L'expérience a en effet montré qu'en appelant un cyclone Cora, Frank ou Yvonne plutôt que B 9903 ou T 9811, on améliorait beaucoup la conscience du public, et donc les mesures de prévention. Régulièrement, des experts se réunissent donc pour remettre à jour les listes de noms, harmoniser les usages et tenter d'arbitrer entre les prénoms locaux et internationaux. Une tâche d'apparence anecdotique mais essentielle quand on sait qu'en 1992 Andrew avait à lui seul provoqué 30 milliards de dollars de dégâts aux Etats-Unis.
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Ce n'est pas la tempête mais une sérieuse zone de basse pression qui règne sur la Conférence mondiale sur le racisme de Durban. Pendant tout l'été, le comité préparatoire s'est activé à Genève, sans trouver de compromis satisfaisant. La sémantique joue ici un rôle encore plus important que pour les cyclones. Le 10 août à Genève, Madeleine Robinson, haut-commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme et secrétaire générale de la conférence, estimait que les «vues étaient encore divergentes mais qu'il y avait de bonnes chances de combler le fossé». Le 27 août, elle déclarait qu'on «avait fait preuve de flexibilité dans la recherche d'un compromis sur le vocabulaire» à propos de l'affirmation sionisme = racisme. Mais, quelques jours plus tard à Durban, elle sortait de ses gonds à ce même propos…
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Parler des problèmes, c'est bien. Mais parfois cela ne fait que les aiguiser. Kofi Annan, expert dans l'art de la feinte et de l'esquive, l'a bien compris. A Durban, le secrétaire général de l'ONU a botté en touche sur la question d'Israël et des compensations réclamées par certains Africains à cause de l'esclavage. Et en Capitaine Courage obstiné, il est revenu à la charge avec son projet de Global Compact en vue d'associer les multinationales et le secteur privé aux enjeux internationaux. «La discrimination est l'affaire de tous», a-t-il élégamment déclaré à l'intention des milieux d'affaires.
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Le Comité pour les droits économiques, sociaux et culturels a également tenu ses assises durant l'été. Parmi les rapports attendus, celui sur l'Allemagne a fait impression. En effet, la première puissance européenne n'est pas sortie tout à fait indemne de l'exercice. Une ONG a accusé le pays le plus riche du continent de mal nourrir près de 85% des 400 000 personnes âgées qui vivent dans des homes médicalisés en Allemagne. 36% d'entre elles seraient même dans un état de déshydratation chronique.
De même, la délégation allemande, conduite par son chef de mission à Genève, l'ambassadeur Walter Lewalter, a dû reconnaître que les détestables manifestations de xénophobie et de violence raciale qui ont éclaté dans diverses régions du pays étaient un grand sujet d'inquiétude. Un bon point pour lui: peu de pays reconnaissent ces problèmes d'eux-mêmes…
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Un peu occultés par les actions d'éclat de Carla Del Ponte contre Milosevic, les critiques de l'intervention de l'OTAN contre la Yougoslavie ne désarment pas. Michel Fernex, de Médecins pour une responsabilité sociale et pour la prévention de la guerre nucléaire, dénonce certaines dispositions de l'accord signé en 1959 par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA).
L'article 1 paragraphe 3 oblige en effet les parties «à accorder leurs vues par consentement mutuel» tandis que l'article 3 paragraphe 1 leur permet de «préserver les informations confidentielles qui leur sont données», lorsqu'elles doivent se prononcer sur des questions nucléaires. Cette ONG estime donc que l'OMS a les mains liées et ne peut pas se prononcer librement sur l'usage et les effets des bombes à l'uranium appauvri en Yougoslavie.