Quand Vladimir Poutine reçoit à l'improviste Marine Le Pen
France/Russie
Bien qu'il s'en défende, Vladimir Poutine s'ingère dans la présidentielle française. Il n'avait jamais reçu ainsi de candidat juste avant une élection en Europe

Vladimir Poutine a reçu au Kremlin la candidate du Front national (FN) Marine Le Pen vendredi. Si celle-ci a pu rencontrer le président russe, c’est par la grâce de saint Louis, a suggéré le Kremlin peu après la rencontre. Donnant un aspect improvisé à une rencontre qui ne l’était très probablement pas, le porte-parole du président, Dmitri Peskov, a expliqué que la candidate avait souhaité visiter l’exposition Saint Louis et les reliques de la Sainte-Chapelle, qui se déroule actuellement au Palais du patriarche, un bâtiment situé dans le Kremlin. «Et à cette occasion, elle a été invitée au Kremlin par le président Poutine», a indiqué Dmitri Peskov.
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Marine Le Pen a été reçue par Vladimir Poutine
Le président russe, qui se veut le chef de file mondial du conservatisme, reçoit ainsi une candidate du même bord politique sur fond d’antiquités françaises. Cette touche culturelle sert aussi à donner du crédit à la justification apportée par Vladimir Poutine, quand il affirme: «En aucune manière, la Russie n’a l’intention d’influencer l'élection présidentielle en France.»
Le contraire est pourtant évident. Jamais encore le président russe n’avait reçu un candidat à une élection présidentielle en Europe moins d’un moins mois avant la tenue du scrutin. C’est aussi la première fois que Vladimir Poutine reçoit Marine Le Pen, qui a fait au moins deux fois le voyage à Moscou au cours des trois dernières années.
La candidate du FN se rendait à Moscou sur l’invitation du parlement russe. Vendredi matin, Marine Le Pen a rendu visite aux parlementaires russes. L’invitation venait formellement de Leonid Sloutsky, le chef adjoint du comité des affaires étrangères de la Douma. Une conférence de presse était annoncée à l’issue de cette rencontre, mais Marine Le Pen a esquivé les médias, sortant par une petite porte pour filer au Kremlin, où l’attendait celui par qui elle espérait depuis longtemps être reçue.
Avec le Président russe V. Poutine nous avons, entre autres, longuement évoqué la situation internationale et le terrorisme islamiste. MLP pic.twitter.com/sPWvM5yr8f
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) March 24, 2017
Intérêt pour les scrutins français
L’intérêt du président russe pour le scrutin français ne fait aucun doute. Il y a deux semaines, Vladimir Poutine avait déjà reçu Nicolas Sarkozy en visite privée. Il avait aussi fait part de sa sympathie pour François Fillon après la victoire de ce dernier aux primaires de la droite et du centre. Mais les déboires de ce dernier ont fait rebasculer le balancier en faveur de Marine le Pen. Cette dernière reçoit les faveurs des médias du Kremlin depuis quelques semaines.
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Selon le politologue Nikolaï Travkin, Marine Le Pen est «désormais présentée à la population russe comme le second personnage le plus important en Europe après [Angela] Merkel». La candidate du FN ne ménage pas ses efforts pour plaire au Kremlin en s’alignant entièrement sur les positions russes en matière de politique étrangère: pour elle, l’annexion de la Crimée est légale. Vendredi, elle a déclaré que «les services secrets russes et français doivent travailler ensemble contre le terrorisme». Elle a aussi promis de lever les sanctions contre la Russie si elle était élue.
Couverture négative de Macron
Les médias officiels suivent de près la présidentielle française et leur couverture est en ligne avec les intérêts affichés du Kremlin. Les candidats affichant une sympathie ou une proximité avec les positions de Vladimir Poutine (Jean-Luc Mélenchon, François Fillon et Marine Le Pen) reçoivent une couverture positive, tandis qu’Emmanuel Macron, jugé proche de l’administration actuelle et très pro-Union européenne, est présenté comme le candidat de la finance (c’est-à-dire de la Banque Rothschild). Les rumeurs sur son homosexualité supposée ont d’abord été diffusées par des médias russes, tout comme l’existence présumée d’informations compromettantes entre les mains de WikiLeaks, qui n’ont toujours pas été révélées.
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