Europe
Le Parti démocrate slovène, conservateur, est arrivé en tête des législatives de dimanche. Son chef, Janez Jansa, n'est pourtant pas assuré de réunir une majorité pour gouverner

L’ancien premier ministre conservateur Janez Jansa est arrivé en tête des législatives de dimanche 3 juin en Slovénie. Mais il n’apparaît pas assuré de pouvoir rassembler une majorité de gouvernement. «Nous avons fait un premier pas pour un Slovénie forte et responsable en Europe», s’est félicité sur Twitter Janez Jansa, 59 ans.
Thank you Manfred for your help and good wishes. We made the first step towards a strong and responsible Slovenia in Europe. @ManfredWeber https://t.co/iNcWuwj3iF
— Janez Janša (@JJansaSDS) 3 juin 2018
Omniprésent sur la scène politique slovène depuis l’indépendance en 1991 de cette ex-république yougoslave, cet ancien dissident voit son Parti démocrate slovène (SDS) crédité de 25% des voix après le dépouillement de plus de 99% des bulletins de vote.
Il obtiendrait ainsi 25 sièges sur les 90 du parlement. Janez Jansa a agité durant sa campagne le spectre d’une «invasion» migratoire, empruntant des accents xénophobes au premier ministre national-conservateur hongrois Viktor Orban. Ce dernier lui a d’ailleurs apporté durant la campagne un soutien appuyé, qualifiant le dirigeant conservateur de «garant de la survie du peuple slovène».
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En net recul, le Parti du centre moderne (SMC, centre gauche) du premier ministre sortant Miro Cerar ne recueille que 9,7% (10 sièges). La coalition sortante fait toutefois jeu égal avec le SDS si l’on prend en compte les scores des sociaux-démocrates (10%, 10 sièges) et du parti des retraités Desus (4,9%, 5 sièges).
Un indépendant en faiseur de roi
Dans ce contexte, l’indépendant Marjan Sarec, donné deuxième à 12,6% (13 sièges), apparaît appelé à jouer un rôle crucial, selon les analystes. «Dans la mesure où nous sommes un parti non représenté au parlement, c’est un succès très important», s’est félicité cet ancien comédien devenu maire de Kamnik, une petite ville de province.
Marjan Sarec, 40 ans, qui cite volontiers le président français Emmanuel Macron en exemple, a réaffirmé qu’il n’entendait pas nouer d’alliance avec Janez Jansa, 59 ans. «Nous l’avons dit si souvent que nous ne serions pas crédibles si nous le faisions», a-t-il déclaré. Il a en revanche estimé que c’est sa formation qui in fine pourrait «avoir l’opportunité de former un gouvernement», si Janez Jansa, une personnalité volontiers clivante, échouait à rassembler une majorité.
«Répandre la peur»
Premier ministre de 2004 à 2008 et de 2012 à 2013, Janez Jansa avait dû écourter son deuxième mandat en raison d’une condamnation pour corruption qui lui a valu plusieurs mois de prison en 2014. Il avait obtenu l’annulation du jugement la même année et a construit son retour au premier plan en agitant le spectre migratoire dans ce petit pays situé sur l’ancienne «route des Balkans».
Une rhétorique qui rend aujourd’hui encore plus délicat un rapprochement avec les partis du centre sans lesquels Janez Jansa ne semble pas pouvoir être en mesure de rassembler une majorité. «Répandre la peur (des migrants) et impliquer le premier ministre d’un pays voisin dans notre campagne, c’est franchir la ligne rouge. Ni moi ni les membres de ma liste ne pouvons nous inscrire dans une telle constellation», avait prévenu Marjan Sarec avant le vote.
Paysage politique éclaté
Près de 500 000 migrants ont transité par la Slovénie en 2015 et 2016 avant de poursuivre leur route vers l’ouest de l’Europe, une vague qui avait alors poussé le gouvernement de Miro Cerar à ériger une clôture de 200 kilomètres à la frontière croate. Seul un millier de réfugiés et de demandeurs d’asile vivent dans le pays aujourd’hui, selon les chiffres officiels.
Ces législatives anticipées sont la conséquence de la démission au mois de mars de Miro Cerar, qui avait tiré les leçons de son incapacité à mener à bien un ambitieux projet ferroviaire. Quelque 1,7 million d’électeurs étaient invités à choisir leurs candidats issus de 25 partis politiques différents pour ce scrutin à la proportionnelle destiné à pourvoir les 90 sièges au parlement, dans ce pays entré dans l’Union européenne en 2004 et membre de la zone euro depuis 2007.