Premier revers au Congrès pour Joe Biden avec le retrait de Neera Tanden
Etats-Unis
Le choix de Neera Tanden pour diriger le Bureau de gestion et du budget de la Maison-Blanche (OMB) avait suscité une vive opposition parmi les élus du Capitole, et notamment certains démocrates

Joe Biden a dû renoncer, mardi, à sa candidate pour diriger le budget à la Maison-Blanche, Neera Tanden, face à l'opposition de sénateurs-clés, premier revers pour le nouveau président démocrate qui dispose d'une très courte majorité au Congrès.
Pendant des semaines, la Maison-Blanche avait courtisé une poignée de sénateurs républicains et démocrates modérés qui détiennent aujourd'hui le pouvoir de bloquer, ou de sauver, ses grands projets. Peine perdue. «J'ai accepté la demande de Neera Tanden de retirer» sa candidature, a annoncé Joe Biden dans un communiqué.
Le démocrate Joe Manchin a condamné ses chances
Des sénateurs républicains mais aussi un démocrate s'étaient ouvertement déclarés contre son arrivée au poste de directrice du Bureau de la gestion et du budget à la Maison-Blanche (OMB), un service très puissant, notamment chargé de développer le budget voulu par le président.
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Les républicains se disaient outrés par d'anciens commentaires les visant nommément, tandis que des progressistes proches de Bernie Sanders la jugeaient trop centriste.
Au bout du compte, c'est un démocrate plus conservateur, Joe Manchin, qui a de fait condamné ses chances en annonçant, fin février, qu'il ne voterait pas pour elle. Il jugeait que ses déclarations «ouvertement politiques» auraient un «impact toxique» sur les relations entre le Congrès et la Maison-Blanche.
Des batailles à venir au Sénat
Les démocrates disposent d'une très courte majorité à la chambre haute, avec 50 sénateurs contre 50 républicains. En cas d'égalité, la vice-présidente Kamala Harris dispose d'une voix pour départager le vote. Les nominations présidentielles ont besoin de 51 voix pour être approuvées par le Sénat. Toute défection démocrate doit donc être compensée par un vote républicain.
«Malheureusement, il semble désormais évident qu'il n'y a pas de voie pour obtenir une confirmation», a écrit Neera Tanden à Joe Biden en retirant sa candidature.
Jusqu'ici, ses autres nominations ont été approuvées, souvent à une majorité écrasante. Et les démocrates ont commencé à faire avancer ses grands projets de loi à la Chambre des représentants, où ils détiennent aussi la majorité.
Mais la chute de Neera Tanden annonce les autres batailles plus rudes à venir au Sénat. Et signale le grand pouvoir d'une poignée de sénateurs: Joe Manchin mais aussi Kyrsten Sinema (Arizona) chez les démocrates, et pour les républicains, Lisa Murkoswi (Alaska) et Susan Collins (Maine).
Eviter l'obstacle dit du «filibuster»
Prochain obstacle, dès cette semaine: le vote attendu à la chambre haute sur le vaste plan de relance de l'économie américaine, frappée par la pandémie. Le chef de la majorité au Sénat Chuck Schumer a affirmé mardi compter sur «suffisamment» de voix (51) pour approuver ce projet de loi d'ici la fin de semaine. Mais c'est uniquement parce que le texte n'inclura pas de hausse du salaire minimum, contrairement au projet initial, qu'il a pu montrer une telle assurance.
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Car Joe Manchin et Kyrsten Sinema s'étaient déclarés contre cette mesure précise, menaçant de faire sombrer l'ensemble du plan d'aide qui ne compte pas, pour l'instant, de soutien républicain. Ce duo n'a pas grand chose en commun, mis à part ses positions relativement conservatrices, qui lui vaut les foudres des progressistes. Avec, en premier lieu, leur opposition à une réforme du Sénat qui permettrait d'adopter toutes les lois sans passer par un premier vote requérant 60 voix.
Sans ce changement de règle, pour éviter l'obstacle dit du «filibuster», les démocrates, et Joe Biden, vont devoir trouver le soutien d'au moins dix républicains s'ils veulent approuver leurs prochains grands projets: réforme de la police et de l'immigration, législation sur les armes... Une perspective quasi inconcevable dans un Congrès aussi divisé.
Les deux prochaines années, jusqu'aux élections parlementaires, devraient être marquées par «l'impasse» au Congrès, prévoit Larry Sabato, politologue à l'université de Virginie à l'Agence France Presse (AFP). «Mais je parie qu'il y aura plus de compromis que ce à quoi nous nous attendons.»