Les conservateurs de David Cameron ont remporté les élections législatives au Royaume-Uni pour la première fois depuis 1992, mais faute de majorité absolue, les clefs du pouvoir pourraient rester entre les mains des travaillistes de Gordon Brown par le biais d’une coalition.

Selon les résultats officiels publiés dans 610 des 650 circonscriptions vers 08H10 GMT, le parti conservateur comptait 288 députés (36,2% des suffrages), devant le parti travailliste au pouvoir depuis 1997 qui obtenait 244 sièges (29,1%) à la chambre basse du parlement de Westminster.

Avec 44 députés de plus que le Labour pour seulement 40 sièges encore à dépouiller, il s’agit de la première victoire électorale des conservateurs depuis 1992. Et le pire score du Labour en termes de suffrages depuis 1983.

Déception des Libéraux démocrates

Le parti libéral démocrate pointait en troisième position avec 51 sièges (22,9% des suffrages), échouant à transformer en sièges la soudaine popularité que leur chef Nick Clegg avait connue à la faveur des débats télévisés de la campagne.

Les résultats complets ne devaient être connus qu’en fin d’après-midi vendredi.

Reste que les travaillistes ont clairement fait savoir qu’ils avaient l’intention de tenter de se maintenir au pouvoir, de préférence par le biais d’une coalition avec les libéraux-démocrates. La perspective a immédiatement déclenché l’ire des conservateurs.

«Le gouvernement Labour n’a plus l’autorité pour gouverner notre pays», a estimé dans la nuit le chef de file tory, David Cameron.

L’absence de majorité absolue aboutit au premier parlement «suspendu» (hung parliament) depuis 1974 et devrait déboucher sur des tractations longues et ardues avec les libéraux-démocrates.

«La nuit a de toute évidence été décevante pour les libéraux démocrates. Nous n’avons tout simplement pas accompli ce que nous espérions», a déclaré Nick Clegg dans sa circonscription de Sheffield où il a été réélu. «Je ne pense pas que quiconque devrait se précipiter à faire des déclarations ou à prendre des décisions qui ne résisteront pas au test du temps», a-t-il ajouté, en réponse aux questions sur les perspectives d’un gouvernement de coalition. Cet avertissement, a-t-il dit «s’adresse à tous les partis».

Les conventions, en l’absence de Constitution écrite, veulent que le Premier ministre sortant, en l’occurrence Gordon Brown, tente en premier de former un gouvernement, sauf s’il estime ne pas pouvoir y parvenir et démissionne.

Selon un sondage sortie des urnes diffusé à la clôture du scrutin jeudi à 21H00 GMT, le Labour devrait obtenir in fine 255 sièges et les Lib Dems 61 députés. En collaborant, ils obtiendraient 316 sièges, contre les 305 attendus pour les Tories, mais toujours pas de majorité absolue.

Avec les travaillistes, mais pas Gordon Brown

M. Clegg avait suggéré pendant la campagne qu’il pourrait accepter de travailler avec le Labour, mais aurait du mal à collaborer avec M. Brown. Plusieurs ministres travaillistes ont rapidement laissé entendre au fil du dépouillement qu’ils étaient prêts à discuter avec les Lib Dems. «Evidemment, nous serions prêts à considérer cela», a indiqué Peter Mandelson, n°2 du gouvernement.

Réélu dans sa circonscription écossaise, M. Brown a refusé de concéder la défaite et affirmé être prêt à «jouer (son) rôle pour que la Grande-Bretagne ait un gouvernement fort et stable». Vendredi matin, il a regagné sans mot dire ses bureaux du 10, Downing Street.

Pour lui succéder, M. Cameron devrait s’entendre avec les Lib Dems ou avec des petits partis, ou encore former un gouvernement minoritaire.

Le scrutin a connu une forte participation mais a été émaillé d’anomalies: la commission électorale a annoncé une «enquête approfondie» alors que des centaines d’électeurs n’ont pu voter en raison de longues files d’attente.