La Chine se félicite de manœuvres d’encerclement de Taïwan
Asie
Pékin a procédé lundi à des manœuvres à tirs réels dans le détroit de Taïwan pour protester contre la rencontre de sa présidente avec le président de la Chambre des représentants américain. Un navire de guerre américain a lui été repéré en mer de Chine

L’armée chinoise a affirmé lundi avoir «achevé avec succès» ses manœuvres militaires ayant visé à encercler pendant trois jours l’île autonome de Taïwan. Cette dernière a détecté 12 navires de guerre et 91 avions au dernier jour de l’opération. Du 8 au 10 avril, le commandement militaire chinois «a accompli avec succès diverses tâches» de préparation militaire «autour de l’île de Taïwan avec l’exercice 'Joint Sword'», a indiqué l’armée dans un message diffusé sur les réseaux sociaux.
Il a «testé de manière approfondie sa capacité de combat» interarmées «en conditions réelles», a ajouté le commandement chinois, précisant «être prêt pour le combat, à n’importe quel moment, et résolu à écraser toute forme de séparatisme pour l’indépendance de Taïwan et tentatives d’interférences étrangères».
«Sérieux avertissement»
Dénoncées par Taïwan et les Etats-Unis qui ont appelé à la «retenue» tout en déployant un destroyer dans des eaux revendiquées par Pékin, ces manœuvres ont reçu lundi le soutien de la Russie. «La Chine a le droit souverain de réagir (aux) actions provocatrices» des Etats-Unis, «notamment en conduisant des manœuvres», a dit à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
Débutées samedi, les manœuvres chinoises visaient à protester contre une rencontre mercredi de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen avec le président de la Chambre américaine des représentants, Kevin McCarthy. Elles «servent de sérieux avertissements contre la collusion entre les forces séparatistes recherchant 'l’indépendance de Taïwan' et les forces extérieures, ainsi que leurs activités provocatrices», avait averti un porte-parole de l’armée chinoise, Shi Yi.
«Blocus aérien»
L’objectif était de simuler un «bouclage» du territoire de 23 millions d’habitants réclamé par Pékin, a expliqué l’armée chinoise. Et notamment un «blocus aérien», selon la télévision d’Etat CCTV. «L’indépendance de Taïwan et la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan s’excluent mutuellement», a déclaré Wang Wenbin, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Après la fin des manœuvres, le ministère des affaires étrangères de Taïwan a accusé la Chine d’avoir sapé «la paix et la stabilité» dans la région.
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Le commandement du théâtre d’opérations Est de l’Armée a précisé que le Shandong, l’un des deux porte-avions de la Chine, avait «participé à l’exercice du jour». Lors des manœuvres, des avions de chasse et des navires de guerre ont simulé des bombardements ciblés contre l’île. Taipei a annoncé que 12 navires de guerre avaient été détectés lundi à 18h00 (12h00 en Suisse) autour de l’île. «L’armée ne relâchera jamais ses efforts pour renforcer sa préparation au combat», a assuré le ministère de la Défense taïwanais.
Missiles «verrouillés»
Les Etats-Unis ont semblé eux aussi vouloir faire une démonstration de force: le destroyer américain USS Milius a mené lundi une «opération de liberté de navigation» dans un secteur de mer de Chine méridionale revendiqué par Pékin. Une «intrusion» immédiatement dénoncée par la Chine. Le Japon a indiqué avoir fait décoller ces derniers jours des avions de chasse en réponse à ceux ayant décollé et atterri du porte-avions Shandong.
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Sur une vidéo publiée lundi sur le compte WeChat du commandement du théâtre d’opérations Est de l’Armée, un pilote chinois dit être «arrivé près de la partie nord de l’île de Taïwan» avec des missiles «verrouillés en place». Dans une autre vidéo, accompagnée d’une musique dramatique, le coup de sifflet d’un officier fait courir le personnel militaire en position tandis qu’un barrage simulé sur Taïwan apparaît à l’écran.
De quoi inquiéter la population: «Nous, les gens ordinaires, on veut juste une vie simple et stable», confie à l’AFP Lin Ke-qiang, habitant de 60 ans de l’île Beigan sur l’archipel de Matsu qui appartient à Taïwan mais est visible de la côte chinoise. «Si une guerre arrive, maintenant que leurs missiles sont si avancés, nous n’avons aucune chance de résister, on sera écrasés», ajoute cet homme qui travaille comme cuisinier.
«Avertissement»
La Chine voit avec mécontentement le rapprochement ces dernières années entre les autorités taïwanaises et les Etats-Unis qui, malgré l’absence de relations officielles, fournissent à l’île un soutien militaire substantiel. Elle considère Taïwan comme une province qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Pékin vise cette réunification par la force si nécessaire.
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Les exercices à tirs réels de lundi étaient prévus dans le détroit de Taïwan à proximité des côtes du Fujian (est), la province qui fait face à l’île, selon les autorités maritimes chinoises locales. Le dernier déploiement important autour de l’île avait eu lieu en août: la Chine avait engagé des manœuvres militaires sans précédent autour de Taïwan et tiré des missiles en réponse à une visite sur l’île de la démocrate Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre.