Somalie
La prise d’otage du Maersk Alabama s’est terminée sous une pluie de balles. Le commandant des forces navales américaines au Moyen-Orient craint une escalades des actes violents de piraterie dans la région
Des tireurs d’élite de l’armée américaine ont tué tois pirates somaliens et libéré dimanche soir le capitaine du Maersk Alabama, Richard Philips, retenu en otage depuis quatre jours. Le porte-conteneurs avait été attaqué mercredi alors qu’il transportait de l’aide alimentaire vers l’Afrique de l’Est. Un quatrième pirate a été fait prisonnier.
La décision de titrer a été prise tandis que les négociations se poursuivaient. Les forces de la Navy, qui se trouvaient à une trentaine de mètres de l’embarcation de sauvetage où était retenu Richard Philips, ont vu un des pirates pointer son AK-47 contre le dos du capitaine et en ont déduit qu’il se trouvait en «danger imminent», a déclaré le vice-amiral William Gortney, commandant des forces navales américaines au Moyen-Orient. Celles-ci agissaient sur ordre du président Barack Obama, qui a salué le courage de l’otage et déclaré que «les Etats-Unis sont résolus à résoudre le problème de la piraterie».
William Gortney a précisé que l’objectif était de résoudre l’incident pacifiquement, mais que la tension est montée quand les pirates ont réclamé une rançon pour leur otage, ce que la Navy a refusé. Il a aussi averti que ces morts pourraient déboucher sur une escalade des actes de violence dans la région.
A Eyl, une localité connue pour sa densité de pirates, un certain Abdi Garad, qui se prétend «chef», a fait écho à ces paroles en annonçant une vengeance contre les Etats-Unis: «Nous intensifierons nos attaques, loin des côtes somaliennes, et la prochaine fois que nous détiendrons des citoyens américains, qu’ils n’attendent aucune pitié de nous», a-t-il déclaré à AP par téléphone.
Depuis deux siècles, aucun bateau américain n’avait été victime d’une attaque de pirates. L’équipage du Maersk Alabama, en net surnombre par rapport aux quatre pirates, avait réussi mercredi à les désarmer partiellement et à les convaincre de quitter le navire en échange d’une embarcation, de vivres, et du capitaine Richard Philips, qui devait être relâché par la suite en même temps qu’un des pirates fait prisonnier. Cet engagement n’a pas été tenu. Richard Philips avait tenté, en vain, de s’enfuir en se jetant à l’eau depuis l’embarcation de sauvetage.
Courte accalmie
En 2008, l’International Maritime Bureau (IMB) a recensé près de cent attaques de pirates au large des côtes de Somalie, dont la prise spectaculaire du Sirius Star, un superpétrolier transportant deux millions de barils de pétrole, et celle du navire ukrainien MV Faina, à bord duquel se trouvaient 33 tanks et du matériel militaire. Les deux ont été libérés contre forte rançon.
L’année 2009 avait mieux commencé: l’IMB recensait 16 tentatives dans le Golfe d’Aden en janvier, dont trois seulement aboutissaient à un assaut. L’Union européenne déployait sa mission maritime Atalante, dont le but premier est de protéger les bateaux transportant de l’aide alimentaire. La Suisse doit encore décider si elle y participe, et sous quelle forme. Les Indiens et les Chinois ont également dépêché des navires-escorte dans la région.
Toutefois, l’accalmie n’a été que de courte durée et semblait plus due à une météo défavorable aux pirates qu’à l’efficacité des mesures mises en place. Vendredi dernier, Florent Lemaçon, 28 ans, a été tué lors d’une opération de commandos français qui a abouti à la libération de quatre autres otages, dont un enfant de 3 ans, retenus par les pirates somaliens sur le bateau de plaisance Tanit. Dimanche, son père, Francis Lemaçon, a rendu hommage aux militaires qui «ont risqué leur vie» dans cette libération. Dûment averti par les autorités du danger qu’il faisait courir à sa famille, Florent Lemaçon avait passé outre.