A Kherson, «les gens ne veulent pas partir»
Au lendemain de l’explosion du barrage de Kakhovka, la résignation règne dans la ville inondée. Tandis que l’eau continue de monter, certains habitants prêtent main-forte aux secouristes quand d’autres, qui n’ont nulle part où aller, évacuent à contrecœur
Svetlana, bottes en caoutchouc trop larges sous sa robe à fleurs, se précipite vers le pneumatique en train d’accoster et attrape une motte de torchons que lui tend la vieille femme assise dedans, parmi quelques hommes, qui en veste pare-balles, qui en gilet de sauvetage. La motte de torchons miaule. La vieille femme descend péniblement de l’embarcation. Elle est pieds nus, les yeux rougis, hirsute. Au secouriste qui l’accueille, elle tend un sac en plastique gonflé d’affaires et une sacoche d’ordinateur portable, puis se laisse accompagner jusqu’à un petit muret sur lequel elle s’affale, essoufflée. Elle est en colère. Les secouristes l’ont forcée mercredi à quitter son appartement du second étage, alors que l’eau avait englouti le rez-de-chaussée. Elle n’a nulle part où aller.