La décapitation d'un professeur qui avait montré à ses élèves des caricatures de Mahomet a frappé d'effroi la France, de nouveau touchée par un «attentat terroriste islamiste», selon les mots du président Emmanuel Macron, trois semaines après l'attaque devant les anciens locaux de Charlie Hebdo.

«Ils ne passeront pas. L'obscurantisme ne gagnera pas». Très ému, Emmanuel Macron a appelé vendredi soir la France à «faire bloc» après l'assassinat du professeur d'histoire-géographie à la sortie du collège de Conflans-Sainte-Honorine, dans la banlieue ouest de Paris.

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Le parquet antiterroriste saisi

Rapidement après l'attaque, survenue vers 17h près de l'établissement scolaire, une enquête a été ouverte pour «assassinat en relation avec une entreprise terroriste» et «association de malfaiteurs terroriste criminelle» par le parquet national antiterroriste français.

Quatre personnes, dont un mineur, membres de l'entourage de l'assaillant tué par les policiers, ont été placées en garde à vue dans la nuit de vendredi à samedi, a appris l'agence de presse AFP de source judiciaire. Le procureur antiterroriste Jean-François Ricard doit donner une conférence de presse samedi.

Un homme né à Moscou

L'assaillant, qui a crié «Allah Akbar» avant d'être abattu par les policiers, selon une source proche de l'enquête, n'a pas encore été formellement identifié. Une pièce d'identité retrouvée sur lui indique qu'il serait né à Moscou en 2002, selon une source judiciaire.

Les enquêteurs s'intéressent aussi à un message posté sur Twitter par un compte désormais fermé, montrant une photo de la tête de la victime sous laquelle Emmanuel Macron est qualifié de «dirigeant des infidèles». Son auteur, qui assure vouloir venger celui «qui a osé rabaisser Muhammad», est-il l'agresseur?

Les dessins en classe

Selon les premiers éléments de l'enquête, l'enseignant avait montré à ses élèves la semaine dernière une caricature de Mahomet. Un signalement était parvenu à Rodrigo Arenas, coprésident de la FCPE, la première association de parents d'élèves, faisant état «d'un père extrêmement énervé».

La victime aurait, selon Rodrigo Arenas, «invité les élèves musulmans à sortir de la classe» avant de montrer un dessin du prophète accroupi avec une étoile dessiné sur ses fesses et l'inscription «une étoile est née».

Le choc chez les élèves et parents

Le choc et l'incompréhension dominaient vendredi soir chez les élèves et leurs parents rencontrés par l'AFP dans ce quartier pavillonnaire, qu'ils décrivent comme calme et sans histoire.

«Je l'ai (l'enseignant) vu aujourd'hui, il est venu dans ma classe pour aller voir notre prof, ça me choque, je sais que je ne le verrai plus», confie Tiago, un élève du collège. «On a l'impression que ça n'arrive qu'aux autres, mais non, c'est à nos portes, c'est chez nous», glisse son père, Alfredo.

L'attentat a également soulevé une vague d'indignation dans la classe politique française, tous bords confondus. A l'Assemblée nationale, les députés se sont levés pour «saluer la mémoire» du professeur et dénoncer un «abominable attentat».

Cette attentat atteint un «niveau de barbarie insoutenable», a condamné la présidente du Rassemblement national (extrême droite) Marine Le Pen. «Ignoble crime», s'est indigné le leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon.

Trois semaine après une attaque visant «Charlie Hebdo»

La revue Charlie Hebdo, dont la rédaction avait été décimée en janvier 2015 par une attaque terroriste, a exprimé sur Twitter «son sentiment d'horreur et de révolte».

Cette attaque est survenue trois semaines jour pour jour après l'attentat au hachoir perpétré par un jeune Pakistanais de 25 ans devant les anciens locaux de Charlie Hebdo.

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L'auteur de cet attentat islamiste avait déclaré aux enquêteurs avoir agi en réaction à la publication et la republication par la revue début septembre des caricatures de Mahomet, à l'ouverture du procès des attentats de janvier 2015.

Depuis la vague d'attentats jihadistes sans précédent amorcée en 2015 en France, qui a fait 259 morts avec ce professeur, plusieurs attaques ont été perpétrées à l'arme blanche, notamment à la préfecture de police de Paris en octobre 2019, ou à Romans-sur-Isère en avril dernier.

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