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«Adolf Hitler n'aurait pu rêver plus fort rappel de sa croisade antisémite»

L'opinion israélienne réagit très vivement aux propos tenus à Durban sur la question palestinienne.

Israël en a encore le souffle coupé. La virulence de la déclaration qui a émané des Organisations non gouvernementales (ONG) réunies à Durban a provoqué des réactions outrées au sein de la classe politique de l'Etat hébreu. En attendant la déclaration officielle de la Conférence mondiale contre le racisme, dont Israël n'attendait hier «rien de plus constructif», selon un porte-parole.

Les ONG ont notamment accusé Israël de «perpétrer systématiquement des crimes racistes, y compris des crimes de guerre, des actes de génocide et d'épuration ethnique». Premier à réagir, le chef de l'Etat, Moshe Katsav, donnait le ton en assurant qu'Israël pouvait enseigner «pas mal de choses à ses accusateurs en matière de droits de l'homme». «La Knesset (Le parlement israélien), les tribunaux et les medias israéliens sont parmi les plus avancés du monde dans leur préoccupation à ce sujet», disait encore le président.

Beaucoup plus qu'une question d'injustice, la plupart des Israéliens voient dans cette déclaration, et plus généralement dans la conférence de Durban, la preuve qu'une partie du monde n'a pas encore accepté la création de l'Etat juif. Remettre en question le sionisme, dit-on en substance, c'est nier le droit aux juifs de vivre en tant que nation, là où cette nation possède ses profondes racines historiques.

«Soixante-deux ans après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, Adolf Hitler n'aurait pu rêver un rappel plus percutant de sa croisade antisémite», en venait à dire l'éditorialiste vedette du Yedioth Ahronoth, Sever Plotzker. En jugeant que cette conférence est un «terrifiant étalage global de furieux antisémitisme fier et sûr de lui», l'analyste concluait: «Nous pensions que cela n'arriverait plus jamais dans l'histoire de l'humanité, du moins depuis que l'armée rouge a franchi le portail d'Auschwitz, le libérant des nazis.»

Par le passé, Israël a toujours rechigné à participer à toute réunion internationale où il devait affronter la «majorité automatique» que constituent le monde arabe et une bonne partie du tiers-monde favorable à la cause palestinienne. L'Etat hébreu refuse notamment l'idée d'une conférence internationale sur le respect de la Quatrième Convention de Genève dans les territoires palestiniens, que devrait organiser la Suisse.

Mais ici, le thème même de la conférence – le racisme – donne à cette déclaration une signification qui la rend particulièrement irritante aux yeux des Israéliens. «Bien sûr, le fait d'être une puissance occupante depuis 34 ans est problématique, concède Efraim Inbar, directeur du centre Begin-Sadate d'études stratégiques à l'université Bar-Ilan. Mais les juifs ont été parmi les principales victimes du racisme pendant des centaines d'années.» Pour le professeur, le débat autour de Durban donne raison au fondateur de l'Etat hébreu, David Ben Gourion, qui proclamait: «Ce qui importe, ce n'est pas ce que les goim (non-juifs) disent, mais ce que les Juifs font.»

Après avoir cité tour à tour Anne Franck et Martin Luther King, le vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Michael Melchior, affirmait dans un communiqué lu à Durban: «Le conflit entre nous et les Palestiniens n'est pas racial et n'a pas sa place dans cette conférence. Il est politique et territorial, et comme tel il peut et doit être résolu pour terminer la souffrance et apporter la paix et la sécurité aux peuples israélien et palestinien.» En aidant Israël à se fondre à nouveau dans le rôle de la victime unique et mondialement incomprise, la conférence de Durban n'a fait qu'éloigner encore plus cette perspective.