Les signes sont clairs: le dirigeant chinois, Xi Jinping, a étendu samedi sa domination sur le pouvoir, faisant progresser des personnalités qui lui sont entièrement loyales et consacrant son «rôle central» en clôture du Congrès du Parti communiste. Dans cette grand-messe politique parfaitement orchestrée, un vent de surprise a cependant parcouru les rangs des 2340 délégués réunis au Palais du Peuple: ils ont assisté à la mise à la porte de l’ancien président Hu Jintao, escorté vers la sortie par deux hommes, tandis qu’il semblait rechigner à partir.

Pratiquement levé de sa chaise par deux hommes, et visiblement désorienté, l’ancien président Hu Jintao, âgé de 79 ans, a été prié avec insistance de quitter la cérémonie de clôture. Assis aux côtés de Xi Jinping, il a échangé avec lui quelques mots inaudibles avant d’être conduit contre son gré hors de la gigantesque salle. Filmée, la scène a fait le tour des réseaux sociaux.

L'ancien dirigeant chinois «ne se sentait pas bien» ont indiqué les médias officiels. «Hu Jintao avait insisté pour assister à la séance de clôture ... malgré le fait qu'il avait du prendre du temps pour récupérer récemment», a assuré l'agence Chine nouvelle sur Twitter. «Lorsqu'il ne s'est pas senti bien pendant la séance, son équipe, pour sa santé, l'a accompagné dans une salle adjacente pour se reposer. Maintenant, il va beaucoup mieux», ajoute l'agence officielle.

Mais la décision la plus attendue de ces congrès – qui se réunissent tous les cinq ans – consiste en la nomination des sept membres de comité permanent du Bureau politique, l’instance suprême du Parti qui, lui-même, se place au-dessus de toutes les instances de l’Etat et dont la charte est supérieure à celle de la Constitution du pays. La nomination de ces sept élus ne doit intervenir que ce dimanche. Mais, d’ores et déjà, les observateurs ont scruté la composition du nouveau Comité central, l’organe qui doit assurer cette élection afin d’évaluer la réalité du rapport de force au sein de la nouvelle direction.

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Or, le Premier ministre, Li Keqiang, ainsi qu’un autre haut fonctionnaire, Wang Yang, ont tous deux démissionné du Comité central, indiquant qu’ils sont tous deux sur le point de prendre leur retraite. Li Keqiang a servi au cours de la dernière décennie à la tête du gouvernement, dans ce qui est considéré comme le deuxième poste le plus puissant de Chine, même si son autorité sur les agences gouvernementales semble avoir décliné au fil des années au profit de celle de Xi Jinping. Le numéro trois chinois Li Zhanshu et le vice-premier ministre Han Zheng ne figurent plus, eux non plus, sur la liste du nouveau comité central.

Le congrès a longuement salué par ailleurs les réalisations de Xi Jinping, déclarant notamment que sa direction avait «éliminé de graves dangers au sein du parti, du gouvernement et de l’armée». Autant de références qui semblaient viser le pouvoir de Hu Jintao, avant que n’advienne «la réalisation du grand renouveau de la nation chinoise», qui débouchera sans aucun doute sur la réélection de Xi Jinping en tant que secrétaire général du parti. «Osez vous battre pour la victoire», lançait ce dernier en fin de cérémonie.

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Mention de Taïwan pour la première fois

Ce vingtième congrès depuis la création du PCC en 1921 s’est tenu dans un contexte délicat pour la Chine, confrontée à un ralentissement de sa croissance en raison de confinements à répétition et de tensions diplomatiques avec l’Occident. Depuis une semaine, quelque 2300 délégués choisis par les différentes instances du Parti étaient réunis à huis clos, avec pour mission non seulement de remanier l’équipe dirigeante du parti, et donc de la deuxième économie mondiale, mais aussi de tracer les futures orientations du pays.

Depuis son arrivée au pouvoir fin 2012, Xi Jinping a accumulé les pouvoirs au sommet de la Chine et présidé à un renforcement de l’autorité du régime. Chef du Parti, chef des armées, chef de l’Etat… le dirigeant avait plaidé pour la continuité de ses politiques lors d’un discours à l’ouverture du congrès.

La stratégie «zéro Covid» devrait ainsi se poursuivre malgré ses conséquences néfastes sur l’économie et l’exaspération grandissante de la population face aux confinements. Loin de la diplomatie prudente de ses prédécesseurs, Xi Jinping devrait encore davantage faire entendre la voix de la Chine. Quitte à accroître les tensions avec le grand rival américain, en particulier autour de la question de Taïwan. Pour la première fois, le PCC a d’ailleurs décidé d’inclure dans sa charte une mention spécifique sur son «opposition» à l’indépendance de l’île de 23 millions d’habitants.

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