Spécialiste de droit pénal international, Marc Henzelin ne partage pas cette vision. «En agissant ainsi, Saddam Hussein se donne une stature de héros national. Il veut laisser une trace dans l'Histoire. Mais cela ne changera probablement rien au verdict. J'imagine mal qu'on ne condamne pas Saddam à mort. Le condamner à perpétuité pourrait, dans le monde arabe, être considéré comme une faiblesse», relève l'avocat genevois. De fait, jeudi, plusieurs Irakiens n'ont pas caché leur fierté de voir leur ancien président se défendre en chef d'Etat. «Quand il est arrivé au pouvoir, l'Irak était un village. Il l'a transformé en un grand pays. Et ceux qui sont au pouvoir aujourd'hui, qu'ont-ils fait? Ces derniers jours, il y a eu plus de morts que les 148 de Doujaïl», souligne un commerçant interrogé par l'AFP. Maintenant que l'ex-dictateur a admis sa responsabilité, mais pas sa culpabilité, certains demandent que le procès se termine.
Mort ou perpétuité?
Au vu de l'aura dont bénéficie l'ex-raïs, le procès de Saddam pourrait vite devenir un vrai casse-tête. Le condamner à mort? C'est susciter certainement de vives réactions sunnites à un moment où les rivalités intercommunautaires ont provoqué des explosions de violences. Notamment à Samarra où une mosquée chiite a été dynamitée. Le garder en prison à perpétuité? C'est maintenir un mythe vivant avec tous les risques que cela comporte dans un Irak qui pourrait basculer dans la guerre civile.
Même s'il a l'impression de prêcher en plein désert, Marc Henzelin pense qu'en lieu et place d'un tribunal où les juges ont été nommés par l'exécutif irakien, il aurait été préférable d'avoir un Tribunal pénal international. «Une telle instance aurait difficilement pu être accusée de partialité et aurait permis d'extraire le procès d'un contexte irakien très difficile au plan de la sécurité et de l'apport des preuves. Elle aurait élevé la légitimité juridique et politique de ce procès.»