ÉTATS-UNIS
La First Lady a tenu jeudi à Manchester dans le New Hampshire un discours d’une extraordinaire puissance qui restera sans doute dans l’histoire comme un moment crucial de la présidentielle 2016

Tout le monde en convient: c’est un discours qui fera date non seulement dans le cadre de la présidence de Barack Obama, mais dans l’histoire américaine. Jeudi à Manchester dans le New Hampshire, la First Lady Michelle Obama a laissé parler ses tripes, parfois avec un trémolo dans la voix, pour dire à quel point il était nécessaire de parler des valeurs de l’Amérique, de celles des gens «décents». Depuis que Donald Trump est apparu dans une vidéo datant de 2005 dans laquelle il se vante d’avoir abusé sexuellement d’une femme mariée, les témoignages de femmes qui ont été victimes du candidat républicain à la Maison-Blanche se multiplient. Pour Michelle Obama, «assez, c’est assez». «Je n’arrête pas d’y penser. Cela m’a ébranlée au plus profond de moi d’une manière que je n’aurais jamais imaginé.»
Face à un Donald Trump que nombre de femmes décrivent désormais comme le profil parfait du «prédateur», Michelle Obama a déclaré: «Ce n’est pas quelque chose que l’on peut simplement balayer sous le tapis, comme un autre élément perturbant d’une triste campagne électorale.» Elle n’a jamais prononcé, comme à son habitude, le nom de Donald Trump. Mais il était évident que ses propos le visaient directement.
«Un minimum de décence»
Elle a dénoncé des comportements qui sont ceux de «prédateurs», des comportements que tout le monde pensait qu’ils dataient d’un autre âge. «Je sais qu’il s’agit d’une campagne électorale, mais cela n’a rien à voir avec la politique. Il est question ici d’un minimum de décence.» La First Lady est même allée jusqu’à mettre en garde contre le fait qu’avec un président comme Donald Trump, l’Amérique perdrait de son autorité morale pour aller prêcher la bonne nouvelle ailleurs.
Le discours de Michelle Obama fut sans doute le plus puissant de toute la campagne électorale. Il traduit en réalité l’évolution même de la First Lady depuis qu’elle s’est installée à la Maison-Blanche en janvier 2009, elle qui songeait un instant à faire la navette entre Chicago (sa ville) et Washington avant de finalement accepter de s’installer dans la capitale américaine.
Lire aussi: Michelle Obama, la femme la plus cool du monde
Au départ, elle a surtout cherché à éviter les feux de la rampe et même la politique. Elle a certes tenu des discours mémorables pour promouvoir l’élection, puis la réélection de son mari en 2008 et en 2012, mais elle s’est surtout concentrée sur des initiatives civiques comme «Let’s Move» pour lutter contre l’obésité des enfants ou l’initiative «Joining Forces» en faveur des anciens combattants.
Engagement pour Hillary Clinton
Femme de valeur(s), elle s’est engagée pleinement dans la campagne présidentielle en faveur de Hillary Clinton parce qu’elle y voit une manière de cimenter le bilan de Barack Obama, mais aussi et surtout une question de valeurs. Si elle a eu ses problèmes avec la candidate démocrate quand celle-ci était opposée à Barack Obama lors des primaires démocrates de 2008, elle reconnaît que l’ancienne secrétaire d’Etat est une femme dévouée à la chose publique.
Son allocution de Manchester était pour elle une nécessité morale. Pour elle, pour les enfants de l’Amérique et d’ailleurs. Impossible de laisser impuni le comportement de Donald Trump qui serait censé faire office de modèle pour les jeunes Américains s’il était élu. Donald Trump, c’est la contradiction même des valeurs que Michelle Obama n’a cessé de défendre tout au long des sept dernières années. En faveur des enfants et surtout des filles qui doivent apprendre à s’affirmer. Or Donald Trump prône par sa vulgarité et ses attitudes tout le contraire. Michelle Obama l’a d’ailleurs souligné: la force d’un homme ne doit pas découler du mépris qu’il affiche envers une femme.
Lire aussi: Donald Trump dit vouloir jeter Hillary Clinton en prison s’il est élu
En tenant un discours aussi fort, Michelle Obama a peut-être asséné le coup le plus fatal au candidat républicain. Car elle l’a répété: ce n’est pas un discours partisan. C’est un discours sur ce qu’est l’Amérique en laquelle elle croit. Les femmes qui ont entendu la First Lady auront sans doute beaucoup de mal à glisser un bulletin dans l’urne le 8 novembre prochain en faveur du républicain. Les sondages semblent en rendre compte. Même dans les Etats bascules, Hillary Clinton est en train de creuser l’écart. Et selon le «Upshot» du «New York Times», elle a désormais 89% de chances de gagner la présidentielle.