Acculée, la première ministre britannique Liz Truss démissionne
Royaume-Uni
Prise dans la tempête et de plus en plus contestée, la première ministre britannique quitte son poste après six semaines. Le nouveau premier ministre sera désigné d’ici au vendredi 28 octobre par le parti conservateur
Liz Truss a cédé aux appels à la démission qui se faisaient de plus en plus pressants dans son propre camp, au lendemain d’une journée catastrophique pour son gouvernement. Malgré la démission de la ministre de l’Intérieur et une soirée sous haute tension tournant à la foire d’empoigne au parlement, le porte-parole de la première ministre assurait encore hier qu’elle n’avait aucune intention de renoncer. «La première ministre reconnaît qu’hier (mercredi) a été une journée difficile» mais elle «travaille» avec son ministre des Finances Jeremy Hunt pour agir en faveur de la croissance et la stabilité économiques, avait-il ajouté. «Chaos» est le mot repris sur toutes les unes de la presse britannique pour résumer cette journée cauchemardesque à Westminster, où un vote a tourné à la foire d’empoigne.
«Vu la situation, je ne peux pas remplir le mandat sur lequel j’ai été élue par le parti conservateur», a finalement déclaré Liz Truss cet après-midi devant le 10, Downing Street. Elle devient la cheffe de gouvernement à la longévité la plus courte de l’histoire contemporaine du Royaume-Uni.
Le nouveau premier ministre britannique sera désigné d’ici au vendredi 28 octobre par le parti conservateur au pouvoir, a annoncé jeudi un responsable de la majorité, Graham Brady, après la démission de Liz Truss. «Il sera possible de conduire un scrutin et de conclure une élection d’ici au vendredi 28 octobre», a déclaré aux journalistes Graham Brady alors que le processus de sélection de Liz Truss par les quelque 170 000 adhérents du parti au pouvoir avait pris deux mois après le départ de Boris Johnson.
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Qui pour la remplacer?
Pour les conservateurs, au pouvoir depuis 12 ans, l’enjeu maintenant est de trouver un successeur dans un pays en pleine crise économique et sociale avec une inflation à 10,1% en septembre, un sommet en 40 ans. Liz Truss avait aussi rencontré ce matin, à sa demande selon Downing Street, le député à la tête du puissant Comité 1922 chargé de l’organisation interne du parti conservateur (et donc d’une éventuelle procédure de remplacement), au moment où la dirigeante conservatrice se débattait avec une majorité de plus en plus frondeuse.
Quels seront les candidats, alors que depuis des jours, plusieurs noms circulent pour succéder à Liz Truss, comme ceux de Rishi Sunak, Jeremy Hunt, Penny Mordaunt – la ministre chargée des relations avec le Parlement – voire même Boris Johnson, le premier ministre qu’elle a remplacé en septembre.
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Liz Truss: une descente aux enfers
Liz Truss s’était décrite un jour comme une «perturbatrice en chef». Elle aura surtout été pour ses critiques une destructrice en chef lors de son passage éclair à Downing Street. Elle restera comme la première ministre la plus éphémère de l’histoire contemporaine, avec seulement 44 jours au pouvoir pendant lesquelles elle a aggravé les difficultés économiques de millions de Britanniques, affaibli l’image de son pays à l’international et épuisé ce qui restait d’unité dans un parti conservateur affaibli après 12 ans au pouvoir. A 47 ans, cette battante positionnée à droite du parti, auparavant ministre des Affaires étrangères, était arrivée au pouvoir sur une promesse simple: dans un contexte difficile de forte inflation et de flambée des prix de l’énergie, elle voulait relancer la croissance grâce à des baisses massives d’impôts.
Son expérience dans plusieurs ministères, sa vision optimiste avaient rassuré les militants conservateurs qui l’avaient préférée à l’ancien ministre des Finances Rishi Sunak, défenseur de l’orthodoxie budgétaire. Mais son ambitieux plan économique annoncé le 23 septembre par son ministre des Finances Kwasi Kwarteng, qui prévoit des dizaines de milliards de baisses d’impôt, n’a pas de financement clair. Les marchés s’affolent, la livre plonge, les taux d’emprunt flambent et la Banque d’Angleterre doit intervenir.
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Le président américain Joe Biden a promis de poursuivre une «étroite coopération» avec le gouvernement britannique après la démission de la Première ministre Liz Truss, qu’il a remerciée. «Je remercie la Première ministre Liz Truss pour ce partenariat», a déclaré M. Biden dans un communiqué, en assurant que l’amitié «au long terme» et la «fermeté» de l’alliance entre les deux pays resteraient inchangées.