CDU et SPD étaient au coude-à-coude dimanche soir, à l’issue des élections de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, avec un léger avantage pour les sociaux-démocrates, crédités de 34,7% des voix contre 34,4% pour la CDU. C’est donc normalement à Hannelore Kraft, la tête de liste du SPD, que reviendra la tâche de former le prochain gouvernement régional. Le SPD reviendrait ainsi au pouvoir après cinq années passées dans l’opposition.
Succès des Verts
Hannelore Kraft sera tentée de gouverner avec les vrais vainqueurs du scrutin d’hier, les Verts, crédités de 12,7% des voix, et sans l’appui des néocommunistes de Die Linke (5,5%), mais pourrait être contrainte de former une grande coalition avec la CDU, qui a perdu 10 points par rapport aux précédentes élections en 2005. Le Land le plus peuplé d’Allemagne a clairement sanctionné hier la politique du gouvernement Merkel.
D’ores et déjà, il est clair que gouverner sera plus difficile pour Angela Merkel, qui voit s’éroder la majorité sur laquelle elle s’appuyait au sein du Bundesrat, la Chambre haute du parlement allemand représentant les Länder. L’aval du Bundesrat est indispensable pour mettre en œuvre le programme de réformes d’inspiration libérale que le gouvernement avait adopté à l’automne.
La Grèce a joué un rôle important dans le scrutin: 52% des électeurs assuraient au sortir des urnes avoir pris en compte la crise de l’euro dans leur décision. Non pas que les Allemands aient sanctionné leur chancelière pour le manque de solidarité européenne qui lui est reproché à l’étranger. Les Allemands, persuadés qu’ils ne reverront pas les crédits accordés à Athènes, sont majoritairement opposés à un soutien financier à la Grèce et les hésitations d’Angela Merkel sont surtout perçues en Allemagne comme une preuve de son sérieux en termes de gestion des finances publiques. Mais les Allemands, conscients que l’aide à la Grèce est inévitable, sont inquiets pour l’avenir, et ces inquiétudes ont incité bien des électeurs à adopter un vote de sanction.
Au-delà de la Rhénanie, de lourds nuages s’amassent en effet au-dessus de l’Allemagne et du gouvernement Merkel. L’augmentation des dépenses dans le sillage de la crise bancaire et de la crise grecque – les Allemands vont prêter 20 milliards d’euros à Athènes sur trois ans – et la chute des recettes fiscales privent Berlin de toute marge de manœuvre financière. Le Ministère des finances mise en effet sur 40 milliards d’euros de moins que prévu sur la période 2010-2013. Les rentrées fiscales ne retrouveront qu’en 2013 le niveau de 2008, selon les estimations d’un groupe d’experts, rendues publiques jeudi dernier.
Maigre consolation
«Angela Merkel préférerait certainement gouverner de nouveau avec le SPD plutôt qu’avec les libéraux, estime le politologue Gerd Langguth, auteur d’une biographie sur la chancelière. Avoir le SPD dans le bateau serait pour elle le meilleur moyen de pouvoir continuer à gouverner comme elle l’entend.» «Angela Merkel devient dès lundi une dompteuse devant affronter les chefs des Länder, son partenaire de coalition le FDP et le SPD dans l’opposition, qui tous vont lutter jusqu’au bout pour imposer leurs intérêts, estime le Tagesspiegel. Le public doit se préparer à trois années de négociations à tous les niveaux du pouvoir, entre Bundestag et Bundesrat.»
Maigre consolation pour Angela Merkel: la Cour constitutionnelle de Karlsruhe lui a épargné samedi une épine supplémentaire. La plus haute cour allemande a en effet rejeté la plainte déposée par une poignée de juristes eurosceptiques opposés à l’aide à Athènes. Les plaignants espéraient que la cour bloque en référé le versement des crédits promis à Athènes. Mais la cour a indiqué qu’un report de l’aide allemande jusqu’à un jugement définitif risquait de mettre en péril le plan de sauvetage concocté par l’Union européenne et le FMI.