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Risque diminué de 80%
Sur le terrain, l’efficacité est aujourd’hui certaine. «La vaccination fonctionne», expliquait mardi devant la Chambre des communes Matt Hancock, le ministre de la Santé, avant d’égrener les statistiques. Le risque d’hospitalisation a baissé de 80% pour les personnes ayant reçu une dose de vaccin Pfizer-BioNTech, et de 85% pour celles ayant reçu une dose de vaccin Oxford-Astrazeneca. Désormais, le quart de la population britannique présente des anticorps, et ce nombre est plus élevé chez les personnes âgées, preuve qu’une immunité de groupe se rapproche. «Le programme de vaccination nous permet de dessiner notre route vers la liberté et de tourner la page de la pandémie», promet Matt Hancock. Objectif: que tous les adultes aient été vaccinés d’ici à fin juillet.
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Comment expliquer ce succès? Le Royaume-Uni a parié très tôt et très fort sur les vaccins. Dès le mois de mai 2020, alors que leur efficacité restait à prouver, le gouvernement britannique a passé des commandes, débloquant immédiatement des fonds permettant aux laboratoires de travailler. Il n’a pas fait dans la dentelle, ayant désormais ordonné la livraison de 400 millions de doses, de quoi potentiellement vacciner trois fois l’ensemble de la population. Il n’a pas non plus choisi entre les entreprises pharmaceutiques, faisant affaire avec Pfizer-BioNtech, Oxford-Astrazeneca, Moderna, GSK, Valneva… Les autorités britanniques ont aussi choisi de lever le risque judiciaire, prenant à leur compte la responsabilité légale en cas de poursuite judiciaire qui découlerait de la vaccination.
Accusations infondées
L’excellence britannique en termes de recherche pharmaceutique a fait le reste. Avant le Brexit, l’agence britannique de régulation du médicament et de la santé (MHRA) était l’un des piliers sur lequel s’appuyait l’agence du médicament européenne. Quand elle a été la première au monde à donner son feu vert à des vaccins, elle a été accusée à demi-mot par ses homologues américaine et européenne d’avoir bâclé son travail, mais ces dernières ont fini par suivre. Les données lui donnent aujourd’hui raison.
L’autre grand pari a été d’espacer les deux doses du vaccin de douze semaines, au lieu des trois ou quatre recommandées. La décision, prise début janvier face aux difficultés industrielles à produire assez d’injections, était délicate. Valait-il mieux vacciner un maximum de personnes le plus vite possible quitte à n’assurer qu’une protection réduite? Les résultats sur le terrain semblent aller dans le sens britannique. Un mois après une première dose, l’efficacité varie entre 61 et 73% suivant les vaccins, selon l’étude sur la population anglaise.
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Est-ce un succès rendu possible grâce au Brexit? En partie, certainement. Les règles européennes permettaient à chaque pays d’utiliser une clause d’exemption et de commander et autoriser le vaccin de leur côté. Mais aucun n’a osé le faire, à l’exception du Royaume-Uni, qui était encore dans le marché unique au moment des commandes et des autorisations l’an dernier. Mais selon Tony Blair, la sortie imminente de l’UE n’a pas été déterminante pour accélérer la cadence britannique: «Si nous étions restés dans l’Europe, nous n’aurions de toute manière pas laissé l’acquisition des vaccins être retirée des compétences nationales.»