Cette attaque a lieu alors que les sociaux-démocrates sont en difficulté à mi-mandat dans la grande coalition qu'ils forment depuis la fin 2005 avec les unions chrétiennes (CDU-CSU) sous la direction de la chancelière Angela Merkel (CDU).
Cet été, le SPD a bien tenté de se démarquer par rapport à son partenaire chrétien-démocrate en demandant la fin de la conscription ou la relance d'une procédure d'interdiction du parti néonazi NPD. En vain. Les sondages restent désespérément médiocres: la dernière enquête d'opinion publiée par le magazine Stern confirme l'avance de la CDU-CSU avec 38% d'intentions de vote contre 26% pour le SPD. Leur président Kurt Beck, ministre-président du Rhénanie-Palatinat, reste impopulaire aux yeux des Allemands. Si l'élection du chancelier avait lieu au suffrage direct, il aurait selon les sondages 15% des voix contre 57% pour Angela Merkel. Les conflits grondent en interne, même si, selon Richard Stöss, politologue à l'Université libre de Berlin, Kurt Beck «intègre pourtant parfaitement les différents courants au sein du parti».
Kurt Beck est directement visé par les «pragmatiques» du SPD, qui prennent leurs distances par rapport aux orientations qu'il a données. Sous sa houlette, la commission chargée de rédiger un nouveau programme avait pris soin de se démarquer de certains principes sociaux libéraux prônés par Gerhard Schröder pour apaiser l'aile gauche du parti très remontée contre les réformes de l'agenda 2010. L'esquisse du nouveau programme présenté en janvier 2007 a retenu le principe d'un «état social prévoyant». De même, le président du SPD a remis à l'honneur les thèmes de la justice sociale en faisant de l'instauration d'un salaire minimum une priorité. Les syndicats ont apprécié ce discours, mais cela n'a pas empêché le nouveau parti de la gauche (Die Linke), créé en juin sous la houlette d'Oskar Lafontaine, ancien président du SPD, et Gregor Gysi, ex-patron des néocommunistes de l'ex-RDA, de recruter dans les rangs de la social-démocratie.
Aussi, la publication de l'ouvrage des «pragmatiques» devrait-elle susciter des débats enflammés au SPD. «Les représentants de l'aile pragmatique espèrent pouvoir influencer la formulation du nouveau programme à leur avantage», analyse Richard Stöss.
Pas d'esprit de complot
Sans surprise, les auteurs du projet se défendent d'avoir agi dans un esprit de complot. «Ce livre n'est fait contre personne», a assuré Peer Steinbrück. En réalité, notent les commentateurs, ce dernier et Frank-Walter Steinmeier doivent être élus vice-président du parti fin octobre et sont souvent cités comme d'éventuels candidats à la Chancellerie en 2009. Populaire dans sa région, Kurt Beck n'est pas parvenu à trouver sa marque à l'échelon fédéral. Et il se garde de dévoiler ses intentions pour la course à la Chancellerie pour 2009.