Eveil à la sexualité: les remords de l'ancien éducateur Daniel Cohn-Bendit
ALLEMAGNE
Le héros de Mai 68 doit se justifier d'écrits évoquant ses flirts érotiques avec des enfants dans des crèches alternatives.
Bettina Röhl, la fille de l'ex-terroriste allemande Ulrike Meinhof, continue sa grande lessive. Après avoir exhumé des photos montrant l'ex-militant Joschka Fischer, entre-temps devenu ministre, tabasser un flic dans les années 70, elle s'attaque à un autre soixante-huitard assagi, Daniel Cohn-Bendit. Elle a mis sur son site Internet des textes que «Dany le Rouge» publia en 1976 dans la revue Das da alors dirigée par Klaus Reiner Röhl, le père de la jeune femme. Daniel Cohn-Bendit, qui travailla deux ans comme éducateur, y raconte sa confrontation avec l'éveil des enfants à la sexualité. Des passages perçus comme choquants contraignent aujourd'hui le député écologiste au Parlement européen à s'expliquer.
Bild s'est permis de titrer au canon: «Un écologiste raconte le sexe au jardin d'enfants». Daniel Cohn-Bendit, prétendait le quotidien de boulevard, a caressé des enfants, se réjouissant qu'après Joschka Fischer, un autre Vert au passé libertaire soit «à son tour rattrapé par son passé». La presse allemande a peu repris. Dans différents journaux étrangers (Observer, The Independent, La Stampa, Die Presse et L'Express dans son édition à paraître ce jeudi), le politicien a exprimé ses remords.
«Composante érotique»
Les textes controversés sont extraits du livre Le grand bazar que Daniel Cohn-Bendit publia en 1976. Dans un mélange d'autobiographie et de fiction, il raconte son enfance et les années 60. Dans un chapitre consacré à l'éducation des enfants, il décrit l'attirance sexuelle que des petits enfants avaient pour lui alors qu'il travaillait comme éducateur dans une crèche «anti-autoritaire» à Francfort en 1972 et 1973. «Mes flirts avec les petits avaient une composante érotique», écrivait-il alors. Il disait comment «les filles, entre 2 et 5 ans, avaient vite appris à le séduire». Et comment des enfants jouaient à ouvrir la braguette de son pantalon, cherchant à toucher son sexe.
Le politicien, qui vit à Francfort avec sa famille, fait aujourd'hui savoir qu'il n'a jamais abusé d'un enfant. Les passages contestés sont largement le produit de son imagination. Ils étaient pensés comme une «provocation verbale». Un acte politique, déjà… Il s'agissait de briser des tabous de la société bourgeoise qui répugnait à reconnaître l'éveil des petits à la sexualité. «Jamais je n'écrirais la même chose vingt-cinq ans plus tard», concède l'eurodéputé vert, horrifié par la «naïveté» de sa prose. Les passages incriminés lui semblent «déplacés» dans une société devenue hypersensible à la menace pédophile.