Reportage
AbonnéLes troupes russes en Ukraine reculent presque partout, sauf dans la région de Bakhmout, à l’est du pays. Pour réaliser une percée, l’état-major recourt à la tactique utilisée durant la prise de Severodonetsk en juin: un déluge de bombes

Dans la lumière jaunie d’une ampoule de cave, les femmes de l’immeuble échangent des regards inquiets. La dernière salve de bombes, tonitruante, a décidé les habitantes de cette allée et quelques passantes prises par surprise à se réfugier dans l’abri commun. Tels des oracles, ces résidentes de Tchassiv Yar, un bourg à six kilomètres de Bakhmout, tentent de prédire l’étendue des bombardements à venir à l’aune des dernières explosions, et des événements dans la ville voisine. Au fond du boyau recouvert de salpêtre, une table et quelques chaises coincées sous des tuyaux forment le décor. «Ce n’est que le début. Cela va continuer. De pire en pire», devisent trois femmes. L’une: «Ça va être notre tour.» L’autre: «Comme à Bakhmout.» La dernière de conclure: «Mais où partir?» Le sol tremble, les carreaux grondent. Dans les étages ou plus loin dans la petite cité, il y a certainement des blessés, peut-être des morts.