D'abord strictement anti-euro, puis opposé à l’accueil des migrants. Le parti Alternative für Deutschland (AfD), qui a effectué une percée spectaculaire lors d'élections régionales dimanche en Allemagne, a connu depuis ses débuts en 2013 une profonde mutation. Il est passé de la lutte contre l'euro à un discours anti-réfugiés.

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A l'issue de trois scrutins régionaux dimanche, il se classe troisième force politique dans les parlements régionaux du Bade-Wurtemberg, de la Rhénanie-Palatinat. En Saxe-Anhalt, avec plus de 20%, le parti est 2e. Désormais l'AfD siégera dans la moitié des seize Parlements régionaux, soit la moitié de l'Allemagne.

Le parti a été fondé il y a trois ans par Bernd Lucke, un professeur d'économie de l'université de Hambourg. Il a rapidement séduit les déçus des partis politiques établis dont la CDU, la formation conservatrice de la chancelière Angela Merkel.

Ce sentiment que les contribuables n'en finissent pas de payer

Il surfait alors sur la vague de mécontentement liée à la crise de l'euro et, plus particulièrement, sur le sentiment assez répandu dans l'opinion allemande que les contribuables n'en finissaient plus de payer pour les erreurs des autres membres de l'Union européenne moins vertueux.

Si l'AfD échoue de peu en 2013 à envoyer des représentants au Bundestag, il parvient à envoyer sept élus au Parlement européen en mai 2014 (6,5%) puis entre dans tous les Parlements régionaux où il présente des candidats: la Saxe (9,7%), le Brandebourg (12,2%), la Thuringe (10,6%), puis en 2015 à Hambourg (6,1%) et Brême (5,5%).

Une dure lutte interne

Mais l'AfD est tiraillé par la lutte interne, opposant Bernd Lucke et Frauke Petry, incarnation d'une ligne plus nationale-conservatrice qui a justement séduit lors des scrutins régionaux, notamment à l'Est. Le congrès d'Essen, début juillet 2015, donne la victoire à Frauke Petry, et l'AfD entame un virage marqué à droite qui va encore s'accentuer avec la crise des réfugiés. Bernd Lucke, lui, a créé un nouveau mouvement, plus confidentiel à ce stade.

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Avec l'arrivée d'un million de demandeurs d'asile en 2015, le parti dirigé par Frauke Petry, quarantenaire au verbe sec et aux formules-choc, se fait ainsi le héraut des opposants à la politique jugée trop libérale d'Angela Merkel.

Accusé de flirter avec l'extrême droite, l'AfD rejette ce qualificatif, se définissant comme «conservateurs de droite» ou «libéraux de droite». La chancelière juge, elle, que l'AfD «attise les préjugés», et son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble l'a qualifié de «honte pour l'Allemagne».