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«Ne pas relâcher l’effort»
Le président chinois a toutefois appelé à «ne pas relâcher l’effort» dans «la guerre de défense du Hubei et de Wuhan», selon Chine nouvelle. Sur place, le président chinois a visité l’hôpital Huoshenshan, construit en dix jours, où il s’est entretenu avec des médecins et des patients en visioconférence. Plus tard il a aussi visité une résidence, pour apporter son soutien aux habitants cloîtrés chez eux depuis six semaines, et discuté avec des membres des comités de résidents, chargés d’assurer la logistique et l’approvisionnement en vivres dans la ville en quarantaine.
La visite était étroitement contrôlée. Dans chaque appartement donnant sur le parcours présidentiel, un policier se tenait à la fenêtre, en combinaison de protection, d’après de nombreuses photos publiées sur les réseaux sociaux chinois. Pas question pour les habitants d’interpeller le président. Le 5 mars, lors d’une visite de la vice-première ministre Sun Chunlan, des résidents avaient crié «c’est faux, tout est faux» aux membres de sa délégation. Les mécontents dénonçaient la mise en scène des autorités locales, voulant faire croire à Pékin que les distributions de vivres se déroulaient parfaitement, alors que des habitants de certains quartiers se plaignent d’être mal servis.
Changement de communication
Depuis que la courbe du nombre de cas s’infléchit, la Chine a changé de communication, pour tenter de réparer son image fortement affectée par le virus. Cible des critiques au début de la crise pour avoir minimisé le risque et arrêté des médecins qui tentaient de donner l’alerte, le pays se donne désormais en exemple de gestion de l’épidémie. Alors que le virus déstabilise désormais les pays occidentaux, Pékin multiplie les aides aux pays touchés par l’épidémie, envoi de matériel de protection ou de tests de kits à ses voisins, ses alliés, ou à des pays en développement comme le Pakistan, l’Iran et plusieurs pays d’Afrique. La Chine doit «démontrer sa fiabilité en tant que puissance économique majeure et garder son attractivité pour le reste du monde», estime un éditorial du quotidien nationaliste Global Times, le 9 mars.
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Mais l’effort de communication va plus loin. La Chine a entrepris de faire oublier que le virus a émergé dans le pays en semant le doute sur ses origines. Deux études chinoises ont montré que le marché aux animaux sauvages de Huanan n’était pas le lieu de naissance du virus mais simplement le premier «cluster» ayant permis sa diffusion. Depuis fin février, la propagande s’est emparée de cette question non résolue pour se dédouaner. «Bien que l’épidémie soit d’abord apparue en Chine, cela ne veut pas forcément dire que son origine est en Chine, et encore moins qu’il a été «fabriqué en Chine», a écrit l’ambassadeur de Chine en Afrique du Sud, Lin Songtian, sur Twitter le 8 mars.
Quelques jours plus tôt, c’est le porte-parole du Ministère des affaires étrangères Zhao Lijian qui s’était insurgé. «En disant «virus chinois», et en suggérant ainsi son origine sans preuves ni faits, certains médias veulent clairement faire porter la responsabilité à la Chine, et leurs arrière-pensées sont évidentes», a-t-il déclaré le 4 mars. De quoi donner du grain à moudre aux théories du complot. Pour les réseaux sociaux chinois, le coupable est tout trouvé: le virus a émergé chez le grand ennemi et rival de la Chine, les Etats-Unis… même si tous les premiers cas sont bien apparus à Wuhan.
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