Plus de 30 000 manifestants sont attendus ce samedi dans la région du Wendland, en Basse-Saxe, pour protester contre l’arrivée du «Castor», un convoi de déchets nucléaires – le douzième – en provenance du centre de retraitement de La Hague, en France. Le convoi a été bloqué plusieurs heures vendredi près de la gare de Caen, en Normandie, par des militants antinucléaires.
En Allemagne, la résistance sera forte aussi. En effet, les antinucléaires n’avaient pas connu une telle mobilisation depuis les années 1980. Le mouvement, qui s’était mis en veilleuse après le compromis obtenu par l’ancien chancelier Gerhard Schröder sur l’abandon du nucléaire en 2020, vit une renaissance depuis la décision d’Angela Merkel de prolonger la durée de vie moyenne des réacteurs de douze ans.
Non seulement le mouvement est bien vivant, mais il s’est ouvert à la société tout entière. Les manifestants n’ont plus les cheveux longs. Ils sont issus de couches sociales très diverses. Certains viennent même en cravate. «C’est une manière de montrer que nous sommes des gens issus de la société civile», explique un manifestant.
Par ailleurs, les opposants bénéficient d’un soutien sans réserve de la population. Le nucléaire est plus impopulaire que jamais en Allemagne! Plusieurs centaines d’agriculteurs du Wendland ont promis de sortir leur tracteur pour essayer de ralentir la progression du convoi.
Plus de 16 000 policiers seront sur le terrain pour empêcher les manifestants de bloquer le convoi et de s’enchaîner aux rails. Une mission qui devrait coûter au moins 50 millions d’euros aux contribuables, si l’on en croit Rainer Wendt. Le président du syndicat de la police a estimé que c’était aux groupes énergétiques de supporter le coût de cette intervention.
Lieu de stockage définitif?
Alors qu’on craint des débordements, la situation pourrait devenir délicate pour Angela Merkel, dont la popularité est en chute libre. Selon les sondages, plus de la moitié des Allemands sont opposés à la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires.
Pour eux, la chancelière a brisé le difficile consensus obtenu entre le gouvernement Schröder et les industriels en 2000. Elle est accusée d’avoir cédé au lobby nucléaire. Autorisés à prolonger la vie de leurs centrales, les groupes énergétiques pourront encaisser plusieurs milliards d’euros sans gros investissements supplémentaires – une partie doit néanmoins être reversée pour des subventions aux énergies renouvelables.
Par ailleurs, le problème des déchets reste entier alors que la prolongation de la durée de vie des centrales devrait générer 4400 tonnes de résidus radioactifs supplémentaires, l’équivalent de 36 convois «Castor». L’Allemagne ne dispose toujours pas de lieu de stockage définitif pour ses fûts. Or, elle devra rapidement se mettre en conformité avec la loi en préparation à Bruxelles sur l’obligation des pays membres à choisir des sites définitifs d’ici à 2015.
Le gouvernement conservateur a décidé de reprendre les études de faisabilité sur le site de Gorleben, l’endroit où doivent être entreposées les 123 tonnes de déchets vitrifiés en provenance de La Hague. Si le site de Basse-Saxe n’était pas retenu, les Allemands seraient confrontés à un véritable casse-tête. Aucun autre Land n’est prêt à accueillir les déchets radioactifs en raison de la résistance de la population. La Bavière et le Bade-Wurtemberg, qui auraient des sols appropriés, ont déjà refusé toute étude de faisabilité.