L’accès en Chine, via Google, à des sites internet couvrant des sujets sensibles restait bloqué mardi matin, au lendemain de l’annonce par le moteur de recherche américain qu’il cessait la censure et redirigeait ses visiteurs vers son site de Hongkong.

Les tentatives de connection à google.cn, version chinoise du moteur américain, aboutissaient automatiquement à google.com.hk.

Toutefois, une recherche des sites ayant trait à Falungong, mouvement spirituel interdit en Chine, aboutissait à une page blanche annonçant «Internet explorer ne peut pas afficher cette page». Ce blocage semble indiquer que le système pare-feu érigé par les autorités chinoises est en mesure de filtrer toutes les recherches faites en Chine, en dépit de la décision de Google.

L’exception de Hong-Kong Le géant du web a annoncé lundi à Washington qu’il cessait de censurer son moteur de recherche chinois et que les internautes s’y rendant étaient désormais redirigés vers celui de Hong Kong.

Hong Kong, ancienne colonie britannique, est une région administrative spéciale chinoise qui jouit de davantages de libertés, selon le principe «un pays deux systèmes» convenu lors de la rétrocession en 1997.

Toutefois, les autorités chinoises semblent avoir les moyens de continuer à bloquer l’accès aux sites sensibles pour les quelque 400 millions d’internautes du continent.

Pas d’accès Les connections demandées à google.cn, version chinoise du moteur américain, aboutissaient bien automatiquement à google.com.hk mardi mais il était impossible d’accéder aux sites jugés sensibles par Pékin, comme ceux ayant trait au mouvement démocratique de 1989, réprimé dans le sang, ou au mouvement spirituel falungong interdit (hors sites donnant le point de vue officiel). Cela est le cas notamment pour des sites d’organisations considérées par les autorités chinoises comme hostiles au pays, tels le journal Epoch Times ou les groupes soutenant le Mouvement du 4 juin 1989 pour la Démocratie.

Même quand une liste de sites est parfois fournie, il est impossible d’accéder à la page et la réponse «site indisponible» s’affiche. Le site de partages de vidéos Youtube ou la plateforme de microblog Twitter étaient pour leur part inaccessibles depuis Pékin, en dépit du reroutage sur Hong Kong.

En annonçant la fin de la censure sur son site chinois mais pas la fin de ses opérations en Chine, Google s’est attiré les foudres des autorités.

«Google a violé une promesse écrite qu’il avait faite en arrivant sur le marché chinois en arrêtant de filtrer son moteur de recherche et en insinuant que la Chine est derrière des attaques de pirates informatiques», a déclaré dans la nuit un responsable de l’internet au bureau d’Etat pour l’Information.

Pékin minimise

Pour autant, Pékin a estimé mardi que la décision de Google de ne plus se plier à la censure en Chine n’aurait pas d’influence sur les relations sino-américaines à moins qu’il n’existe une volonté de «politiser» le dossier. «Je ne pense pas que cela influencera les relations sino-américaines sauf si certains veulent politiser», a déclaré à la presse le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Qin Gang.

Ce dernier a jugé que la décision de Google était «un dossier commercial particulier», réaffirmant que la Chine gérait l’internet conformément à ses lois.

Les dissensions publiques entre Google et les autorités chinoises remontent à janvier quand Google a décidé de dénoncer les contraintes d’auto-censure imposées par la Chine mais aussi des cyberattaques massives dont il a été victime, selon lui venues de Chine.

«Business as usual»

Mardi était un jour «habituel» au siège pékinois de Google, selon une responsable, malgré la présence d’une troupe de journalistes devant les locaux, quelques heures après que le moteur américain eut annoncé qu’il ne se pliait plus à la censure chinoise. «Tout ce que je peux dire c’est que les affaires continuent comme d’habitude», a affirmé par téléphone à l’AFP Marsha Wang, porte-parole de Google Chine.

«Nous entendons continuer le travail de recherche et développement en Chine et maintenir une présence commerciale, bien que la taille de l’équipe commerciale dépendra évidemment de la capacité des utilisateurs du continent à accéder à google.com.hk», a expliqué sur le blog officiel de Google le directeur juridique de l’entreprise David Drummond.

Marsha Wang a indiqué n’avoir aucune information sur de possibles licenciements ou déplacements de personnels vers Hong Kong, répétant que des «ajustements» seraient faits selon la tournure des événements.

Des dizaines de journalistes s’étaient rassemblés devant les locaux de l’entreprise américaine à Pékin sans pouvoir y accéder.