Un quart des Italiens en quarantaine pour lutter contre le coronavirus
Confinement
Le gouvernement a décidé de fermer la Lombardie et 14 provinces du nord de l’Italie. Rome tente d’endiguer une diffusion de l’épidémie toujours plus rapide. En une seule journée, 133 personnes sont mortes

L’Italie se réveille paralysée. Depuis dimanche, plus d’un quart de la population italienne doit rester chez elle et ne peut se déplacer qu’à certaines conditions. Le gouvernement a décidé de fermer toute la Lombardie et 14 provinces du Piémont, de la Vénétie et de l’Emilie-Romagne. Ces mesures drastiques, aux limites du confinement, prises dans la nuit de samedi à dimanche visent à limiter la propagation rapide du coronavirus. Durant le week-end, le pays a enregistré près de 2500 nouveaux cas de contamination. Le dernier bilan de la protection civile, dimanche soir, se montait à 366 victimes, 6387 personnes infectées et 622 guéries.
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Les 10 millions de Lombards et les quelque 7 autres millions d’Italiens concernés ne sont pas obligés, mais invités à «éviter d’entrer et de sortir de ces territoires», ainsi que de s’abstenir de «circuler à l’intérieur de ces zones». Les personnes ne pouvant pas travailler à distance ou devant se déplacer pour des raisons de santé ne sont pas soumises à cette directive. Le texte recommande toutefois «fortement» à quiconque manifeste des symptômes de fièvre ou des problèmes respiratoires de rester chez soi, de limiter au maximum les contacts sociaux et d’appeler son médecin de famille. Enfin, la seule «interdiction absolue» de sortir de son habitation concerne les personnes contaminées par le coronavirus ne nécessitant pas une hospitalisation.
Notre carte de la propagation du virus:
Face à l'épidémie du #COVID2019, certains pays prennent des mesures drastiques. Retrouvez notre suivi de la journée https://t.co/CCsF9qo2ko pic.twitter.com/1gCLnIdH4s
— Le Temps (@letemps) February 28, 2020
Une diffusion plus rapide que prévu
Car ces nouvelles mesures extrêmes en vigueur jusqu’au 3 avril aspirent aussi à aider un système sanitaire au bord de la rupture. Depuis dimanche, en Lombardie seulement, 399 patients se trouvent en thérapie intensive. Il y a une semaine, la région la plus touchée espérait disposer de 250 lits pour ces cas les plus graves. Elle n’imaginait alors pas une diffusion du virus si rapide. Depuis lors, les autorités ont dédié des hôpitaux entiers à la gestion de l’épidémie, promis de rappeler des médecins à la retraite, d’avancer la remise de diplômes des infirmiers et, enfin, d’engager 20 000 opérateurs sanitaires. Le but est aussi de contenir les foyers épidémiques dans le nord de la Péninsule, le système sanitaire dans le sud étant plus fragile.
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Pour limiter le plus possible tout contact entre les citoyens, l’exécutif a également décidé d’annuler à travers tout le pays les manifestations publiques, de fermer tous les lieux de sociabilisation comme les musées, les cinémas, les théâtres, les pubs, mais aussi les piscines et les salles de sport notamment. Les restaurants, les bars et les commerces peuvent rester ouverts à condition que les clients maintiennent au moins un mètre de distance entre eux. Ces activités seront prohibées si elles ne respectent pas les directives gouvernementales.
«Mobilité réduite»
Mais l’application des mesures reste ambiguë. «Les forces de l’ordre sont légitimées à arrêter les citoyens pour leur demander pourquoi ils se déplacent», expliquait dans la nuit de samedi à dimanche le premier ministre, Giuseppe Conte, après avoir signé le décret. Mais, comme dans le cas des deux premières zones rouges dans le sud de la Lombardie et dans l’ouest de la Vénétie, fermées par des barrages de police il y a deux semaines, les contrevenants risquent-ils jusqu’à 3 mois de prison ou 206 euros d’amende? Aujourd’hui, il est «impropre de parler de zones rouges, tranche le président du Conseil, il n’est plus question d’interdiction absolue de déplacements mais de mobilité réduite».
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«Ces mesures nous imposeront des sacrifices, reconnaît Giuseppe Conte. Mais est arrivé le moment de la responsabilité: nous devons tous les respecter, non penser à être plus malins. Nous devons protéger notre santé, celle de nos proches et surtout celle de nos grands-parents, les plus exposés aux risques de ce nouveau virus.» Cet appel du premier ministre suit un samedi soir chaotique. En fin de journée, une ébauche du décret fuite dans les médias transalpins. A Milan par exemple, de nombreuses personnes se précipitent alors dans les gares pour quitter une région que l’on craint bientôt confinée. Dimanche matin, le scénario se répète dans les stations d’autobus. Les régions du sud décident par conséquent d’imposer la quarantaine aux voyageurs arrivant du nord, en contradiction avec les indications du gouvernement.
Rendre les directives plus claires
L’incertitude et la confusion continuent de régner toute la journée de dimanche, notamment concernant les déplacements. «Les marchandises peuvent voyager», rassure le président de la Lombardie, Attilio Fontana, qui aurait espéré des mesures encore plus «rigides». Son homologue vénitien est dans le même temps plus sceptique. «Pour être interprété, ce décret a besoin au minimum d’une circulaire explicative», regrette Luca Zaia. Le gouverneur considère comme «exagérée et inopportune» la décision de fermer trois provinces vénitiennes. L’exécutif continuait de travailler dimanche pour rendre ses directives plus claires et rassurer une population s’apprêtant à rester un mois confinée chez elle.