L'effet boomerang, ou la vigueur des arts aborigènes d'Australie
Dans le cadre de l’exposition «L’effet boomerang», le MEG dévoile une partie de sa vaste collection dédiée à l’art aborigène d’Australie. Des œuvres qui témoignent de la richesse et de la variété de cette culture, marquée par des revendications historiques et écologiques.
Par Le Temps
Symbole de l’Australie, le boomerang, souvent finement décoré, était utilisé par les aborigènes pour la chasse, mais aussi pour couper, retourner la terre, faire du feu par friction ou encore comme instrument de percussion.
Cette pointe de lance, utilisée pour la chasse, la pêche et les combats, a été façonnée non pas avec de la pierre, mais un morceau de verre. Un matériau amené sur l’île par les colons britanniques, probablement sous la forme de bouteilles d’alcool récupérées par les aborigènes. L’objet est caractéristique d’une culture qui a sans cesse évolué, incorporant des éléments d’autres peuples.
La gravure sur bois est un pendant majeur de l’art aborigène. Une fois l’écorce retirée, les arbres étaient sculptés pour indiquer un lieu de sépulture ou d’une cérémonie d’initiation. Au début du XXe siècle, une majorité de ces arbres gravés a été coupée sans l’autorisation des aborigènes, de sorte que moins d’une centaine d’entre eux se trouvent encore à leur emplacement d’origine.
Un dugong plongeant au clair de lune: la sculpture en bronze, réalisée en collaboration avec la société Urban Art Projects (UAP) basée à Brisbane, célèbre ce mammifère marin herbivore présent dans l'océan Pacifique. Les motifs gravés évoquent d'ailleurs la destruction des prairies sous-marines essentielles à la survie de cette espèce menacée. («Kisay Dhangal», Alick Tipoti, 2015)
Dans cette peinture acrylique on reconnaît le Wagyl, créature divine ressemblant à un serpent et appartenant au «Temps du rêve», dimension de la culture aborigène expliquant l'origine du monde. On doit notamment au Wagyl la création de cours d'eau dans les alentours de Perth («Wagyl Disturbed», Geoffrey Gordon Lindsay Ponde, 1988).
Les insulaires du détroit de Torrès, situé entre la pointe nord de l'Australie et la Nouvelle-Guinée, ont fabriqué cette tortue en tissant des «ghost nets», ces filets fantômes lâchés par des cargos de pêche industrielle et qui viennent s'échouer sur les côtes en piégeant de nombreux animaux marins. Les œuvres dénoncent ce drame environnemental, tout en témoignant du savoir-faire des populations indigènes.
Immortalisée entre 1877 et 1893 par Paul Foelsche, inspecteur de police et photographe allemand immigré en Australie, cette femme aborigène (Mary, 19 ans) fait partie d'une série d'autochtones portraitisés sous l'impulsion des scientifiques évolutionnistes de l'époque. Ceux-ci cherchaient notamment à démontrer la «primitivité» des peuples d'Australie.
La série «Mother», du photographe aborigène Michael Cook, évoquent, avec les clichés d’une mère seule dans le désert australien, l’absence de la «génération volée», ces enfants retirés de force à leurs familles et placés en internat par le gouvernement australien, entre 1870 et 1970.