Barack Obama a appelé mardi Bernie Sanders et Hillary Clinton, qu'il a félicitée pour avoir obtenu la majorité requise de délégués. «En outre, à la demande du sénateur Sanders, le président et le sénateur Sanders se rencontreront à la Maison Blanche jeudi pour poursuivre leur conversation sur les enjeux importants de cette élection», a indiqué le porte-parole de la Maison Blanche dans un communiqué.
Lire aussi: Le dangereux entêtement de Bernie Sanders
Un soulagement pour l'ex-secrétaire d'état
Pour l’ex-First Lady, ex-sénatrice de New York et ex-secrétaire d’État, c’est une page d’histoire qui s’ouvre. Hillary Clinton est en effet la première femme à devenir la candidate officielle d’un des deux grands partis dans l’histoire des Etats-Unis. Son investiture devra toutefois être confirmée par la convention démocrate, à Philadelphie, à partir du 25 juillet.
Pour l’ex-cheffe de la diplomatie, âgée de 68 ans, qui fut un jour considérée comme la femme la plus admirée du monde dans un sondage Gallup, c’est un grand soulagement. L’énorme engouement qu’a suscité la campagne électorale de son rival, le «socialiste démocrate» Bernie Sanders, aurait pu faire dérailler ses ambitions présidentielles. Le sénateur du Vermont a attiré les foules, surtout les jeunes, remontés contre les élites et l’oligarchie politico-économique accusées de dicter les règles démocratiques outre-Atlantique. Aujourd’hui toutefois, c’est un nouveau défi qui se présente à elle.
Une candidate peu à l'aise en campagne
Le premier est d’ordre politique. Brillante intellectuelle, elle n’a pas l’habileté politique de son mari Bill, ni celle de Barack Obama. Tout le monde l’admet: elle n’est pas bonne en campagne électorale. S’accrochant à sa partition, elle n’a pas la verve populiste d’un Bernie Sanders qui appelle à la «révolution politique», ni la facilité de contact d’un Bill Clinton. Elle n’a pas non plus l’envie de se perdre, comme Donald Trump, dans l’outrage et les slogans vides de sens.
Depuis plus de vingt ans sous les projecteurs de la scène politique américaine, elle peut difficilement incarner le changement. Pour ses détracteurs, elle est «Lady Macbeth», explique Rebecca Traister, du New York Magazine. Pour ses admirateurs, «Jeanne d’Arc». Elle n’a pas un narratif clair hormis celui d’être potentiellement la première femme à siéger au Bureau ovale. Mais elle a des ressources. Malmenée dans la campagne, elle a tenu un discours politiquement lumineux jeudi dernier qui a laissé entrevoir une vraie capacité à résister aux assauts d’un Donald Trump. La question est de savoir si elle tiendra la distance.
Lire également: Des républicains en crise
Un objectif: restaurer la confiance
L’affaire de ses e-mails quand elle était secrétaire d’État, de 2009 à 2013, reste une grenade dégoupillée qui pourrait exploser à tout moment si l’enquête du FBI devait conclure à des infractions d’ordre pénal. Contrairement aux règles établies par le Département d’État et rappelées par l’inspecteur général dans un rapport accablant, elle a utilisé exclusivement sa messagerie privée au mépris des règles de sécurité, de confidentialité et d’archivage.
Depuis sa conférence de presse à l’ONU en mars 2015, elle a très mal géré le dossier en public, esquivant ce qu’elle finira par qualifier de «faute». Dans la perspective de la présidentielle, son défi sera désormais de restaurer la confiance auprès de l’électorat. Plus de 50% des Américains ne la jugent pas digne de confiance. C’est un peu moins que Donald Trump, mais tous deux sont les candidats à la Maison-Blanche les plus impopulaires depuis des décennies.
D'encombrants liens avec Wall Street
On critique aussi l’ex-First Lady pour son manque d’authenticité en raison de calculs politiques permanents. Ses liens avec Wall Street posent problème pour un électorat remonté contre la haute finance. En politique étrangère, son bilan est mitigé. On lui reproche d’avoir voté pour la guerre en Irak en 2002 et d’avoir orchestré le renversement de Kadhafi en 2011 sans prévoir le vide de pouvoir qui allait s’ensuivre.
Pour la démocrate, la gageure sera aussi de rallier les électeurs de Bernie Sanders dont elle aura cruellement besoin en novembre. Or certains disent déjà qu’ils ne voteront pas. D’autres pourraient voter pour… Donald Trump. C’est là que Barack Obama pourrait être très utile. Contrairement à George W. Bush (20%) à la même période, le président démocrate a une cote de popularité qui dépasse les 50%.
Il a promis qu’il allait s’impliquer fortement dans la campagne, car la viabilité de son bilan politique dépend aussi de celui ou celle qui siégera après lui à la Maison-Blanche. Pour Hillary Clinton, ce pourrait être un «game changer», un facteur décisif.