Un grand oral centré sur le climat et le social pour Ursula von der Leyen
Europe
La candidate désignée à la présidence de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a tenté de convaincre mardi matin les eurodéputés de voter en sa faveur en axant son programme sur le changement climatique et sur le droit des femmes notamment. Verdict ce mardi en fin de journée

Une héritière de Simone Veil, la «pionnière» et première présidente du Parlement européen, dont elle s’inspirera «du courage» pour défendre les droits des femmes mais aussi répondre à l’urgence du moment, à savoir le changement climatique. C’est ainsi que la ministre allemande de la Défense, Ursula von der Leyen, candidate issue du Parti populaire européen (PPE), s’est présentée mardi matin aux eurodéputés, appelés plus tard dans la journée, au moins par 374 voix, à lui donner leur feu vert pour accéder à la tête de la Commission européenne.
Il y a 40 ans, #SimoneVeil était la première femme élue présidente de @Europarl_EN. Si l'Europe était une femme, l'Europe serait Simone Veil. Interrogeons-nous aujourd'hui sur la façon dont nous pouvons perpétuer sa vision, celle d'une Europe unie et en paix. #EuropeIsAWoman
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) July 16, 2019
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Dans un discours de quarante-cinq minutes aux allures de politique générale, l’Allemande a semblé bien plus à l’aise et plus sûre d’elle que lors de ses premières apparitions la semaine dernière devant les différents groupes politiques. Et elle a pu fournir mardi matin un premier programme de travail un peu plus détaillé, bien qu’encore perfectible pour certains groupes.
C’est avec l’action contre le changement climatique que la ministre a d’abord voulu convaincre l’hémicycle, et plus spécifiquement le groupe des Verts, qui a annoncé ces derniers jours qu’il ne la soutiendrait pas, faute d’engagements concrets.
L’Europe neutre sur le plan carbone en 2050
Elle a ainsi promis, à travers une loi «climat» dans les 100 premiers jours de son mandat, de faire de l’Europe le premier continent neutre au niveau du carbone d’ici à 2050. Elle ira plus loin sur les objectifs de réduction des émissions de CO2 d’ici à 2030, poussant cette réduction à 50, voire à 55%, contre les 40% actuellement prévus. Une taxe carbone aux frontières sera également instaurée, a promis la candidate, et une partie de la Banque européenne d’investissement sera transformée en une banque pour le climat.
My proposal for Europe’s #sustainability: A Green Deal for Europe that includes a Biodiversity Strategy for 2030 and a New Circular Economy Action plan focusing on sustainable resource use. More in my political guidelines: https://t.co/som6zI0MhK
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) July 16, 2019
La ministre a aussi tenté de donner un ton résolument social à son programme: non seulement les violences contre les femmes seront inscrites dans la liste des crimes reprise par le Traité européen, mais la parité hommes/femmes dans sa Commission sera totale. Elle proposera un système de «réassurance chômage» à l’échelle européenne pour protéger les travailleurs des chocs externes. Et pour doper la mobilité des jeunes, elle reprendra l’idée du Parlement européen de tripler le budget Erasmus +.
Revoir la réforme de l’asile
Mais le social ne s’arrête pas à l’Union européenne et à ses habitants, a noté la candidate, promettant ainsi de tout faire pour remédier aux noyades de migrants en mer Méditerranée, plus de 17 000 personnes y ayant perdu la vie ces quatre dernières années, en renforçant la lutte contre les passeurs et en revoyant de fond en comble la législation européenne sur l’asile.
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Elle devrait ainsi relancer, sinon reprendre tout à zéro, la fameuse réforme dite «de Dublin» sur laquelle les Etats européens butent depuis 2016, partagés entre les pays du Sud comme l’Italie appelant à la solidarité des partenaires européens et les pays de l’Est de l’UE (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) résolument hostiles à accueillir davantage de migrants et demandeurs d’asile chez eux. Sans en dire davantage sur l’asile, elle a cependant été plus concrète sur les frontières extérieures de l’UE, en bonne représentante de la famille PPE: le nombre de gardes-frontières européens fixé à 10 000 à l’horizon 2027 sera déjà en vigueur en 2024.
Mais la ministre allemande n’a pas non plus oublié les mots pour séduire le Parlement européen, en lui annonçant également un droit d’initiative législative et un suivi sincère par la Commission de toutes les propositions qu’il pourrait soumettre.
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Bien consciente que les députés restent échaudés par le torpillage du système dit «des Spitzenkandidaten», le fameux système de tête de liste par parti européen qui avait fonctionné en 2014, Ursula von der Leyen a promis de rendre ce système de désignation plus visible et de lui donner une nouvelle assise, notamment au moyen des listes transnationales. Ces listes, qui n’ont pas pu voir le jour en 2019, avaient été l’un des arguments du président français, Emmanuel Macron, pour barrer la route à l’autre candidat allemand du PPE, le Bavarois Manfred Weber.
La ministre allemande a aussi joué de ses racines bruxelloises, étant née dans la capitale belge et y ayant appris l’Europe, «notre bien le plus précieux». Avec «moi, vous aurez une battante» pour renforcer l’Europe et «une opposante déterminée face à vous si vous voulez l’affaiblir», a-t-elle lancé aux députés.
Pas encore le plein de voix
Cela suffira-t-il pour passer la rampe? Mardi matin, la ministre allemande pouvait déjà compter sur ses troupes, les 182 élus du PPE: les libéraux, comptant 108 élus, la soutiendront logiquement aussi, ainsi qu’une partie des sociaux-démocrates, appelés par leur cheffe de file espagnole, Iratxe Garcia, à finalement approuver la candidate PPE. Mais l’Allemande n’y fera pas le plein, les socialistes belges et français ayant déjà annoncé faire défection.
Quant aux Verts? Ils ont jugé la prestation matinale d’Ursula von der Leyen «bien plus concrète» que la semaine dernière, a réagi le Belge Philippe Lamberts. Un «progrès» donc. Mais pas encore assez pour faire basculer les voix écologistes, le groupe des Verts l’ayant en effet encore jugée trop faible sur d’autres sujets, notamment sur la migration et la coopération entre l’UE et les garde-côtes libyens, sujet sur lequel la candidate n’a pas dit un mot.