Les contradictions du Kremlin
Russie
Edward Snowden entame sa 10e journée passée à l’aéroport de Moscou. Il demanderait l’asile à la Russie
«S’il veut partir et s’il trouve un pays qui souhaite le recevoir, eh bien, qu’il s’y rende», a déclaré hier soir Vladimir Poutine lors d’une conférence de presse. «S’il veut rester ici, il y a une condition: il doit cesser ses activités qui portent atteinte à nos partenaires américains, aussi étrange que cela puisse paraître sortant de ma bouche», a poursuivi le président russe, avant de conclure que, «visiblement, il ne souhaite pas mettre fin à ses activités […], c’est pourquoi il doit se trouver un pays d’accueil».
On croyait la Russie mieux disposée envers Snowden, qui aurait déposé dimanche soir une demande d’asile politique auprès des autorités russes, selon Kim Chevtchenko, consul russe en poste à l’aéroport de Cheremetievo, où se trouverait Snowden. Lundi soir, le service de presse du Service fédéral migratoire russe persistait à démentir avoir reçu la demande d’asile de l’informaticien américain. Des députés du parlement russe ont même proposé de soutenir une candidature de l’ancien employé de la CIA pour le Prix Nobel de la paix.
Trouver une solution
Lundi en milieu de journée, le directeur du Conseil de sécurité de la Fédération russe Nikolaï Patrouchev a fait une rare apparition sur la chaîne d’information d’Etat Rossia 24 pour annoncer que Vladimir Poutine et Barack Obama étaient tombés d’accord pour confier le sort de Snowden «au FBI et au FSB». Lui-même ancien directeur des services spéciaux russes, Patrouchev a précisé que ni Poutine ni son homologue américain «n’ont de recette toute prête pour sortir de cette situation». Selon lui, trouver un compromis sur ce point «ne sera certainement pas simple».
Le président américain Barack Obama espère, lui, que la Russie prendra une décision sur Snowden «basée sur les normes internationales», sous-entendant une extradition vers les Etats-Unis. Or il n’existe justement pas d’accord d’extradition entre les deux pays. Vladimir Poutine a rappelé hier, en parlant de Snowden, que «Moscou ne livre personne, à la rigueur, nous échangeons». Durant les dix jours de présence à Moscou du transfuge, les médias russes ont abondamment traité le sujet. Les partisans du pouvoir actuel l’ont érigé en «héros de la démocratie» et en «dissident américain». Les autorités russes ont dans le passé félicité Julian Assange pour ses révélations sur la diplomatie américaine via WikiLeaks. Il a été embauché pour présenter à distance une émission sur la chaîne d’Etat RT. D’autres médias, moins bien disposés envers le pouvoir, se sont saisis de l’affaire Snowden pour rappeler que les services de sécurité russes ont mis en place depuis plusieurs années le système SORM qui leur permet, dans les faits, d’écouter toutes les communications privées sur leur territoire.
Impossible de savoir ce que Snowden en pense. Il est soigneusement coupé des médias depuis son arrivée à Moscou le 23 juin. On ignore où il se trouve exactement, dans la zone de transfert internationale de l’aéroport de Cheremetievo ou dans un hôtel à proximité immédiate. Est-il contraint de rester à Moscou? L’Equateur a visiblement renoncé à l’inviter. Le Venezuela lui fait peur car tout peut y changer rapidement.