La Palestine a fait sa demande d’adhésion à la Cour pénale internationale
Des militaires israéliens ayant opéré dans la bande de Gaza dans le cadre de l’opération «Bordure protectrice» de l’été 2014 seront bientôt jugés. Et leur procès s’annonce retentissant. En effet, en réponse aux nombreuses critiques qui visaient alors l’état-major de l’armée, l’avocat général militaire Danny Efroni a annoncé le 10 septembre 2014 l’ouverture d’une enquête sur les événements qui venaient de se dérouler dans le territoire palestinien. Cette initiative avait deux objectifs. D’abord calmer la communauté internationale, mais surtout couper l’herbe sous le pied de l’Autorité palestinienne (AP), qui menaçait déjà de demander son adhésion à la Cour pénale internationale (CPI) afin d’y entamer des poursuites pour «crime de guerre» contre l’Etat hébreu.
Depuis quatre mois, les ONG internationales opérant dans l’enclave palestinienne ont en tout cas transmis une centaine de dossiers à la justice militaire israélienne mais quelque 80 d’entre eux ont été classés sans suite. A titre d’exemple, les juristes de Tsahal ont considéré que des femmes tuées durant le bombardement d’un immeuble de Beit Lahia (nord de Gaza) n’ont pas été victimes d’une bavure puisque le bâtiment abritait un dépôt d’armes du Hamas et que les victimes y ont pénétré après qu’une reconnaissance photographique eut été effectuée par un drone.
Cependant, plusieurs affaires donnent lieu à des investigations plus poussées menées par l’Unité d’investigations de la police militaire (Matsah). L’une d’entre elles se rapporte au tir, le 31 juillet 2014, d’un obus de char sur une école de l’Unwra (ONU) qui abritait des centaines de civils aux abois.
Mais le dossier le plus grave concerne les violences survenues le 1er août 2014, le fameux «vendredi noir» au cours duquel l’artillerie israélienne a bombardé sans interruption la banlieue de Rafah (sud de Gaza) après avoir découvert que le corps d’Hadar Goldin, un soldat d’une unité d’élite, venait d’être enlevé par un commando du Hamas.
Selon le «Protocole Hannibal», une instruction opérationnelle élaborée en 1986 et gardée secrète jusqu’en 2003, l’armée israélienne est autorisée à employer des moyens plus violents pour empêcher l’enlèvement de ses soldats. La directive prévoit donc qu’un déluge de feu doit s’abattre sur la zone incriminée afin de bloquer les ravisseurs et leur otage sur place. Peu importe d’ailleurs que ce dernier soit tué: l’important, c’est qu’il ne puisse pas être utilisé ensuite comme monnaie d’échange.
Les deux concepteurs du Protocole Hannibal ont poursuivi une belle carrière depuis 1986. Le général Yossi Peled, un Belge d’origine aujourd’hui septuagénaire, est devenu ministre dans le gouvernement de Benyamin Netanyahou avant de tenter sa chance dans le secteur privé. Quant à son adjoint Gaby Ashkenazi, il a été promu chef de l’état-major. Une fonction qu’il a remplie jusqu’à sa retraite en février 2011.
Quoi qu’il en soit, suite à l’application du Protocole Hannibal le 1er août 2014, au moins 70 Gazaouis ont été tués. Des centaines d’autres ont également été blessés durant cette journée qui passe pour la plus violente de l’opération «Bordure protectrice». Car outre les batteries d’artillerie et les chars qui tapissaient la zone d’obus, les hélicoptères et les drones d’attaque patrouillaient dans le ciel. Au sol, les soldats israéliens à cran tiraient indistinctement sur tout ce qui bougeait.
Grâce à l’enregistrement des conversations radio des membres en opération du bataillon d’élite Givati, la Matsah a pu identifier les auteurs de la mort d’au moins 50 civils palestiniens. Des innocents abattus dans la rue ou sur les toits, alors qu’ils tentaient de fuir.
Le 31 décembre, faisant fi de la censure militaire, des médias israéliens ont diffusé une partie de ces conversations sur leur site internet ainsi que dans leur édition écrite. Elles mettent directement en cause deux lieutenants-colonels et un commandant qui risquent de se retrouver sur le banc des accusés d’ici à la fin de l’année.
U Le représentant palestinien auprès de l’ONU, Riyad Mansour, a présenté vendredi aux Nations unies la lettre officielle de demande d’adhésion de la Palestine à la Cour pénale internationale (CPI), qui pourrait permettre de poursuivre des dirigeants israéliens. Par ailleurs, un Palestinien a été tué hier dans le sud de la Bande de Gaza par des tirs de l’armée égyptienne de l’autre côté de la frontière. (AFP)
Le 1er août 2014 a été la journée la plus meurtrière: au moins 70 Gazaouis tués