Entre Kiev et Moscou, la guerre du ciel redouble d’intensité
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AbonnéLundi, 70 missiles russes ont été à nouveau lancés sur toute l’Ukraine, provoquant des dégâts sur le réseau électrique. La nuit précédente, des drones ukrainiens pourraient, quant à eux, avoir touché un aérodrome stratégique russe, d’où décollent les avions bombardiers de Moscou

Descendre à la cave ou faire comme si de rien n’était. Quitte à jouer à la roulette russe. Voilà le dilemme qui travaille en silence les habitants de Kiev, lorsque retentit la sempiternelle sirène anti-aérienne. Lundi, il est 13 heures passées, lorsque les premières notifications crépitent sur les téléphones : après plusieurs jours d’attente, l’armée russe vient de lancer une attaque aérienne d’ampleur sur la totalité des régions ukrainiennes. Plusieurs dizaines de missiles de croisière sont signalés dans l’espace aérien, alors que le matin-même est entré en vigueur le plafonnement du prix du pétrole russe décidé par les puissances occidentales. Pour rajouter à l’ambiance, depuis plusieurs heures, la rumeur se forme que des explosions mystérieuses sont survenues la nuit précédente sur des aérodromes militaires russes.
Il s’agit-là de la huitième salve massive déclenchée par la Russie sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes depuis la mi-octobre. Le 23 novembre dernier, un missile tiré vers un barrage hydroélectrique au nord de la capitale s’est abattu sur un immeuble et a tué six personnes. Une erreur de trajectoire n’est jamais à exclure. « En théorie, je loge suffisamment loin de tout objet stratégique et le risque est minime, mais à chaque alerte, je mets ma femme et ma fille de 3 ans dans la voiture et nous roulons vite vers la station de métro la plus proche, car après tout, on ne sait jamais ce qui peut arriver », explique Yevhen Shevchenko, mécanicien de 35 ans, qui a évacué sa famille de Zaporijjia en octobre, après que la ville soit devenue la proie de bombardements
meurtriers.
«Système de coupure d'urgence»
Très vite, les nouvelles affluent de la plupart des capitales régionales du pays, où des témoins assistent à de nombreuses explosions. Sur la rive gauche de Kiev, les batteries de défense anti-aériennes se mettent à sulfater du calibre 35 mm vers le ciel et un avion de chasse survole la banlieue orientale. Mais en milieu d’après-midi, aucun impact majeur n’est signalé. Deux heures après le début de l’alerte, une vidéo apparait en provenance d’Odessa : un missile s’abat sur une sous-station électrique qui alimente une station de pompage d’eau. Dans le grand port de la mer Noire, la distribution d’électricité et d’eau courante sont interrompus. A Kiev, la situation apparait sous contrôle : dix missiles ont survolé la région, mais neuf d’entre eux ont été abattus, selon l’administration militaire de la capitale.
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Selon l’état-major de l’armée de l’air ukrainienne, 70 missiles ont été tirés sur le pays, et 60 d’entre eux abattus par la défense anti-aérienne, sans qu’il soit possible de le vérifier de manière indépendante. Pour la première fois, une image filtre d’un camion antiaérien de fabrication allemande Flakpanzer Gepard, qui abat un missile au dessus de la région de Kiev. La situation semble sous contrôle, même si des coupures d’électricité sont signalées dans plusieurs régions, à Poltava, Kharkiv, Soumy, Jytomir… En soirée, l’opérateur public UkrEnergo annonce qu’à cause des bombardements, il va être obligé de mettre en place « un système de coupures d’urgences dans toutes les régions d’Ukraine » et que « l’électricité sera fournie prioritairement aux infrastructures essentielles. » Bilan humain de la journée : trois morts.
En fin de journée, le ministère de la Défense russe confirme les informations qui circulent depuis le matin. Dans la nuit de dimanche à lundi, les Ukrainiens, ont tenté un coup audacieux. «Lundi matin, le régime de Kiev a tenté d’effectuer des frappes avec des drones sur la base aérienne de Diaguilevo, dans la région de Riazan, et sur celle d’Engels-2, dans la région de Saratov », indique le communiqué militaire russe. Selon le Kremlin, les forces ukrainiennes cherchaient «à mettre hors service les avions russes à long rayon d’action» utilisés ces dernières semaines pour les frappes qui ont visé de nombreuses centrales électriques sur le territoire ukrainien. Deux bombardiers stratégiques Tupolev TU-95 pourraient avoir été endommagés dans l’attaque sur Engels-2.
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