Ukraine Stories: «En Russie, Wikipédia est plus utile que le Ministère de l’éducation»
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Alors que les autorités russes tentent de mettre en place leur propre encyclopédie en ligne, un défenseur du site web leur souhaite bonne chance pour rivaliser avec le 1,83 million d’articles de Wikipédia en russe. Voici le fil d’actualité issu de notre projet Ukraine Stories

Ce texte est issu du projet «Ukraine Stories» lancé par le partenaire anglophone du «Temps» Geneva Solutions, qui traite de la Genève internationale. Il s’agit de soutenir et de publier le travail de dizaines de journalistes ukrainiens et russes qui ont perdu leur poste ou leur média mais pas leur savoir-faire.
Une campagne de financement participatif a permis de couvrir les deux premiers mois du projet. Si vous souhaitez le soutenir pour la suite, contactez-nous par email à l'adresse info[at]genevasolutions.news.
■ Comment la Russie tente de bâillonner Wikipédia
Le bras de fer dure depuis des mois. Le 20 juillet, le service fédéral russe de supervision des télécommunications, Roskomnadzor, a décidé d’appliquer des mesures coercitives. Les moteurs de recherches russes doivent désormais informer leurs utilisateurs que Wikipédia viole la législation russe en publiant des informations illégales en lien avec «l’opération spéciale».
Début avril déjà, Roskomnadzor avait déjà exigé à Wikipédia de supprimer cinq articles portant sur la guerre en Ukraine. L’entreprise avait ignoré cette demande. Le Tribunal du district de Taganski l’avait alors condamnée à une amende de 5 millions de roubles (83 000 francs suisses).
Le média indépendant Meduza a contacté Stanislav Kozlovsky le directeur de Wikimedia Russie, la branche locale de la fondation à but non lucratif Wikimedia qui «fournit l’infrastructure nécessaire à la connaissance libre». Ils lui ont demandé comment les autorités russes tentaient de bâillonner l’encyclopédie en ligne: «Tout d’abord, ils essaient de créer un analogue à Wikipédia, appelé Knowledge. A son inauguration, ils avaient déjà dépensé 2 milliards de roubles (33 millions de francs suisses). Cela, pour environ cinq mille articles. En comparaison, Wikipédia en russe compte 1,83 million d’articles. Cinq mille articles supplémentaires sont rédigés sur nos pages toutes les trois semaines. Le tout, gratuitement. Pour l’amour de Dieu, laissez-les faire. Je leur souhaite bonne chance», avant d’ajouter: «Je pense que Wikipédia est plus utile en Russie que le Ministère des sciences, le Ministère de l’éducation et le Ministère de la culture réunis.»
■ Baisse des naissances en Russie depuis le début de la guerre
De mars à mai, 318 300 enfants sont nés en Russie. Au cours de la même période l’an dernier, Rosstat, le service fédéral des statistiques de l’Etat russe, en a enregistré 345 700. D’après l’analyse de ces données, le média indépendant «We can explain» a trouvé que le nombre de naissances avait baissé de 8% en 2022.
En avril, moins de 100 000 enfants sont nés, le taux le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans l’oblast de Pskov, la chute du taux de natalité atteint même les 22%. Selon le démographe indépendant Alexei Raksha, deux raisons expliquent ces chiffres: l’émigration des femmes enceintes et les effets de la vaccination covid.
«Je ne m’attendais pas à une telle baisse – elle pourrait être due au fait de l’émigration des femmes en fin de grossesse. Mais il y a peut-être une autre raison. La Russie a massivement vacciné sa population en juillet dernier, ce qui a pu engendrer cette forte baisse de la conception reflétée dans les statistiques d’avril», a déclaré le démographe.
Selon Rosstat, les Russes ont également divorcé plus souvent au cours des trois premiers mois de la guerre. Il y a eu 172 300 divorces entre mars et mai, contre 166 300 au cours de la même période en 2021.
■ «Le monde entier doit être informé des crimes russes»
Le 24 février, l’armée russe a franchi la frontière ukrainienne depuis Belgorod et a pénétré dans l’oblast de Kharkiv. Les journalistes étrangers se sont empressés de se rendre en Ukraine pour couvrir la guerre. Beaucoup d’entre eux ont recherché des fixeurs, des personnes de la région fiables qui connaissent le terrain et la situation sécuritaire. La demande est montée en flèche, surtout à Kharkiv, or il n’y en avait que très peu, car la région était auparavant paisible et n’attirait pas beaucoup de journalistes.
«Je n’avais jamais travaillé comme fixeur, explique le journaliste Serhii Prokopenko, mais je me suis reconverti car je voulais que les médias étrangers parlent de la situation.»
Avant la guerre, Serhii travaillait dans le secteur informatique et était le rédacteur en chef de la plateforme Gwara Media. Les articles qu’ils publiaient traitaient surtout de culture et d’innovation.
«Des groupes de journalistes étrangers et des fixeurs professionnels habitués à travailler dans des zones difficiles ont commencé à arriver à Kharkiv. Ils avaient besoin de personnes locales pour les aider avec la logistique, explique Serhii. J’ai donc commencé à travailler avec eux, à regarder comment ils fonctionnaient, et j’ai appris de cette façon.»
Au cours des quatre mois qui ont suivi le début de l’invasion, Serhii a travaillé avec des médias étrangers tels que France 24 et CBC Canada. Lui et son équipe ont également coopéré avec des journalistes indépendants.
Aujourd’hui, parallèlement à son travail de fixeur, Serhii rassemble des informations sur les crimes de guerre commis par les Russes dans les villages libérés de la région de Kharkiv. Son documentaire Ukraine: A City Under Siege, sur la vie à Kharkiv dans les premiers mois de la guerre, a été lancé en partenariat avec Al-Jazira.
«Il y a beaucoup de crimes de guerre en Ukraine. Il faut absolument éviter que les preuves disparaissent. Les services de sécurité, le bureau du procureur, les défenseurs des droits de l’homme s’occupent de tout cela, et nous, les journalistes, devons aider car il y a trop de travail, a déclaré Serhii. C’est un travail difficile de répertorier ces crimes, de les décrire, d’enquêter.»
Depuis le début de la guerre, le fixeur a entendu des récits de victimes de viols dans le village de Mala Rohan et a assisté à l’exhumation d’une femme tuée par des éclats de bombe.
Dans la banlieue d’Izyum, à 120 km au sud-est de Kharkiv, Serhii a «parlé avec un homme piégé dans le territoire occupé par les Russes. Il a dit que les occupants utilisaient des balles dum-dum», a-t-il expliqué, en référence aux munitions interdites par la Convention de La Haye de 1899. Ces munitions «s’ouvrent» après avoir touché une cible, pour causer le plus de dommages possible.
Serhii travaille actuellement sur un documentaire dans lequel toutes ces horreurs seront décrites avec des témoignages. «Nous voulons en parler aux médias étrangers. Le monde entier devrait être informé de ces crimes.»
Daria Kotielnikova est une journaliste ukrainienne de Kherson. Au début de la guerre, elle a fui sa ville et habite désormais à Barcelone en Espagne.
■ Bombardements à Mykolaïv: l’université de construction navale est touchée
Dans la matinée du 15 juillet, Mykolaïv a de nouveau été la cible d’une attaque massive de roquettes russes. Une quinzaine d’entre elles se sont abattues sur des bâtiments résidentiels, des infrastructures civiles et deux universités, dont l’Université nationale de construction navale Amiral Makarov.
C’est là qu’a été conçu en 1979 le croiseur Moskva, un navire qui était capable d’en commander plusieurs autres, simultanément. Seuls la Russie, les Etats-Unis, la Chine, le Japon et la Corée du Sud disposent actuellement de ce type de navire, appelé «navire amiral». Des lance-missiles soviétiques polyvalents, munis de missiles balistiques, équipaient la flotte.
Le Moskva menaçait de lancer un assaut amphibie sur la côte ukrainienne au début de la guerre. Sa destruction par les forces armées ukrainiennes en avril dernier a eu un impact décisif sur les combats.
Avant l’effondrement de l’URSS, la ville de Mykolaïv était déjà l’un des principaux centres du système soviétique de construction navale civile et militaire. Au XXe siècle, des sous-marins, des destroyers, des croiseurs et des cuirassés à la pointe de la technologie mondiale y étaient construits. Mais c’est dès le XVIIIe siècle que la ville de Mykolaïv s’est développée par les chantiers navals.
L’Université nationale de construction navale Amiral Makarov, détruite la semaine passée, a été fondée en 1901. C’était le seul établissement d’Ukraine à former des spécialistes de la construction navale conformément aux normes et exigences internationales. Au cours de ses 100 ans d’histoire, l’université a formé plus de 100 000 spécialistes en construction navale. Au moment de l’indépendance ukrainienne, Mykolaïv n’a pas abandonné sa spécialité et s’est tournée vers le marché occidental de la construction navale et de la formation. Plus de 7500 étudiants étaient inscrits dans l’une des 14 spécialités disponibles à l’université navale.
«Ils ont bloqué nos ports et la mer. Maintenant les Russes détruisent l’université de construction navale, celle dont j’ai été diplômé en 2003. La seule qui existe en Ukraine. Comment réagiraient-ils si cinq roquettes frappaient l’Université de Saint-Pétersbourg [la seconde université de construction navale de l’ex-URSS]?», a déclaré le gouverneur de la région de Mykolaïv, Vitaly Kim.
Oleksii Platonov est un journaliste ukrainien de Mykolaïv et le président de l’agence de presse Ukrpress Info.
■ Limogeage soudain de deux proches de Zelensky
La nouvelle du limogeage d’Ivan Bakanov, le chef des services de sécurité (SBU), et d’Iryna Venediktova, la procureure générale, a bouleversé la scène politique ukrainienne. Le président Volodymyr Zelensky a signé les décrets et annoncé les changements dimanche soir dans une allocution télévisée.
«A ce jour, 651 procédures pénales ont été enregistrées pour haute trahison et collaboration. Ces accusations concernent des procureurs et des responsables chargés de l’application des lois, a-t-il déclaré. Un tel éventail de crimes contre les fondements de la sécurité nationale de l’Etat et les liens enregistrés entre les employés des forces de sécurité de l’Ukraine et les services spéciaux russes posent de très sérieuses questions aux dirigeants concernés.»
D’après les autorités, ces décisions sont justifiées par une trop longue attente pour se débarrasser des collaborateurs et des traîtres au sein des forces de sécurité. Cependant, ni Bakanov ni Venediktova n’ont été renvoyés de leurs fonctions. Une enquête officielle est en cours.
La décision de renvoyer l’un de ces deux responsables requiert l’accord du chef de l’Etat et du parlement.
Ivan Bakanov dirige le SBU depuis août 2019. Il est un ami d’enfance de Volodymyr Zelensky. Les deux hommes travaillaient déjà ensemble dans la boîte de production Studio Kvartal-95 du président. Ivan Bakanov a fait partie de l’équipe de campagne présidentielle de Zelensky. Le mois dernier déjà, la publication américaine Politico a rapporté que Zelensky prévoyait de renvoyer Ivan Bakanov pour la présence de «traîtres» au sein du SBU et à l’avancée des troupes russes à Kherson.
Iryna Venediktova est l’ancienne conseillère de Zelensky et membre de son parti Serviteur du peuple. Elle est devenue procureure générale en mars 2020. Depuis le début de l’invasion, le 24 février, son bureau enquête activement sur les crimes de guerre commis par les forces russes sur le territoire ukrainien. Fin mai, Iryna Venediktova a rapporté que le bureau du procureur général traitait plus de 13 000 affaires de crimes de guerre, y compris des meurtres, des viols et la torture de civils ukrainiens par l’armée russe. Elle a par le passé été critiquée par de nombreux politiciens de l’opposition pour son manque de résultats significatifs dans des affaires d’anticorruption très médiatisées.
Pour Vitaliy Shabunin, le président du conseil d’administration du Centre anticorruption, ces limogeages confèrent le monopole du pouvoir à une seule personne: Oleg Tatarov, chef adjoint du bureau du président ukrainien. «La vraie raison de la suspension d’Iryna Venediktova et d’Ivan Bakanov est la remise de l’agence d’application de la loi et des services de sécurité entre les mains d’Oleg Tatarov.» Le politicien a auparavant comparu en tant que suspect dans une affaire de corruption.
Le journaliste militaire Yuriy Butusov estime que ces limogeages sont un signe de la concentration grandissante du pouvoir entre les mains du chef du bureau du président, Andriy Yermak.
Olga Golovina est une journaliste ukrainienne.
■ Quand Kiev bombarde des installations militaires russes sur son territoire
Lundi 11 juillet vers 23h, une explosion sourde retentit à Nova Kakhovka. Le ciel de cette ville située à 70 kilomètres de Kherson, dans une région largement contrôlée par les Russes, s’illumine d’étincelles. Un épais champignon de fumée se forme au-dessus de ses 47 000 habitants. Kiev venait de frapper des unités militaires et un dépôt de munitions russe situés sur son territoire occupé avec un lance-roquette américain Himars. L’administration militaire ukrainienne a fait état de 52 soldats tués côté russe, tandis que Moscou dénombre «au moins sept morts» et environ 60 blessés après un «acte terroriste».
Ukraine Stories a commandé à la journaliste ukrainienne Svitlana Vovk de rédiger un article. Il est intitulé: «Résistance à la Russie dans le sud de l’Ukraine. Ce que disent les habitants des explosions dans les entrepôts militaires.»
Une puissante explosion retentit dans l’entrepôt temporairement occupé de Nova Kakhovka, situé dans la région de Kherson. Le conseiller du chef de l’administration militaire de la région, Serhiy Khlan, publie le jour même sur sa page Facebook: «A Novaya Kakhovka, un entrepôt russe de munitions en moins. (…) Les fenêtres des gens s’envolent, mais ils sont toujours heureux… Parce que cela signifie que les forces armées ukrainiennes sont proches.» Il conseille par la même occasion aux habitants de Nova Kakhovka de faire attention à eux et ne pas s’approcher du lieu de la détonation.
Le lendemain, Serhiy Khlan signale via Facebook, que selon des informations préliminaires, un autre entrepôt contenant des munitions et des obus appartenant aux occupants russes à Nova Kakhovka a explosé: «Région de Kherson. Nova Kakhovka, district de Sokil… Les entrepôts de munitions et d’obus des racistes explosent à nouveau.»
Dans son message Facebook, le conseiller du chef de l’administration militaire remercie «les garçons et les filles de l’armée ukrainienne et les [lance-roquettes américains, ndlr] Himars», qui peuvent atteindre des cibles distantes d’environ 70-80 kilomètres.
Le 14 juillet, Serhiy Khlan rapporte que vers 22h, les forces armées ukrainiennes ont attaqué les envahisseurs russes à Nova Mayachka, situé à 15 kilomètres au sud de Nova Kakhovka: «Les occupants y avaient installé leur quartier général et leurs casernes dans les locaux de l’ancien sanatorium pour enfants», a-t-il encore écrit sur Facebook.
Iryna, habitante de Nova Kakhovka, (le nom a été changé pour des raisons de sécurité), raconte: «Je suis à la maison. Nous passons nos nuits à la cave. Je n’ai pas internet, alors je me rends chez un proche pour me connecter. Il n’y a plus non plus de réseau mobile», déclare-t-elle.
Dmytro (nom également changé) se trouve à Kherson depuis le début de l’invasion à grande échelle. Il rapporte que l’explosion du dépôt de munitions de Nova Kakhovka était «un feu d’artifice pour toute la région de Kherson». Mais, ajoute-t-il, «le verre brisé vole partout. Les gens souffrent.» L’homme dit attendre avec impatience le retrait des forces russes: «Tenir bon, c’est notre front personnel! Endurer l’anxiété, la peur et le désespoir… Et gagner!»
Par la journaliste Ukrainienne Svitlana Vovk.
■ Un monument historique à Kharkiv réduit en bois de chauffage
Le 9 juillet 2022, 190 ans après sa construction, la maison de la famille marchande Pavlov, a été visée par un missile russe. C’était l’une des plus anciennes demeures de Kharkiv, deuxième ville d’Ukraine, construite en 1832 par l’architecte Andrii Ton et bien plus tard classée monument historique. Depuis, les bureaux de l’administration du quartier de Novobavarskyi avaient pris leurs quartiers derrière les quatre colonnes corinthiennes qui habillaient la façade jaune.
D’après la Cour pénale internationale, la destruction d’un site historique est un crime de guerre. Début mai, l’Unesco avait identifié 27 bâtiments historiques touchés à Kharkiv.
Mais d’après l’architecte Viktor Dvornikov, qui s’est rendu sur le site au lendemain du bombardement, 70% du bâtiment est encore intact et tout n’est pas perdu. «La façade principale est vraiment endommagée, et il y a des fissures dans une autre partie du bâtiment, mais n’importe quel expert en restauration vous dira que les travaux à entreprendre sont simples», a-t-il déclaré.
Il a par ailleurs ajouté que plusieurs employés de la ville prévoient cependant de démolir l’ancienne demeure des Pavlov.
«Ce bâtiment est un monument protégé par la loi, qui a résisté aux révolutions et aux guerres du XXe siècle. Et maintenant, il a même survécu à un missile russe, s’exclame l’architecte. Mais il semblerait que les forces les plus destructrices de l’histoire et des villes sont les fonctionnaires.»
L’emplacement central du manoir à Kharkiv pourrait représenter une opportunité en or pour les promoteurs immobiliers de la ville.
«Les gens ne comprennent pas les avantages à long terme et les effets complexes de la préservation du patrimoine, la plupart ne sont intéressés que par les dividendes immédiats», déclare Viktor Dvornikov.
Lors du démontage de l’épave, les employés du service d’urgence de l’Etat ont tenté de préserver avec soin tous les débris de la façade principale, mais l’architecte a tout de même remarqué qu’une poutre porteuse en chêne de 8 mètres de long pesant plus d’une tonne avait disparu.
«Lorsque j’ai demandé aux fonctionnaires avec qui nous avions convenu de sauver le bâtiment ce qu’ils en avaient fait, ils m’ont répondu, «c’est pour le bois de chauffage, on ne sait pas comment l’hiver sera», déclare l’architecte, sidéré.
«Les gens doivent se rendre compte que leur identité ne s’exprime pas seulement dans les slogans et le langage, mais dans la continuité de tous les processus historiques que nous avons connus et que nous connaissons actuellement, a-t-il déclaré. Les monuments matériels servent de preuve irréfutable de notre parcours, en les effaçant, nous effaçons une page de notre mémoire, et donc les perspectives de nos descendants», conclut-il.
Stanislav Kibalnyk est un journaliste ukrainien basé à Kharkiv qui écrit pour une publication internet, Assembly.org.ua. Il est titulaire d’un doctorat en criminologie et dirige l’ONG Favela 61, qui fournit une aide humanitaire dans les zones de guerre.
■ Emploi en temps de guerre: entre chômage et formations
L’Organisation internationale du travail (OIT) estime dans son rapport publié en mai que 4,8 millions d’emplois ont été perdus depuis le début de la guerre – un chiffre qui pourrait atteindre 7 millions si la guerre s’intensifie. Dans la région du sud-ouest d’Odessa, où des dizaines de milliers de personnes ont trouvé refuge, les déplacés se forment pour espérer retrouver un emploi.
Si les impacts de la guerre sur le marché du travail ukrainien sont difficilement quantifiables, sur le terrain tout a changé. Le Centre d’Etat pour l’emploi affirme que le chômage a presque doublé: aujourd’hui, 11 chômeurs postulent en moyenne pour un emploi disponible, soit 5 de plus qu’en 2021. La situation la plus critique se trouve à Kherson, région du sud de l’Ukraine occupée par les Russes, où 86 chômeurs postulent en moyenne pour chaque emploi.
«Trouver un emploi le plus rapidement possible»
Selon l’administration militaire d’Odessa, plus de 85 000 habitants de Lougansk et de Donetsk, ont trouvé refuge dans la région d’Odessa. Nombreux s’inscrivent au Centre d’Etat pour l’emploi. D’autres n’ont d’autres choix que de se former. «Environ 300 personnes issues de toute l’Ukraine étudient actuellement au centre. (…) La qualification professionnelle qu’ils obtiendront leur permettra de trouver un emploi plus rapidement», déclare Roman Sarzhynskyi, directeur du Centre d’Odessa pour l’enseignement professionnel et technique.
La guerre aura des conséquences sur le marché de l’emploi des pays alentour, principalement en Hongrie, Moldavie, Pologne, Roumanie et Slovaquie, anticipe l’OIT. En effet, l’afflux massif de réfugiés pousse le taux de chômage à la hausse et risque d’affaiblir les systèmes de protection sociale de ces pays.
Anzhela Derevianko travaillait chez Ilyich Steel and Iron Works, l’une des plus grandes sociétés métallurgiques du pays, dont les bombardements ont détruit les installations. «Il n’y a malheureusement pas d’entreprise dans ce domaine à Odessa (…), je vais donc devoir suivre une formation (…) Cela me prendra quatre mois et m’offrira de nouveaux débouchés. Mais jusque-là, nous devons vivre des aides fournies par l’Etat.» Si elle se fait engager, Derevianko prévoit de rester à Odessa: «Je vais très probablement construire ma vie ici, car notre maison à Marioupol a été entièrement détruite par un missile.»
Valentyna Tymoshenko, auparavant assistante de laboratoire, travaillait dans une ville de la région de Donetsk où les combats font rage, a trouvé un emploi dès sa première visite au centre. «J’ai eu la chance de trouver un emploi dans mon domaine aussi rapidement. Cet argent sera suffisant pour louer un appartement». Son mari cherche, lui, toujours un emploi. «En attendant un revenu complet, nous vivons sur les aides de l’Etat.»
Des postes dans le secteur médical et les services
La guerre a également créé des nécessités et donc de nouveaux débouchés. «Le plus grand nombre de postes vacants se trouvent dans le domaine médical. Mais de nombreux emplois sont aussi disponibles dans les entreprises de service essentielles au fonctionnement du pays, où il est nécessaire de remplacer les travailleurs qui sont partis», explique Tetiana Kanava, directrice du Centre pour l’emploi de la ville d’Odessa.
Depuis le 24 février, 39% des emplois pourvus l’ont été dans l’agriculture, 12% dans l’industrie de transformation, 12% dans le secteur du commerce et 11% à l’Etat et la défense.
Tetiana Bezhenar est une journaliste ukrainienne qui vit et travaille à Odessa depuis quinze ans. Elle travaille pour Rada, une chaîne de télévision ukrainienne.
■ 500 militaires bouriates refusent de se battre en Ukraine et quittent l’armée russe
Le 9 juillet, 150 militaires contractuels sont rentrés chez eux en République de Bouriatie, en Sibérie, à plus de 6000 km à l’est de Moscou. D’après la loi, les militaires sous contrat ont le droit de résilier leur accord lorsqu’ils le souhaitent et ne sont pas dans l’obligation de se battre en Ukraine.
Mais Alexandra Garmazhapova, la directrice de la Fondation Free Buryatia, explique au média indépendant Freedom TV que les soldats sont souvent mal informés, menacés de poursuites pénales, enfermés sans accès à leur téléphone. S’ils parviennent à soumettre une démission, elle est souvent refusée.
«Les commandants font semblant de ne pas voir les lettres de démissions et classent les soldats qui les déposent sous la catégorie «enclins aux mensonges et à la trahison», déclare la directrice. Environ 300 à 350 militaires sous contrat ont postulé chez nous, et il y en a plus chaque jour.»
La fondation prodigue des conseils aux soldats qui ne veulent pas se battre en Ukraine. L’armée est l’une des seules opportunités économiques pour les Bouriates, issus d’une des régions les plus pauvres de Russie. Le 28 juin déjà, les femmes des soldats Bouriates avaient appelé le dirigeant de leur région à donner des informations sur leurs maris partis au front en février. Depuis le début de la guerre, Free Buryatia a été en contact avec 500 militaires sous contrat.
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«Ce sont toutes des personnes qui disent ne pas vouloir se battre, elles ne comprennent pas ce qu’elles font là-bas, explique la directrice. Très souvent, une demande regroupe plusieurs personnes. C’est-à-dire que le soldat qui nous contacte est le seul à avoir un téléphone parmi les personnes avec qui il est enfermé.»
Depuis peu, les militaires de la République de Touva, à environ 4000 km au sud-est de Moscou, à la frontière avec la Mongolie, tentent également de démissionner.
«Les militaires ont envoyé leur lettre il y a trois semaines, mais elles n’ont pas été acceptées, raconte Alexandra Garmazhapova. Près de 20 d’entre eux sont désormais enfermés dans une zone occupée de l’est de l’Ukraine. Ils ne seront sûrement pas libérés et craignent d’être envoyés au combat sans leur équipement.»
La directrice explique par ailleurs être en contact avec des soldats qui ne comprennent tout simplement pas leur mission: «J’ai été contacté par un militaire qui a réussi à mettre fin à son contrat et il m’a dit: «Je ne veux pas être un occupant et je ne comprends pas pourquoi on «dénazifie» l’Ukraine alors que j’ai vécu neuf ans à Moscou et que j’y ai été confronté au racisme et à la xénophobie. Etes-vous sûr que l’Ukraine ait besoin d’une dénazification?»
■ Fusillade pour les condamnés à mort de Donetsk
La peine de mort est de retour dans la République populaire de Donetsk (RPD), région de l’est de l’Ukraine occupée par la Russie. Alors que Moscou et Kiev appliquent depuis les années 1990 un moratoire sur la peine capitale pour siéger au Conseil de l’Europe, Denis Pouchiline, le dirigeant du territoire séparatiste, a signé un décret le 12 juillet dernier visant à rétablir la peine capitale. De son côté, la Russie s’est retirée du Conseil de l’Europe le 15 mars dernier, mais n’a pas annoncé de changements de politique sur la peine de mort.
D’après les déclarations de Denis Pouchiline à la chaîne d’information officielle RIA Novosti, les condamnés de la RPD seront fusillés. Cela pourrait être le cas des Britanniques Shaun Pinner et Aiden Aslin, et du Marocain Brahim Saadoun, si leur appel est rejeté.
Ces trois hommes ont été accusés d’activités mercenaires pour l’Ukraine et condamnés à mort lors d’un procès expéditif en RPD. Pourtant, les forces armées ukrainiennes les considèrent comme ses propres soldats et ils devraient donc bénéficier de la Convention de Genève qui protège les prisonniers de guerre. En juin, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a demandé à la Russie de veiller à ce que les hommes capturés ne soient pas condamnés à mort.
Pendant ce temps, mardi 12 juillet, la RPD a inauguré son ambassade en Russie, seul pays à reconnaître la République autoproclamée avec la Corée du Nord et la Syrie.
«Nous considérons que l’activité mercenaire est un crime terrible car les gens viennent dans un autre pays pour tuer d’autres personnes en échange d’une récompense, alors qu’ils n’ont aucun objectif personnel lié au conflit en question», a déclaré Natalia Nikonorova, la «ministre des Affaires étrangères» de la République.
D’après Reuters, à la question de la réputation de la RPD suite à la mise à mort des condamnés, Natalia Niokonorova a répondu: «Oui, c’est la punition la plus conséquente, mais elle figure dans notre législation et elle n’est pas liée au processus de reconnaissance de la République populaire de Donetsk par d’autres Etats.»
■ «J’ai compris que j’étais Ukrainien en 2014»
Valery Lypynsky, nom de code «Heartman», a 29 ans et se bat avec une unité de combat internationale. Il a participé à la libération des régions de Kiev et de Tchernihiv et mène actuellement des missions de reconnaissance autour de Kharkiv. Fin juin, il s’est éclipsé du front pour régler des affaires administratives à Kiev. Il nous accueille une fin de soirée en treillis militaire, la barbe ébouriffée et sa fille de 3 ans dans les bras. «Je retourne au front demain», nous informe-t-il.
Heartman est né dans une famille russophone de l’oblast de Lougansk, à l’est du pays. Dans sa jeunesse, le militaire craignait les bandéristes, ces patriotes ukrainiens supporters de Stepan Bandera, un leader nationaliste de la Seconde Guerre mondiale diabolisé par la propagande russe.
La «révolution de la dignité» de 2014, pro-Union européenne, a été un tournant pour lui. «C’est là que j’ai compris que j’étais Ukrainien», explique-t-il. Dès lors, il apprend l’ukrainien. Heartman exclut le russe de son langage quotidien en 2018.
Aujourd’hui, sa région natale est occupée par l’armée russe. Sa peur des bandéristes lui paraît insensée, car d’après la propagande russe, il en fait désormais partie. «Finalement, le premier Russe que j’ai tué est celui qui était en moi», dit-il en riant avec fierté.
Heartman commande une unité de 80 soldats, dont 23 combattants étrangers. Tout comme l’ethnie ukrainienne cosaque, leur unité fonctionne sans hiérarchie définie et toutes les décisions sont discutées et prises en groupe. Entre deux bouffées de cigarette électronique, il nous raconte son quotidien:
«Pour nous, c’est déjà la troisième guerre mondiale. Ici, les combattants viennent de partout: Danemark, Australie, Etats-Unis, Israël, Royaume-Uni, Corée du Sud, et même du Kazakhstan.»
D’après Valery, le moral des soldats «est beaucoup plus élevé maintenant» qu’en 2014. L’intensité de la guerre et les attentes sont également plus élevées, surtout comme commandant. «Je dois rédiger des rapports lorsque tout le monde dort, et parfois, je n’ai même pas le temps d’aller tuer des Russes», se plaint le militaire avec sarcasme.
En 2014, lorsque la Russie a annexé la Crimée et que la guerre du Donbass a débuté, Valery a rejoint le bataillon Aidar. Un an plus tard, il a fondé avec d’autres vétérans la chaîne de cafés Veterano Coffee pour réintégrer la vie civile. Mais comme beaucoup, il s’attendait à ce que la Russie réattaque.
«La plupart de mes proches ont acheté des équipements et des armes, explique-t-il. J’ai acheté une kalachnikov AKM 762, des munitions et je me suis préparé à une nouvelle offensive.»
Cependant, personne ne s’attendait à une guerre d’une telle brutalité. Malgré cela, Heartman reste optimiste. «Nous sommes formés, bien équipés et nous avons tous beaucoup d’expérience militaire. Je pense que c’est la raison pour laquelle les Russes ont tant de mal. Ils nous ont sous-estimés», dit-il, en se référant à leur échec dans la région de Kiev.
«Nous avons reçu beaucoup de missiles antichars portables. Grâce aux Américains de notre unité qui ont servi en Irak et en Afghanistan, nous savons les utiliser», explique Valery. Cependant, l’unité «manque toujours de lance-missiles et a besoin de toutes sortes d’armes, surtout des bombes nucléaires», ajoute-t-il en rigolant. Selon lui, le Mémorandum de Budapest, ratifié en 1994 par l’Ukraine, lui a momentanément garanti l’intégrité mais a permis l’agression militaire russe en lui interdisant l’accès à l’arme nucléaire.
Les autorités ukrainiennes prédisent une guerre longue et «très difficile». Valery ne pense pas retrouver sa vie civile de sitôt et préfère se concentrer sur l’avenir de l’Ukraine. Sa voix est calme et optimiste. «J’espère que d’ici à la fin de l’été, nous libérerons la Crimée, et qu’au début de l’automne, nous atteindrons les portes de Moscou», ajoute-t-il presque sérieusement.
Iryna Matviyishyn et Joseph Roche à Kiev.
■ Procédure simplifiée pour que les Ukrainiens deviennent Russes
Le lundi 11 juin, le président russe Vladimir Poutine a signé un décret qui permet à chaque citoyen ukrainien de demander la nationalité russe, d’après l’agence de presse nationale RIA Novosti.
Depuis le mois de mai déjà, les Ukrainiens des régions occupées de Donetsk, Lougansk, Zaporijjia et Kherson pouvaient obtenir la nationalité russe de manière simplifiée «à des fins humanitaires».
■ L’Europe refuse les demandes d’extradition russes
De mars à mai 2022, les pays européens ont refusé à 43 reprises les demandes d’extradition du procureur général russe, rapporte le quotidien économique Kommersant.
Le nombre de refus d’extradition est trois fois plus élevé que pour la même période l’année dernière. L’Allemagne, à elle seule, s’est notamment opposée au renvoi de 13 personnes condamnées en Russie. L’Autriche, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne et la République tchèque, quant à eux, ne cachent pas la raison politique de leurs décisions.
Pour le bureau du procureur général de Russie, les refus sont dus à des «expressions de russophobie», qui ont «atteint un niveau scandaleux» depuis le début de «l’opération militaire spéciale» en Ukraine.
■ Rencontre avec l’un des meilleurs chirurgiens pour enfants en Ukraine
Maksym Ponomarenko est l’un des meilleurs chirurgiens pédiatriques d’Ukraine. Malgré la guerre, ses consultations ne baissent pas.
«Mes petits patients ne peuvent pas attendre la fin des bombardements, le retour du silence. Ils nécessitent une aide immédiate, explique-t-il. Il s’agit d’enfants gravement malades de tout le pays, qui n’ont pas pu être opérés ailleurs.»
Le chirurgien a lui-même été affecté par le conflit ukrainien de 2014. Il a alors dû déménager de Donetsk à Kiev.
«C’était la décision la plus difficile de ma vie. Mes parents ne voulaient pas quitter l’est et nous avons eu une grosse dispute, raconte-t-il. Il était important pour moi de travailler en Ukraine, car je suis un patriote.»
Bien qu’il ait eu du mal à pratiquer durant les mois qui ont suivi le début de l’offensive, Maksym Ponomarenko a continué: «Lorsque les sirènes nous alertent d’une attaque aérienne, la plupart des médecins descendent dans l’abri antiatomique où ils continuent de s’occuper des patients, mais il est impossible pour moi d’en faire autant si j’ai un enfant allongé sur la table d’opération.»
Le 24 février, à 6h du matin, alors que Kiev et d’autres villes ukrainiennes sont bombardées, le chirurgien continue d’opérer à l’hôpital pour enfants d’Okhmatdyt. Durant les trois premiers mois de la guerre, il effectue 120 opérations.
La plus mémorable intervention reste celle du 16 mars, lorsqu’un missile atterrit près de son hôpital: «Avant de se faire opérer, la patiente blessée m’a avoué qu’elle rêvait de faire du vélo. Alors, pour la première fois, j’ai autorisé quelqu’un à faire du vélo dans la salle d’opération. A ce moment-là, j’ai tout simplement pleuré.»
Le médecin est sûr que même si des missiles traversent les fenêtres de l’hôpital, il continuera à travailler.
Maxym Khotilenko est un journaliste de télévision, basé à Kiev.
■ Interview de Vitaliy Kim, charismatique gouverneur de Mykolaïv et star des réseaux sociaux
Vitaliy Kim, gouverneur de la région de Mykolaïv, est l’un des symboles de la résistance ukrainienne. Depuis le 24 février, sa petite région s’oppose avec acharnement à «la deuxième armée du monde». Sa phrase emblématique: «Bonsoir! Nous sommes d’Ukraine», par laquelle il introduit ses vidéos, l’a propulsé star des réseaux sociaux. Celle-ci a depuis été reprise dans une chanson techno qui rythme désormais les vidéos TikTok anti-russes.
Plus récemment, une photo de Vitaliy Kim, pieds sur son bureau, a été récupérée comme mème pour illustrer le calme et le travail des Ukrainiens face à l’agression russe. Le 29 mars, il a survécu au bombardement de l’administration régionale qui a fait une trentaine de morts. Notre correspondant Oleksii Platonov a rencontré ce charismatique gouverneur.
Quelle est la situation actuelle à Mykolaïv?
Vitaliy Kim: La guerre continue à faire rage aux frontières de Mykolaïv, dans un rayon d’environ 20 kilomètres. Heureusement, l’artillerie, qui pilonnait sans interruption, n’atteint plus la ville car nous avons récupéré une partie des territoires dans la direction de Kherson. Cependant, les attaques à la roquette sont plus fréquentes.
Obtenez-vous les armes nécessaires promises par vos partenaires occidentaux?
Cette information est confidentielle. Mais je peux dire que nous continuons à recevoir des armes et que leurs livraisons sont indispensables. Grâce à cet approvisionnement, nous faisons des progrès considérables dans notre avancée.
Avez-vous des informations sur les soldats ukrainiens morts au combat?
Bien sûr, mais cela est également confidentiel. Je peux en revanche me prononcer sur la population civile. Depuis le début de la guerre, plus de 1000 personnes ont été blessées à Mikolaïv, 338 d’entre elles sont mortes, dont 10 enfants.
Quel est votre objectif principal?
Tout d’abord, il s’agit de gagner la guerre. Ensuite, nous reconstruirons complètement ce qui a été détruit par les envahisseurs russes dans la région.
D’après vous, que planifient les Russes?
Les Russes s’attendaient à être accueillis par des fleurs, mais leurs informations étaient erronées. Ils ont fait un mauvais calcul. Aujourd’hui, les territoires occupés ne reconnaissent pas le gouvernement russe et ne veulent pas coopérer avec lui.
En ce qui concerne l’offensive de Mykolaïv, je pense que les troupes russes ne sont pas prêtes à avancer en direction de la ville et à attaquer la région car la majorité de leurs forces sont concentrées dans le Donbass. Mais les actions des occupants ne sont pas toujours logiques.
Que se passe-t-il dans la ville occupée de Snigurivka, située à l’est de Mykolaïv?
Snigurivka est actuellement occupée mais nous continuons de soutenir ses habitants, de payer les pensions des retraités et les aides sociales. En ce qui concerne les actions militaires, nous sommes sur la défensive. Je ne peux pas vous en dire davantage sur la stratégie. Mais selon les données officielles, comme vous pouvez le voir, nous gagnons du terrain en direction de Kherson.
Comment va l’économie de la ville? Comment l’aide humanitaire est-elle gérée?
En ce moment, la ville fonctionne presque comme avant: les magasins, les pharmacies, les marchés sont ouverts. Quant aux personnes déplacées, nous leur fournissons toute l’aide humanitaire possible. Nous avons tout de même fait des réserves en cas d’évolution inattendue, mais pour l’instant, notre économie est vivante et nous apportons de l’aide à tous ceux qui en ont besoin.
La région de Mykolaïv nourrit l’Ukraine. Comment les récoltes se sont-elles passées?
Les récoltes ont déjà démarré. Entre 2 et 2,2 millions de tonnes de céréales devraient être produites cette année. C’est légèrement moins que l’an passé en raison de la météo. Les agriculteurs risquent leur vie, lorsque des mines ou des obus explosent à proximité, mais continuent leur travail. Le faible prix d’achat imposé par les grandes entreprises qui ont peur de travailler dans ces conditions cause énormément de soucis aux agriculteurs. De plus, depuis le blocage des ports de la mer Noire, la logistique est extrêmement compliquée et coûteuse. Nous cherchons donc encore une solution pour vendre la récolte à des prix acceptables.
Quel message aimeriez-vous transmettre?
Cette guerre, ce n’est pas l’affrontement entre deux armées. Les Russes tentent de détruire le peuple ukrainien et ses symboles dans son ensemble. Je souhaite donc à nos citoyens de vaincre l’ennemi le plus rapidement possible.
Depuis le 24 février, l’Ukraine défend toute l’Europe face une Russie qui désire s’emparer des Etats baltes et d’une partie de l’Europe pour restaurer l’Empire soviétique. Nos partenaires occidentaux ne doivent pas s’habituer à regarder la guerre à la télévision. C’est une menace réelle et nous avons besoin d’aide pour vaincre ce mal implanté sur le territoire ukrainien. Nous attendons la libération de toute l’Ukraine, y compris de Kherson, Marioupol, Donetsk et de la Crimée!
Oleksii Platonov est un journaliste ukrainien de Mykolaïv et le président de l’agence de presse Ukrpress Info.
■ Première peine de prison pour position antiguerre en Russie
Le 8 juillet, le Tribunal du district de Meshchansky, à Moscou, a condamné Alexeï Gorinov, un député municipal moscovite d’avoir «disséminé des informations clairement mensongères» sur l’armée russe en usant de «ses fonctions officielles» et de l’avoir fait dans le cadre d’un groupe organisé motivé par la «haine politique», rapporte Novaya Gazeta. Europe.
Alexeï Gorinov a apporté à l’audience une affiche sur laquelle il avait écrit: «Il vous la faut encore, cette guerre?» Mais il n’a pas été autorisé à la montrer à l’auditoire. Le député a été condamné à 7 ans de prison dans une colonie pénitentiaire.
Le Moscovite a été arrêté le 26 avril, pour avoir dénoncé le 15 mars la guerre et l’agression de Moscou contre l’Ukraine, pendant une réunion de son assemblée municipale qui était retransmise sur YouTube. Il a été envoyé en centre de détention provisoire dès le lendemain de son arrestation. Le comité d’enquête a géré l’instruction de l’affaire pénale en cinq jours. Le procès s’est déroulé en seulement trois séances et le bureau du procureur a réussi à présenter les preuves en quelques heures.
Elena Kotenochkina, une autre députée municipale accusée des mêmes faits, n’est pas jugée car elle a réussi à quitter la Russie avant son arrestation. Son nom a été ajouté à la liste des personnes recherchées à l’internationale.
Alexeï Gorinov se voit notamment condamné pour avoir qualifié «l’opération spéciale» de «guerre» et d’avoir évoqué la mort d’enfants ukrainiens. Ces informations, selon le Ministère public russe, contredisent les informations officielles du Ministère de la défense. Le député et sa collègue ont donc «induit en erreur un nombre illimité de personnes» car la séance était retransmise sur YouTube, ce qui constitue pour le tribunal des circonstances aggravantes.
■ A Kharkiv, ni emploi ni paix
Avant la guerre, Kharkiv comptait 1,5 million d’habitants. Trouver un emploi était compliqué. Aujourd’hui, le marché du travail est détruit. Les habitants hésitent entre rester et fuir, alors que ceux qui sont partis plus tôt ne savent pas s’ils doivent rentrer.
Il n’existe pas de données exactes sur le nombre d’habitants actuels à Kharkiv. Alors que les estimations de l’administration militaire régionale tournent autour de 700 000 personnes, celles du maire, plus optimiste, arrivent à 1 million. Le nombre de résidents semble avoir doublé par rapport à avril et mai, au moment le plus bas. Sans chiffre précis, il est clair que des centaines de milliers de personnes sont rentrées.
Il est d’autant plus difficile de mesurer le taux de chômage. La plupart des habitants ne veulent pas s’y inscrire, mais selon «l’association des employeurs privés», 54% des entreprises ont totalement ou partiellement fermé. Selon l’institut de sondage Rating, 53% des Ukrainiens de l’est ont perdu leur emploi depuis le 24 février et sont au chômage.
Le retour des habitants semblait idéal pour relancer les anciennes entreprises ou en créer de nouvelles et redresser l’économie de Kharkiv. Mais cela n’est pas courant car les personnes qui reviennent ont souvent besoin d’aide. La plupart sont sans emploi ou n’ont plus d’économies.
Pour certains, si, dans les régions les plus touchées par la guerre, les hommes en âge de servir à l’armée pouvaient quitter le pays, ce qui est actuellement interdit, il y aurait moins de chômage. Mais les autorités ukrainiennes ont besoin d’hommes qui s’engagent dans l’armée. Les volontaires se plaignent pourtant des longs délais d’attente pour rejoindre les rangs.
D’après une source proche du parti présidentiel, l’interdiction de départ des hommes pourrait être levée à la mi-automne. Mais cela pourrait être trop tard pour sauver l’économie de Kharkiv.
Stanislav Kibalnyk est un journaliste ukrainien basé à Kharkiv qui écrit pour une publication internet, assembly.org.ua. Il est titulaire d’un doctorat en criminologie et dirige l’ONG Favela 61, qui fournit une aide humanitaire dans les zones de guerre.
■ Comment Mykolaïv s’approvisionne en eau
Depuis l’attaque russe du 12 avril qui a détruit les pompes à eau de Mikolaïv, la pénurie d’eau courante met à l’épreuve ses habitants. Pour s’approvisionner, certains récupèrent l’eau de pluie tandis que d’autres utilisent les réserves qu’ils avaient faites en prévision. Pour une solution plus durable, la ville s’est tournée vers les réservoirs les plus proches.
Bien que Mykolaïv soit à 130 kilomètres d’Odessa, la coopération entre les deux villes du sud de l’Ukraine s’est intensifiée depuis le début de la guerre. En effet, Mykolaïv fait office de bouclier pour Odessa, où la vie est plus ou moins calme. Cette dernière s’affaire quant à elle à soutenir Mykolaïv. Les Odessites récoltent par exemple plus d’un mois des bouteilles d’eau pour combler la pénurie d’eau potable de leurs compatriotes.
«Nous avons accepté toute l’eau apportée, explique l’un des volontaires, Eduard Shvaiuk. En moyenne, nous envoyions 20 tonnes de bouteilles d’eau par jour. Les entreprises ont apporté leur aide séparément en conduisant de gros véhicules chargés d’eau.»
L’administration de la ville d’Odessa a quant à elle mobilisé cinq camions-citernes chargés de 8 tonnes d’eau potable chacun, des camions récupérés dans les villages des alentours. Des équipes de forage ont aussi été mandatées pour creuser de nouveaux puits.
«L’aide et le soutien entre nos deux villes sont de la plus haute importance à l’heure où l’ennemi détruit nos infrastructures, a déclaré Gennadiy Trukhanov, le maire d’Odessa. C’est dans ce genre de moment où l’on voit la puissance de l’unité ukrainienne. Chaque citoyen montre au monde entier que nous sommes une grande famille.»
Le 15 juin, des bénévoles d’Odessa ont installé un système de filtration près d’un hôpital pour enfants à Mykolaïv. Plus d’un million de hryvnias (33 000 de francs suisses) a été récolté par les Odessites.
Le système permet de filtrer l’eau de sources ouvertes ou de forages et a été créé spécifiquement pour les besoins de la ville. Il peut purifier jusqu’à 48 mètres cubes (48 000 litres) d’eau par jour.
«Grâce au système de filtration, nous disposons d’une eau potable sans avoir besoin de dépenser énormément de ressources pour transporter des bouteilles d’eau», déclare Inha Kordynovska, responsable d’un centre de volontaires.
Les volontaires continuent à collecter des fonds pour installer d’autres systèmes de filtration, mais pour l’instant, l’eau courante est suffisante pour Mykolaïv.
Tetiana Bezhenar est une journaliste ukrainienne qui vit et travaille à Odessa depuis quinze ans. Elle travaille pour Rada, une chaîne de télévision ukrainienne.
■ Igor Kolykhaïev, le contesté maire de Kherson a été kidnappé par les Russes
Igor Kolykhaïev, maire de Kherson, a été enlevé le 28 juin par l’armée russe qui occupe cette ville du sud de l’Ukraine. «Il a été arrêté par des membres armés de la Garde russe dès qu’il est sorti de sa voiture», a écrit Galina Liashevska, l’attachée de presse du conseil municipal, sur sa page Facebook.
En l’absence du maire, les fonctions devaient être exercées par son adjointe, Halyna Luhova, mais la Russie a nommé Oleksandr Kobets à sa place.
Un maire qui divise
Igor Kolykhaïev a été élu maire en 2020. Lors de ces élections, il a battu Volodymyr Saldo, l’ancien dirigeant de Kherson, qui coopère avec les Russes depuis les premiers jours de l’occupation. Pourtant, Igor Kolykhaïev divise. Si certains habitants sont impressionnés par ses œuvres caritatives et ses initiatives, d’autres critiquent vivement ses deux ans de mandats.
Yevhen Ryschuk, maire de la ville voisine d’Olechky, également occupée, remet en question son enlèvement sur Facebook: «Suis-je le seul à penser que cette histoire sent le roussi? Lorsque les [Russes] ont saisi nos bus destinés à l’évacuation des civils, nous leur avons demandé comment les récupérer. Un colonel russe nous a répondu: «adressez toutes vos questions à Kolykhaïev.»
Pendant ce temps, Kirill Stremousov, nommé par Moscou comme chef adjoint de l’administration militaire de Kherson, a exprimé sa joie face à l’enlèvement du maire. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, il le décrit comme un homme qui a «tout fait» pour instaurer «le régime néonazi» à Kherson.
Un refus de coopération publique
Igor Kolykhaïev a été membre du parlement ukrainien de 2019 à 2021, sans contributions notables. En dehors de ses activités politiques, il est notamment le propriétaire d’une équipe de futsal (du football en salle), d’une organisation caritative, et de plusieurs sociétés agricoles.
Au début de l’occupation, le maire a décidé de rester à Kherson. Il a travaillé depuis son domicile lorsque le bâtiment du conseil municipal a été saisi par les Russes. Il a publiquement refusé de coopérer avec eux mais, selon le maire d’Olechky, il est impossible qu’il ait pu rester dans la ville jusqu’à présent, sans avoir travaillé avec Moscou.
L’attachée de presse du conseil municipal affirme qu’Igor Kolykhaïev a reçu une lettre qui l’invitait à coopérer quelques jours avant sa disparition. S’il refusait, il serait enlevé. Les autorités ukrainiennes ne savent pas où il se trouve depuis sa disparition.
Avant la guerre, Kherson exportait des céréales vers le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et certains pays d’Asie. Cette entreprise est désormais menacée par l’armée russe.
Aucun couloir humanitaire n’a été autorisé. Seul le commerce de marchandises depuis la Crimée voisine, occupée par la Russie depuis 2014, est permis.
Bien que les habitants de Kherson ne puissent l’affirmer ouvertement par crainte de répercussions, ils disent attendre la libération de la ville.
Daria Kotielnikova est une journaliste ukrainienne de Kherson. Au début de la guerre, elle a fui sa ville et habite désormais à Barcelone en Espagne.
■ Un groupe pharmaceutique américain va interrompre ses livraisons de vaccins ROR à la Russie
L’entreprise pharmaceutique américaine MSD va cesser de fournir à la Russie ses vaccins ROR (rougeole-oreillons-rubéole) et Varivax (varicelle). Le fabricant de médicaments a cependant précisé qu’il continuera à vendre ses produits n’ayant pas de génériques, indique le quotidien économique russe Kommersant.
Le Service fédéral russe de surveillance des soins de santé (Roszdravnadzor) a confirmé avoir été prévenu par MSD de son projet de cesser les exportations de médicaments, mais assure qu’il existe suffisamment de génériques en Russie.
Selon Antonina Oblasova, cofondatrice de l’association Collective Immunity, la loi oblige toute entreprise pharmaceutique à continuer les livraisons de médicaments ou de matériel médical durant l’année qui suit l’annonce des changements auprès du Ministère de la santé.
Varivax représente près d’un cinquième des vaccins contre la varicelle injectés en Russie, tandis que ROR ne compte que pour 1,5% des ventes.
En raison de l’invasion russe en Ukraine, plusieurs grandes sociétés pharmaceutiques ont annoncé qu’elles stopperaient les essais cliniques en Russie. Le groupe pharmaceutique Lilly a quant à lui cessé de fournir des médicaments non essentiels au pays, à l’exception de ceux destinés aux patients cancéreux et diabétiques.
■ Des dizaines de morts dans une station balnéaire d’Ukraine
La nuit du jeudi 30 juin a été un véritable enfer pour les habitants de la station balnéaire de Sergeevka, à 80 kilomètres d’Odessa. Une attaque russe a fait 40 blessés et 21 morts, dont un enfant. Les opérations de sauvetage se poursuivent.
«Les sauveteurs travailleront jusqu’à ce que nous soyons sûrs que personne ne se trouve sous les décombres», a déclaré Maryna Martynenko, la porte-parole du département des services d’urgence de l’Etat de Bilhorod-Dnistrovskyï.
Alors que deux missiles ont été tirés sur des aires de jeu, un autre a visé un immeuble résidentiel de neuf étages. Vers 1h du matin, les deux, trois et quatrième étages ont été touchés. Les débris ont ensuite déclenché un incendie.
«Des morceaux de murs ont volé, des meubles ont commencé à tomber. L’armoire est tombée sur le sol, et le réfrigérateur est tombé sur moi. J’ai poussé mes enfants dans un petit trou et ils sont sortis de justesse. Moi, je n’ai pas pu passer, a déclaré Kateryna Orekhova, une habitante du quartier. Ma fille est allée chercher les secouristes qui m’ont aidée à sortir de sous le réfrigérateur.»
Huit personnes ont été retrouvées vivantes et plus de 35 blessées, dont deux dans un état critique, ont été évacuées.
Les forces de l’ordre récoltent actuellement des fragments de missiles dans tout le village. Il semble que les explosions proviennent de missiles Х-22 soviétiques, lancés par des avions ennemis survolant la Crimée occupée. Les experts pensent qu’il s’agit d’une vengeance pour la reprise par les Ukrainiens de l’île des Serpents sur laquelle se trouvaient les troupes russes. Il n’y a pas d’installations militaires ou d’infrastructures critiques à proximité du village.
«Nous avons averti les autorités après la libération de l’île des Serpents [le jour d’avant] et aujourd’hui notre pire cauchemar s’est réalisé, a dit Serhii Bratchuk, porte-parole de l’administration régionale militaire d’Odessa. Il s’agit d’un nouvel acte terroriste.»
Tetiana Bezhenar est une journaliste ukrainienne qui vit et travaille à Odessa depuis quinze ans. Elle travaille pour Rada, une chaîne de télévision ukrainienne.
■ La soupe qui divise l’Ukraine et la Russie
Ce vendredi 1er juillet, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) a ajouté la préparation du bortsch à sa liste du patrimoine culturel immatériel en péril. L’Ukraine le réclamait depuis plusieurs années, mais Moscou s’y opposait.
La journaliste ukrainienne Mariana Tsymbalyuk a enquêté sur les enjeux qui entourent cette soupe de betteraves et comment celle-ci s’est retrouvée au cœur d’un débat géopolitique.
A quelle nationalité associez-vous les sushis? La pizza? Quel pays vous vient à l’esprit lorsque vous parlez de curry? La cuisine fait partie de l’histoire et de la culture d’un peuple. Elle peut même devenir une attraction touristique. Aujourd’hui en Ukraine, les plats nationaux sont devenus des enjeux géopolitiques.
«Le bortsch, c’est la xénophobie, le nazisme et l’extrémisme sous toutes ses formes», a déclaré Maria Zakharova, représentante du Ministère russe des affaires étrangères, lors d’un briefing à Moscou le 7 avril. Selon elle, l’Ukraine ne veut pas partager le plat, «parce que ce n’est pas possible de partager le bortsch, [car c’est une soupe, ndlr]. Il ne doit appartenir qu’à une seule personne. A un seul peuple, à une seule nationalité.»
En URSS déjà, la cuisine était porteuse d’enjeux. Joseph Staline avait chargé Anastase Mikoïan, vice-président du Conseil des ministres de l’Union soviétique, d’instaurer une cuisine nationale commune pour renforcer l’identité culturelle soviétique.
En 1939, Le Livre des plats sains et savoureux, est publié. Une sélection de recettes de chaque Etat de l’Union soviétique y est détaillée aux côtés de citations de Staline. Ce livre était offert aux jeunes mariés par le Parti communiste.
Dans le chapitre «recettes ukrainienne», la fameuse soupe se décline en pas moins de 20 versions. La première recette date du XVIe siècle, époque à partir de laquelle le bortsch est devenu un plat ukrainien culte.
Aujourd’hui, différents bortschs se retrouvent dans la cuisine juive ashkénaze, en Europe de l’Est et dans les pays post-soviétiques.
Cependant, l’Unesco a reconnu la version ukrainienne car elle est «une partie intégrante de la vie familiale et sociale ukrainienne». Selon l’organisation, la guerre a engendré le déplacement de la population et de la destruction des terres fertiles et cela menace la fabrication du bortsch ukrainien.
Le bortsch est le plat ukrainien le plus populaire. Il est préparé dans un bouillon de viande ou de légumes, auquel sont ajoutées des betteraves, du chou, des pommes de terre et des haricots. Il est ensuite assaisonné avec des oignons, des tomates et des carottes frites. En règle générale, il est servi avec de la crème aigre saupoudrée de persil et d’aneth.
Le ministre ukrainien de la Culture, Oleksandr Tkachenko, a déclaré sur son canal Telegram que «la victoire dans la guerre du bortsch est la nôtre… Nous gagnerons également la vraie guerre.»
Mariana Tsymbalyuk est une journaliste indépendante ukrainienne basée à Ivano-Frankivsk. Elle écrit pour des médias locaux et nationaux.
Lire l’article en entier sur Geneva Solutions (en anglais)
Traduction et adaptation: Aylin Elci