Incertitude politique
Portugal
La démission du ministre des Finances et de celui des Affaires étrangères met en péril la majorité gouvernementale du premier ministre Pedro Passos Coelho
Invité par le Centre international des études monétaires et bancaires de Genève en juin 2012, Vitor Gaspar, ministre portugais des Finances, avait expliqué avec force conviction tout le bien qu’il pensait de la stratégie mise en place dans son pays pour sortir de la crise. Il a donné, lundi soir, sa démission en reconnaissant qu’elle avait aggravé la crise et renforcé le mécontentement social. Il s’agissait d’un programme de rigueur économique mis en place avec l’aide de la troïka (Commission européenne, Fonds monétaire international et Banque centrale européenne) en mai 2011 en échange d’une aide de 78 milliards d’euros.
En récession depuis deux ans, l’économie portugaise devrait encore reculer cette année de 2,3%. Le chômage a atteint le taux record de 18,2% alors que, chez les jeunes, il dépasse les 40%. Le pays vit régulièrement des grèves à répétition.
La démission de Vitor Gaspar, numéro deux du régime, a plongé le Portugal dans une grave crise politique. Il y va de la survie même du gouvernement de centre droit, en place depuis 2011. Ce premier départ a été suivi mardi par celui de Paulo Portas, ministre des Affaires étrangères et chef du Parti populaire, petite formation conservatrice, mais partenaire indispensable à la majorité au pouvoir.
Dans sa lettre de démission, le chef de la diplomatie portugaise conteste le choix du premier ministre, Pedro Passos Coelho, de remplacer Vitor Gaspar par son adjointe Maria Luis Albuquerque. Celle-ci devait prendre ses nouvelles fonctions hier déjà. Paulo Portas, qui avait à maintes reprises mis en cause la politique d’austérité, a interprété cette nomination comme une volonté de poursuivre la politique de rigueur. Il a lui-même été chargé de présenter, au plus tard le 15 juillet, un plan d’économies de 4,7 milliards d’euros d’ici à 2014. Il y a été très réticent, craignant de cristalliser la colère de l’électorat contre sa personne. Il avait aussi menacé récemment de rompre la coalition si le gouvernement allait de l’avant avec un projet d’augmenter les impôts des retraités.
Nouveau cap
Paulo Portas a encore affirmé hier que son parti quittait la coalition gouvernementale, mettant le Parti social-démocrate du premier ministre Pedro Passos Coelho de facto en minorité. Lors d’une allocution télévisée, le chef du gouvernement a refusé la démission de son ministre des Affaires étrangères et appelé au dialogue.
Les appels à l’organisation d’élections législatives ont fusé dès hier, même si le Parti socialiste, principale force d’opposition, demande de retourner aux urnes depuis plusieurs mois. Son chef, Antonio José Seguro, devrait être reçu cet après-midi par le président Anibal Cavaco Silva pour discuter de la suite des événements. «Le PS défend la convocation d’élections pour que le pays prenne un nouveau cap», a-t-il déclaré hier.
«Le gouvernement est mort, il ne reste plus qu’à définir la date des funérailles», a renchéri le Bloc de gauche. Le Parti communiste réclame la démission de l’ensemble du gouvernement. Selon une dépêche de l’AFP, les derniers sondages donnent au PS un net avantage sur le PSD, sans toutefois lui accorder la majorité absolue.