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Le divorce du couple Gates résonne fortement à Genève

La fondation Bill et Melinda Gates est un puissant contributeur de l’OMS, de GAVI et du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, trois institutions basées à Genève. Si a priori rien n’indique un futur changement dans les activités de la fondation, les institutions genevoises espèrent que le divorce n’aura aucun impact sur elles

Bill Gates et Margaret Chan, le 19 avril 2018 à Genève.  — © KEYSTONE/Martial Trezzini
Bill Gates et Margaret Chan, le 19 avril 2018 à Genève.  — © KEYSTONE/Martial Trezzini

Le divorce, annoncé lundi aux Etats-Unis, de Melinda et Bill Gates, l’un des couples les plus riches de la planète (124 milliards de dollars de fortune), soulève de nombreuses questions quant à l’avenir de la fondation qui porte leurs noms dotée de près de 50 milliards de dollars. Le couple «va continuer à travailler ensemble pour élaborer et adopter les stratégies de la fondation», a expliqué cette dernière. Telles sont les intentions, mais certains n’excluent pas qu’à terme, Melinda Gates crée sa propre fondation au risque de changer les priorités de la fondation B&M Gates.

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Deuxième contributeur de l’OMS

L’interrogation est d’importance et a un écho considérable à Genève, où la fondation est pour ainsi dire mariée avec l’écosystème de santé globale que la ville lémanique abrite. Employant 1600 personnes à travers la planète, elle dépense quelque 5 milliards de dollars dans la santé globale et le développement chaque année. Trois institutions genevoises en sont les grands bénéficiaires: l’Organisation mondiale de la santé (OMS), GAVI l’Alliance du vaccin et le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

Dans les années 2018-2019, la fondation de Bill et Melinda Gates (455 millions de dollars) était le troisième plus grand contributeur de l'OMS derrière les Etats-Unis (853 millions) et le Royaume-Uni (464 millions). Elle est désormais au second rang. Sa contribution équivaut à environ 12% du budget total de l’OMS et représente 45% du financement en provenance de bailleurs de fonds non étatiques. Au premier trimestre 2021, elle contribue à l’OMS à hauteur de 749 millions de dollars dont 624 millions sous forme de contributions volontaires destinées à une allocation spécifique. 61% de la somme totale donnée sont versés au siège de l’OMS à Genève. La fondation prévoit des dépenses de 104 millions pour l’Afrique dont 57% pour l’Initiative d’éradication globale de la polio.

L’apport financier des Gates est tel qu’au moment de l’annonce par le président Donald Trump du retrait des Etats-Unis de l’OMS, plusieurs observateurs craignaient que la fondation B&M Gates puisse devenir le premier contributeur de l’agence onusienne. Cette inquiétude a disparu avec la réaffirmation par l’administration de Joe Biden de l’engagement américain au sein de l’OMS. Les priorités de la fondation sont surtout la santé maternelle et enfantine, la polio et les maladies infectieuses.

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Priorités de l’OMS

La fondation du couple milliardaire est aussi très impliquée dans le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme auquel elle a versé pas moins de 2,49 milliards de dollars et promis d’en verser 760 millions pour la période 2020-2022. Elle est encore plus généreuse envers GAVI qu’elle a financée à hauteur de 4,1 milliards de dollars depuis 2000. En 2020, elle a promis d’apporter un financement de 1,6 milliard pour la période 2021-2025. Même si elle n’est pas basée à Genève, mais contribue à son écosystème, la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (CEPI) bénéficie aussi grandement de la philanthropie sanitaire des Gates.

La générosité de ces deux philanthropes est très appréciable, notamment à l’OMS où les Etats membres rechignent à renforcer l’assise financière de l’organisation. Directeur de l’Institut de santé globale de l’Université de Genève, Antoine Flahault se félicite de «l’extraordinaire générosité» de Bill Gates dont l’action est souvent déterminante. Elle est d’autant plus nécessaire que l’OMS dispose «d’un budget indigent (équivalant à celui des HUG à Genève) au vu des tâches qu’on exige d’elle», poursuit-il. Selon Antoine Flahault, le problème potentiel lié à ce type de financement est qu’il est «fléché», qu’il est destiné à des programmes bien précis choisis par la fondation. «Cela peut potentiellement dérouter les priorités fixées par les Etats membres de l’OMS.» Le risque d’accoutumance à ce type de financement est aussi une fragilité pour l’agence onusienne. Il suffit que le philanthrope change d’idée pour la priver de fonds devenus nécessaires.

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