Le président israélien Isaac Herzog a présenté, mercredi soir, une ébauche de compromis sur le projet de réforme judiciaire qui divise le pays, mais le gouvernement y a opposé immédiatement une fin de non-recevoir.

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Depuis l'annonce du projet de réforme début janvier par l'un des gouvernements les plus à droite de l'histoire d'Israël, des manifestations massives ont lieu toutes les semaines dans le pays, pour dénoncer ce que ses détracteurs qualifient de dérive antidémocratique. Une nouvelle journée de mobilisation des opposants est annoncée pour jeudi, après de nouvelles manifestations mercredi.

Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et ses alliés estiment la réforme nécessaire pour rétablir un rapport de force équilibré entre les élus et la Cour suprême, qu'ils jugent politisée.

Le «compromis du peuple»

Isaac Herzog, qui joue un rôle essentiellement protocolaire, a annoncé lors d'une intervention télévisée avoir parlé avec des personnalités de la majorité et de l'opposition pour rédiger cette proposition de compromis. Ce texte qualifié par le président de «compromis du peuple» propose notamment des changements sur les points les plus controversés de la réforme annoncée par la coalition au pouvoir.

Mardi, les députés ont adopté en première lecture un des textes de loi de la réforme durcissant les conditions permettant à la Cour suprême d'invalider une loi ordinaire et permettant au parlement de prémunir une loi contre toute annulation par un processus législatif ne nécessitant qu'une majorité simple (61 députés sur 120).

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Un compromis qui ne fait pas l'unanimité

«Celui qui pense qu'une guerre civile est impossible n'a pas idée à quel point nous en sommes proches mais je ne laisserai pas faire», a déclaré Isaac Herzog, ajoutant être convaincu que «la majorité des Israéliens veulent un compromis». Le compromis proposé «doit servir de base de négociation et remplacer le projet actuel», a dit Isaac Herzog, qui ne cache pas son opposition au projet du gouvernement.

«En ce qui concerne le compromis du président, je pense que toute tentative de parvenir à un accord et à un dialogue est certainement bienvenue», a déclaré à la presse Benjamin Netanyahu. «Mais ce que le président propose n'a pas été accepté par les représentants de la coalition au pouvoir. Des points clefs de son programme ne font que perpétuer la situation existante et n'apportent pas l'équilibre requis entre les pouvoirs.»

Dans un tweet lapidaire, Yossi Fuchs, secrétaire du gouvernement a qualifié l'initiative présidentielle de «compromis unilatéral».

Le chef de l'opposition Yaïr Lapid a salué au contraire sur Twitter la proposition du président et annoncé vouloir «faire tous les efforts [nécessaires] pour éviter l'effritement économique, sécuritaire et social qui nuit gravement à l'unité nationale».

Empêcher la Cour suprême d'invalider une loi fondamentale

La proposition présidentielle survient deux jours après la présentation au parlement d'un compromis rédigé par un ancien ministre de la Justice, un directeur d'université et un professeur de droit, que le président de cette Commission, Simcha Rothman, avait jugé pouvoir constituer «une base pour des négociations».

Le projet d'Isaac Herzog conserve l'idée du gouvernement d'empêcher la Cour suprême d'invalider une loi fondamentale, mais contrairement au projet en cours d'examen au parlement, propose que la Cour puisse continuer, sous certaines conditions, de retoquer un amendement à ces lois qui font office de Constitution en Israël.

Aux termes du projet présidentiel, la Cour pourrait retoquer une loi ordinaire à condition que se détache une majorité de huit juges sur un quorum de onze quand le projet gouvernemental exige pour cela l'unanimité des quinze juges de la Cour.

Isaac Herzog propose également que toute nouvelle loi fondamentale soit adoptée à l'issue de quatre lectures, et avec une majorité qualifiée de 80 députés (sur 120) lors du quatrième vote, et non en trois lectures et à la majorité simple, comme c'est le cas actuellement.