Les rebelles ont dû rentrer dans le rang. Battus à plate couture. Mardi, la convention républicaine a officiellement désigné Donald Trump candidat officiel du Parti républicain pour l’élection présidentielle du 8 novembre. Tous les efforts pour tenter de barrer la route au milliardaire ont échoué. Le New-Yorkais a largement dépassé la barre des 1237 délégués nécessaires.

Aux Etats-Unis, c’est un tremblement de terre. Personne ne s’attendait à voir Donald Trump remporter les primaires et décrocher l’investiture quand il annonça sa candidature en juin 2015. L’homme d’affaires a chamboulé la manière de mener une campagne électorale et défié certains principes chers au Grand Vieux Parti, notamment en matière de libre-échange. Il a fait de l’immigration l’un des thèmes les plus explosifs de la campagne présidentielle.

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De sa tour Trump à Manhattan, l’ex-animateur de «The Apprentice», une émission de téléréalité diffusée sur NBC, s’est adressé à la convention de Cleveland par vidéo. Il ne semblait pas en revenir lui-même: «Je n’oublierai jamais. C’est quelque chose que je ne vais jamais oublier. Jamais.» Et le candidat républicain d’ajouter: «Ensemble, nous avons obtenu des résultats historiques, avec le plus grand nombre de voix jamais obtenues dans l’histoire du Parti républicain.»

Des délégués dénoncent des irrégularités

Dans «The Q», la salle omnisports de Cleveland, le vote en faveur de Donald Trump a toutefois été émaillé de graves irrégularités, estiment certains délégués d’Alaska et de Washington, même si la nomination du New-Yorkais n’était jamais en danger. Dans la capitale, les dix et neuf délégués obtenus respectivement par Marco Rubio et John Kasich ont été automatiquement attribués au tribun new-yorkais, provoquant l’ire des partisans du sénateur de Floride et du gouverneur d’Ohio. Idem pour ceux d’Alaska. Ils n’ont pas caché être outrés par les mesures dictatoriales de la direction du parti et de l’équipe de campagne de Donald Trump.

Les dirigeants républicains veulent créer l’impression que le parti est uni. C’est loin d’être le cas.

L’épisode a révélé une fois encore les profondes divisions qui persistent au sein du Parti républicain. Editorialiste au Washington Post, Dan Balz se confie au «Temps»: «Les dirigeants républicains veulent créer l’impression que le parti est uni. C’est loin d’être le cas. Au sein de la commission chargée d’édicter les règles de vote, il y a eu d’innombrables petites rébellions.» Pour le journaliste, la nomination de Donald Trump met en lumière le virage opéré par le Parti républicain: «Quand George W. Bush fut nommé, il avait cherché à convaincre les Hispaniques de se rallier à lui. Résultat: il avait obtenu davantage de votes hispaniques (près de 40%) que John McCain en 2008 et Mitt Romney en 2012. Aujourd’hui, le parti doit se poser une question fondamentale: veut-il continuer à être un parti dont neuf membres sur dix sont Blancs? Un jour ou l’autre, il devra se rendre à l’évidence face à l’évolution démographique du pays et à la montée des minorités.» D’ici à 2055, les Blancs ne seront plus majoritaires. Les Hispaniques et les Américains d’origine asiatiques représenteront une proportion beaucoup plus importante de l’électorat et auront un poids électoral qu’aucun parti ne pourra omettre de prendre en compte.

Rassemblés derrière la haine envers Hillary Clinton

Au deuxième jour de la convention, après la controverse provoquée par le discours de Melania Trump dont une partie fut un plagiat de l’allocution prononcée par Michelle Obama à la convention démocrate de Denver en 2008, ce sont les enfants de Donald Trump qui sont venus plaider en faveur de leur père. A commencer par Tiffany, à peine diplômée de l’université, qui a souligné à quel point le candidat républicain était un père proche de ses enfants. Donald Trump fils a, lui, mis en évidence les compétences de l’homme d’affaires qui a osé défier les recommandations de son père pour investir massivement à Manhattan. «Il a changé la skyline de New York», a-t-il déclaré.

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Hillary Clinton, la cible

Le principal facteur d’unité, mardi soir, fut toutefois Hillary Clinton. Elle fut dans le collimateur de la quasi-totalité des intervenants. Le plus virulent à son égard fut sans doute Chris Christie, le gouverneur du New Jersey, qui n’a pas caché être déçu de ne pas avoir été choisi comme candidat à la vice-présidence. Dans une veine populiste dont il a le secret, il a dénoncé la politique menée par l’administration Obama en Syrie, soulignant qu’en tant que secrétaire d’Etat, Hillary Clinton avait un instant déclaré que le président syrien Bachar el-Assad était un réformateur.

Soyons clairs: Donald Trump n’est pas qualifié pour être président des Etats-Unis. Le problème, c’est qu’Hillary Clinton ne me convainc pas non plus.

Il a fustigé l’accord sur le nucléaire iranien et le rétablissement des relations diplomatiques entre les Etats-Unis et Cuba qu’il a comparé par erreur à une levée de l’embargo. Il a dénoncé la politique de remise des compteurs à zéro (reset button) avec la Russie. A chaque fois, il s’est adressé à l’audience: «Est-elle coupable ou non coupable?» Les délégués se sont à chaque fois empressés de répondre: «Coupable.»

Ancien rédacteur des discours de George W. Bush, Michael Gerson livre son analyse dans les coulisses du centre de convention: «Je ne suis pas satisfait de cette convention. Soyons clairs: Donald Trump n’est pas qualifié pour être président des Etats-Unis. Le problème, c’est qu’Hillary Clinton ne me convainc pas non plus.» Quant au discours de Melania Trump, il estime que l’état-major de Donald Trump est responsable de cette grave erreur de jugement. Michael Gerson relève qu’il peut être utile de s’inspirer des grands moments oratoires du passé, mais il ne faut pas passer de «l’inspiration à la dépendance» en reprenant tel quel des passages d’anciens discours.


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