Ils n'auront été que six à dire non. Hormis ces rares parlementaires dissidents, tous de gauche, tous les autres députés français ont approuvé jeudi le projet de loi prorogeant pour trois mois l'état d'urgence décrété initialement pour douze jours le 13 novembre par François Hollande.

Venu défendre ce texte, le premier ministre Manuel Valls a insisté sur le caractère inédit de la menace terroriste et sur ses dimensions multiples, allant jusqu'à évoquer le risque d'une attaque «chimique» contre l'Hexagone.

Une fois approuvé ce vendredi par les sénateurs, le texte permettra d'installer la France dans l'Etat d'urgence jusqu'au 26 février prochain. D'ici là, un autre texte sera proposé au parlement, visant à réviser la constitution pour proposer la création d'un «régime constitutionnel d'état de crise» afin de faire face à ce type d'épreuve, sans pour autant transférer les pouvoirs civils aux autorités militaires, seul cas prévu actuellement par la notion «d'état de siège». Il lui faudra, pour être adopté, recueillir les voix des 3/5ème des parlementaires ou être approuvé par référendum.

Bloquer des sites internet ou réseaux sociaux

Concrètement, l'état d'urgence donne surtout une beaucoup plus grande latitude aux forces de police. Les perquisitions administratives (sans demande de la justice) sont facilitées, sauf pour les bureaux et résidences des avocats, des parlementaires ou des journalistes.

Si la version amendée par les députés est adoptée telle quelle par le Sénat, le gouvernement pourra aussi «prendre toute mesure pour assurer l'interruption de tout service de communication au public en ligne provoquant à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie», ce qui lui permettra de bloquer des sites internet ou réseaux sociaux incriminés. Les associations «prêchant la haine» pourront aussi être dissoutes comme l’a promis Manuel Valls. Lequel a, par ailleurs annoncé la création prochaine d’une «structure d'accueil et de réinsertion pour jeunes radicalisés», sans en donner les contours.

Possibilité d’assigner à résidence

La seconde arme donnée aux policiers par ces mesures d'exception est la possibilité d'assigner à résidence, pour la durée de l'état d'urgence, des personnes dont le comportement constituerait «une menace pour la sécurité et l'ordre public» et non une «atteinte à la sureté de l'Etat». Suite à un amendement déposé par l'opposition de droite, le port du bracelet électronique pourra être imposé aux intéressés, et il pourra leur être interdit de rencontrer des personnes ayant fait l'objet d'un signalement problématique. On se souvient que les trois terroristes responsables des attentats de janvier avaient rencontré en 2010, dans le Cantal, l'islamiste franco-algérien Djamel Beghal, alors en résidence surveillée en Auvergne.