre ce qui les motive et leur permet d’aller toujours plus loin: la maîtrise des situations extrêmes, l’adrénaline, l’aventure et le dépassement de soi.