Brexit: le songe éveillé de Theresa May
Commentaire
Dans un discours très attendu, la première ministre britannique a évoqué les contours du futur Brexit, à commencer par une sortie du marché unique. L'option «dure» a été retenue. Notre commentaire

Brexit dur. Après des hésitations, le premier ministre britannique Theresa May a levé les doutes sur ses intentions: la procédure sera lancée prochainement et sans concession. Dur, mais dur pour qui? Selon ses plans, le Royaume-Uni ne tirera que du profit de la séparation annoncée, sans contrepartie ou concession. Elle souhaite que la Grande-Bretagne se retrouve renforcée avec de nouveaux partenaires commerciaux. Elle imagine une île dont l’empire serait le monde, mais sans les insolubles problèmes qu’ont posés les colonies du vieil Empire avec ses migrants indésirables que Londres ne savait comment refuser.
Lire également: la Grande-Bretagne sortira du marché unique
Une coupure nette
Theresa May veut donc un Brexit franc comme une coupure faite au scalpel et qui ne saignerait pas. Elle entend ne rien garder des entraves, législations, cadre formel, juridique et autres contraintes qui font le canevas de l’Union européenne. Il s’agit d’une sortie de l’union douanière et du marché unique sans appel. Pour autant, Londres désire conserver ses relations profitables avec les Etats européens, à travers un futur accord de libre échange. Et surtout maintenir la liberté de circulation des capitaux. Ce que Theresa May présente comme des intérêts mutuels préservés apparaît comme un songe éveillé: recevoir le plus possible sans rien donner.
Des prétentions démesurées
A l’orée de négociations difficiles, Theresa May gonfle ses prétentions et annonce des objectifs lunaires. Elle respecte les règles du genre et confirme que les Anglais sont de redoutables négociateurs. Mais au-delà des postures légitimes, l’arrogance de demandes immodérées, les menaces de transformer le Royaume-Uni en paradis fiscal, le projet de se rapprocher des Etats-Unis de Donald Trump et les tergiversations sur le calendrier du Brexit irritent les Européens. Ces derniers vont mener la vie dure aux émissaires britanniques chargés de régler le divorce.
Un Brexit sans concession
Theresa May rêve d’un Brexit ferme qui ne s’accompagne d’aucune souffrance. Pourtant, ce sera dur de part et d’autre de la Manche. La Livre sterling a perdu de sa valeur, les foyers britanniques de leur pouvoir d’achat et les investisseurs étrangers se montrent de plus en plus prudents. Les Européens perdent quant à eux un membre essentiel et un contributeur net au budget. Que Theresa May revienne aux réalités! Elle a affirmé que le Brexit ne sera pas une adhésion partielle à l’UE, elle a évoqué les promesses d’une grandeur retrouvée, mais elle n’a rien dit de ce que sera le Brexit, ni des concessions que son gouvernement devra faire. Car ce volet, pourvu qu’elle s’en souvienne, sera écrit à quatre mains avec Bruxelles.