Tout a commencé par un coup de fil. Samedi à Béziers: les allées Paul-Riquet sont, pour la première fois depuis des semaines, vides de militants venus «tracter» en faveur des deux candidates à la députation, Emmanuelle Ménard (épouse du maire Robert Ménard, proche du Front national) et Isabelle Voyer, pour La République en marche! (finalement battue dimanche). Le correspondant du Temps profite de la matinée avant de remonter sur Avignon puis Paris, via la Camargue et Arles, la ville de la ministre de la Culture, Françoise Nyssen. Cette trêve politique d’une journée est soudainement interrompue. Au bout de mon portable? La responsable de la presse internationale à l’Elysée, Barbara Frugier.

Lire aussi: Démission de François Bayrou, affaire Ferrand: l’impossible démarrage du quinquennat Macron

Le président français, m’explique-t-elle, rencontrera avant le sommet européen de ce jeudi les correspondants de plusieurs journaux européens. Le Temps fait donc partie de cette première équipe, réunie autour du quotidien français Le Figaro. Dans la boucle? Le Corriere Della Sera (Italie), The Guardian (Royaume-Uni), Le Soir (Belgique), la Süddeutsche Zeitung (Allemagne) et Gazeta Wyborcza (Pologne). L’objectif de ce premier entretien accordé depuis le début du quinquennat par Emmanuel Macron? Présenter sa vision de l’Europe et du monde, après un premier mois de présidence marqué par un quasi-sans-faute diplomatique face à Donald Trump, Vladimir Poutine et ses homologues du G7, rencontrés lors du sommet de Taormina, en Sicile. Pas de politique intérieure, en revanche. L’accord est vite donné. Les thèmes que nous désirons aborder sont expédiés en fin de journée via Le Figaro, désigné comme coordinateur de l’opération par l’Elysée.

Retrouvez nos articles sur les élections françaises.

Rencontre dans les jardins de l’Elysée

Mardi matin, 10h30. Après s’être réuni dans un café voisin pour organiser l’entretien à venir, notre petit groupe de journalistes patiente rue du Faubourg-Saint-Honoré, face au palais présidentiel. Tous, ou presque, étions là pour l’investiture, le dimanche 14 mai. Direction, cette fois, l’aile opposée de la salle des fêtes. Arrêt provisoire au premier étage, dans le petit salon d’attente des conseillers presse. Puis nos pas font crisser le gravier de la cour, écrasée de chaleur. Premier salon. Traversée de la salle du Conseil des ministres. Bifurcation à droite, vers les jardins de l’Elysée.

C’est là, découvre-t-on, qu’Emmanuel Macron nous recevra. Les drapeaux français et européen ont été installés en arrière-plan. Deux grands parasols nous protègent du soleil. Devant chaque place, une bouteille de Volvic, un bloc-notes vierge d’estampille (même pas un «Présidence de la République») et un stylo Bic noir d’écolier (je le confesse, je l’ai gardé). Un officier de sécurité ne nous a, depuis l’entrée, pas quittés d’une semelle. Chacun s’assoit. Les rumeurs de remaniements gouvernementaux planent sur les pelouses manucurées.

Un grand «redressement français»

Onze heures. «Monsieur le président de la République.» Emmanuel Macron arrive, annoncé par un huissier. Poignées de main. Certains visages lui sont familiers. La conversation s’engage presque aussitôt. Le nouveau locataire de l’Elysée nous propose au passage un café, que s’empressent de nous apporter des serveurs en livrée. Chacune de ses réponses est longue, précise, ciselée.

L’homme qui «aime dérouler sa pensée» veut faire comprendre qu’il est bien là pour orchestrer un grand «redressement français». L’exemplaire de l’édition spéciale du Temps «Génération Macron», posé devant moi, le fait sourire. Je le lui remettrai à la fin de notre échange de plus d’une heure et demie, après l’avoir interrogé sur sa visite à Lausanne, le 11 juillet prochain, pour défendre la candidature de Paris aux JO d’été 2024. «Je l’avais déjà vu. Ils l’ont affiché au QG d’En marche!», me confie-t-il. Une forme d’épilogue à cette folle, mais prometteuse, année présidentielle française.