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Hausses d’impôts, infrastructures, législation sur les armes, droit à l’avortement… Devant le Congrès, le président américain a exposé mardi soir sa vision politique, qu’il espère pouvoir défendre lors de la prochaine présidentielle
Un message d’unité, mais contesté. Joe Biden a tenu mardi soir devant le Congrès le traditionnel discours annuel du président des Etats-Unis sur l’Etat de l’Union, le premier depuis que le parti démocrate a perdu la majorité à la Chambre des représentants.
Alors qu’il a déclaré son intention de briguer un second mandat en 2024, le président américain, âgé de 80 ans, a fait un discours programmatique et énergique, parsemé de quelques bons mots caractéristiques, passant en revue un large éventail de thématiques chères à son camp politique tout en tendant la main à ses opposants.
«Je ne veux pas ruiner votre réputation, mais je me réjouis de travailler avec vous», a-t-il ainsi adressé d’emblée au nouveau leader de la chambre basse, le républicain Kevin McCarthy. «Il n’y a pas de raison que nous ne puissions pas trouver de consensus». Il a pourtant plaidé par la suite pour une série de mesures qui ont peu de chance de convaincre la majorité républicaine de la Chambre des représentants, suscitant les ovations d’une moitié de l’hémicycle et parfois les cris outrés de l’autre.
«Il faut finir le travail»
Les Etats-Unis sont «en meilleure position que n’importe quel pays dans le monde» pour relancer leur économie, a asséné le président dès l’entame de son discours. «Le Covid ne contrôle plus nos vies.»
S’adressant aux Américains qui ont le sentiment d’être «oubliés», aux personnes en «difficultés financières», mais aussi à la classe moyenne «écrasée pendant des années», Joe Biden a longuement évoqué sur la situation économique américaine, et son amélioration depuis son arrivée à la Maison-Blanche. Il a vanté les «millions d’emplois» créés en deux ans et un taux de chômage «au plus bas depuis 50 ans» (3,4%). Mais, a-t-il souligné, «il faut finir le travail».
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Il a ensuite déroulé une série d’investissements nécessaires à ses yeux: dans les infrastructures, dans les énergies renouvelables, pour les étudiants et les enseignants, ou encore en matière de sécurité sociale. Des propositions assorties de promesses, sur la relocalisation des industries, particulièrement la production de semi-conducteurs, ou encore sur la baisse des prix de médicaments. Autant d’investissements à faire «pour le futur», avec toujours à l’esprit la «menace existentielle» du changement climatique.
Plaidoyer pour une hausse d’impôt
Pour financer les mesures proposées, Joe Biden a plaidé avec vigueur pour des hausses d’impôt pour les plus riches et les grandes entreprises, jugeant «scandaleux» les gigantesques bénéfices des compagnies pétrolières, devant des élus républicains ostensiblement vissés à leur fauteuil. «Je suis un capitaliste», a-t-il clamé, mais «le système fiscal n’est pas juste». «Aucun milliardaire ne devrait payer un taux d’imposition inférieur à celui d’un instituteur ou d’un pompier.»
Autre problématique américaine inévitable et récurrente, revenue sur le devant de la scène récemment avec la mort de Tyre Nichols aux mains des forces de l’ordre, la violence policière. «Nous tous dans cette assemblée, devons nous montrer à la hauteur, nous ne pouvons pas détourner le regard», a dit le président américain en présence des parents du jeune Afro-Américain. «Rassemblons-nous et finissons le boulot sur une réforme de la police», a-t-il ajouté.
Même ton revendicatif sur les armes à feu, il a appelé les élus à agir: «Interdisez les fusils d’assaut une bonne fois pour toutes.» Même si une telle loi a très peu de chance de voir le jour au vu de la composition actuelle du Congrès.
Le discours de Joe Biden s’est principalement concentré sur des thématiques de politique intérieur, ne faisant que brièvement mention de la guerre en Europe, assurant que les Etats-Unis soutiendront l’Ukraine «aussi longtemps qu’il le faudra» face à l’invasion russe. L’épisode récent du ballon espion chinois, à l’origine de nombreuses critiques au cours des derniers jours de la part de ses adversaires, a lui à peine été évoqué, de manière indirecte: «comme nous l’avons montré la semaine dernière, si la Chine menace notre souveraineté, nous agirons pour protéger notre pays et nous l’avons fait.»
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Plutôt à l’aise, semblant parfois prendre plaisir à l’hostilité de certains membres de l’opposition, le président américain, combatif, a toutefois lancé des appels répétés à l’élaboration de propositions législatives bipartisanes. Par exemple, sur la régulation des GAFAM: «Il est temps d’adopter une loi, soutenue par les deux partis, pour empêcher les géants de la tech de récolter des données personnelles sur nos enfants et nos adolescents».
Pourtant, en position de faiblesse dans les enquêtes d’opinion, c’est en premier lieu les membres de son propre camp qu’il aura dû convaincre par sa prestation énergique, alors qu’il prévoirait d’annoncer sa candidature pour un second mandat dans les semaines qui viennent. Selon un sondage récent, une majorité de démocrates ne souhaiterait pas qu’il se représente.