Une ultime bravade du chef de Boko Haram, désavoué par l’organisation Etat islamique, qui semble lui préférer son lieutenant Abou Mosab al-Barnaoui. La dernière fois qu’il était apparu dans une vidéo, en mars dernier, Abubakar Shekau était atteint d’une méchante blessure à l’estomac. Il l’annonçait tout de go: «Pour moi, la fin est venue.» Mais le chef de Boko Haram est de retour.

Cette fois dans un message audio, il proclamait jeudi, utilisant un pluriel de majesté: «Les gens doivent savoir que nous sommes toujours présents.»
Plus qu’un retour à la vie, cette réapparition de celui qui a dirigé le groupe djihadiste nigérian depuis 2009, et qui a fait allégeance à l’Etat islamique (EI ou Daech) en mars 2015, s’apparente plutôt à une ultime bravade. Abubakar Shekau, souvent considéré comme un gourou psychopathe, vient en effet d’être «détrôné».

Dans l’une de ses publications officielles, «Al Nabaa», l’Etat islamique donnait longuement la parole à un lieutenant de Shekau, Abou Mosab al-Barnaoui. Nulle référence à l’émir déchu, mais de longs développements sur la stratégie que va suivre Boko Haram et sur ses objectifs: en tout point conformes avec la doctrine prônée par Daech.

Une promesse à demi-mot

C’est le signe de divisions irréconciliables au sein de ce groupe armé responsable d’au moins 20 000 morts et dont les actes de terreur, dans le nord du Nigeria, ont provoqué l’exil de plus de 2,5 millions de personnes. Il y a quelques semaines, le général Thomas Waldhauser, chef du commandement militaire américain pour l’Afrique, évoquait ces divisions devant le Sénat des Etats-Unis. En cause: l’utilisation d’enfants comme auteurs d’attentats suicides, que l’Etat islamique désapprouverait.

Mais, plus généralement, Daech reprocherait à sa «Province de l’Afrique occidentale» de ne pas porter assez haut le djihad dans le sud du pays (qui, à l’inverse du nord, n’est pas musulman), à Abuja et à Lagos, mais aussi de ne pas s’en prendre suffisamment aux intérêts étrangers dans le pays.

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A l’origine une simple secte religieuse extrémiste, Boko Haram, s’est étroitement liée à Al-Qaida, dont le fondateur, Oussama ben Laden, avait assumé en grande partie le financement. Abubakar Shekau lui-même n’aurait accepté que du bout des lèvres de se placer ensuite sous l’autorité du «calife» de l’EI, Abou Bakr al-Baghdadi.

Dans sa déclaration de jeudi, Shekau fait le serment de ne plus «suivre aveuglément» Daech. Et il le promet: il ne recevra aucun émissaire (de l’EI), sauf ceux qui sont «vraiment engagés dans la cause d’Allah».