L’analyse des deux boîtes noires, croisée avec des relevés sur les lieux du crash et l’expérience des enquêteurs, permet de «privilégier fortement» l’hypothèse d’un attentat à l’origine du crash de l’avion russe en Egypte, a annoncé vendredi une source proche de l’enquête. Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Sameh Choukri, a cependant souligné samedi que l'enquête en cours n'avait pas encore permis de dégager une explication.

Tout était normal jusqu’à la 24e minute du vol

Le décryptage de l’enregistreur des données de vol et de l’enregistreur des voix dans le cockpit indique que «tout était normal», aussi bien au niveau des instruments que des conversations, jusqu’à la 24e minute de vol, quand les deux machines ont brutalement cessé de fonctionner, un comportement symptomatique d’une «très soudaine dépressurisation explosive», a indiqué cette source, qui a requis l’anonymat.

«Les enquêteurs, au vu des informations des boîtes noires mais aussi de constatations sur les lieux du crash et de leur expérience, privilégient fortement la thèse de l’attentat», poursuit-elle.
«L’hypothèse d’une explosion avec pour origine une défaillance technique, un incendie ou autre, apparaît hautement improbable parce que les enregistreurs auraient sûrement signalé quelque chose avant la rupture et les pilotes se seraient manifestés», dit encore la source.

«Théoriquement, l’hypothèse d’une explosion accidentelle aussi brutale est possible, mais, dans les faits, elle est de l’ordre du très peu probable», admet-elle, ajoutant: «un avion n’arrête pas aussi brusquement de transmettre des données en pleine altitude de croisière s’il n’y a pas une brutale explosion.»

Les sites spécialisés sur Internet expliquent qu’une dépressurisation explosive survient en moins de 0,5 seconde, provoquant des dommages instantanés aux poumons et la dislocation quasiment immédiate de l’appareil, ce qui explique l’immensité de la zone dans laquelle se sont éparpillés débris et corps dans le Sinaï égyptien, constatée d’emblée par les enquêteurs.

Un expert en aéronautique a expliqué que dans un tel cas, les câbles reliant les enregistreurs des données de vol aux différentes parties de l’appareil sont sectionnés instantanément, ce qui explique que les boîtes noires soient devenues «muettes» aussitôt après l’explosion.

Vols suspendus et sécurité renforcée

La Russie a ordonné la suspension de ses vols vers l’Egypte et la Grande-Bretagne a commencé à évacuer ses 20 000 ressortissants de Charm el-Cheikh, six jours après le crash. Deux vols ont décollé dans l’après-midi de la station balnéaire. Londres a cependant restreint les bagages aux seuls bagages à main. Aucune valise n’a été enregistrée en soute.

Des centaines de touristes russes patientaient eux aussi dans des files d’attente au milieu de leurs bagages devant les comptoirs d’embarquement des compagnies russes.

Lire: «Poutine croit à un attentat et suspend les vols russes vers l’Égypte»

Plusieurs compagnies étrangères dont les britanniques ont suspendu leurs vols vers et en provenance de Charm el-Cheikh alors que la France et la Belgique ont déconseillé à leurs ressortissants de s’y rendre. Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) n'a en revanche pas modifié ses conseils aux voyageurs.

La compagnie suisse Edelweiss a d'ailleurs maintenu son vol vendredi de Zürich à destination de Charm el-Cheikh. Mais environ un tiers des voyageurs avaient annulé ou changé la date de leur départ. Un vol d'Helvetic Airways a également été garanti. Le voyagiste Hotelplan qui utilise cette compagnie a dit que 134 de ses clients se trouvent sur place.

Illustrant la nervosité des compagnies aériennes, la néerlandaise KLM a interdit «par précaution» les bagages en soute sur son vol Le Caire-Amsterdam.

De son côté, Washington a demandé à «certains» aéroports du Moyen-Orient de renforcer les mesures de sécurité pour les vols en direction des Etats-Unis, par mesure de «précaution», a indiqué vendredi soir le ministre américain de la Sécurité intérieure, Jeh Johnson.

L'Airbus A321 de la compagnie russe Metrojet a explosé en vol avec ses 224 occupants dans le Sinaï le 31 octobre. L’avion s’était écrasé après son décollage de la station balnéaire de Charm el-Cheikh. Il s’agit de la pire catastrophe aérienne ayant jamais frappé la Russie.