«Nous ne sommes pas comme eux Monsieur le Président!». C’est le tabloïd britannique The Sun qui le dit. Avec force photos en couverture: celle, très officielle, de Barack et Michelle Obama entourant la reine Elizabeth II, tout de rose vêtue, à Buckingham Palace. Et celle, prise dans le centre de Londres, des manifestants cagoulés en train de caillasser les policiers casqués. Bilan: un mort lors des protestations. Mais surtout, dans les pages des journaux, un étalage de clichés et de commentaires sur les dessous de la visite historique des locataires de la Maison-Blanche. L’heure n’est ni aux larmes, ni au deuil alors que le G20, et sa cohorte de débats difficiles, s’est ouvert ce jeudi matin au centre de congrès ExCel, dans la banlieue Est de Londres.

Pas question de se tromper de priorité, semble dire la presse londonienne après avoir suivi pas à pas Barack Obama. La première était de montrer au président américain que le Royaume-Uni reste son allié européen le plus proche. Et vice-versa. Ce qui a été fait, à en croire le quotidien The Guardian. «Gordon» et «Barack» ont parlé, se sont compris, et ont forgé une «alliance forte», même si «l’ombre de 1776 pesait un peu» sur Downing Street. Car la presse britannique le reconnaît bien volontiers: «Barack Obama n’est ni George Bush père, ni Ronald Reagan». L’homme le plus puissant du monde, autrement dit, à tout à apprendre sur le royaume de sa très gracieuse Majesté.

L’autre priorité, évidemment, c’est l’économie mondiale. Et là, la presse a déjà trouvé les coupables en cas d’échec. Enfin presque. La question «Un accord ou pas d’accord» posée en une par The Independent est ainsi assortie de quatre éloquentes photos: celles de Gordon Brown, Barack Obama, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Deux contre deux. Le Financial Times, naturellement, revient sur ce fossé qui semble se dessiner. «La tâche du G20 est herculéenne» prévient Gilian Tett, la spécialiste Finances du quotidien des affaires qui vient d’être élue journaliste de l’année. Et puis Nicolas Sarkozy a lui-même mis la pression en menaçant de quitter le sommet si la volonté de réforme s’enlise. Alors? La presse anglaise ricane. «On sait que Carla Bruni-Sarkozy a préféré ne pas venir à Londres cette fois, pour ne pas se faire voler la vedette par Michelle Obama» écrit le Daily Telegraph. Quand à Angela Merkel, pas de doute, elle fait bien partie d’un «camp»: «L’offensive rivale» commente The Guardian, en dessous d’un cliché montrant le président français et la chancelière allemande arrivant mercredi après midi à leur conférence de presse commune.

Mais passons au reste. C’est-à-dire au plus important. Au plus croustillant. Au plus «significatif» pour The Sun. D’abord les cadeaux: une belle batte de base-ball «made in USA» et dûment signée par Barack Obama pour John Brown, le fils du premier ministre britannique âgé de 5 ans. Et surtout, un iPod «customisé» pour la reine Elizabeth, contenant la vidéo de sa dernière visite aux Etats-Unis. Leurs très gracieuses majestés ont fait plus sobre: une photo dédicacée. On continue? David Cameron, le leader Tory, chef de l’opposition, a profité de ses trente minutes d’entretien avec Barack Obama pour lui remettre un volume de Shakespeare. Avant de repartir, pas très content de cette courte entrevue dit-on, avec un bracelet pour sa femme signée d’un bijoutier américain connu.

Et comme tout se termine toujours par un dîner, celui de mercredi soir, à Downing Street, fait les grands titres des journaux. Le «Guardian» en détaille le plan de table. Où l’on voit qu’Angela Merkel était bien mieux placée que Nicolas Sarkozy, à la droite de Barack Obama. A charge pour le président français, en face, de converser avec ses homologues sud-africain Kgalema Motlanthe et chinois Hu Jintao. Le menu? «Typiquement anglais» se félicite la presse. Saumon des îles Shetland, sélection de légumes du Surrey et du Kent, agneau de la vallée d’Elwy, nord du pays de Galles, avec une sauce à la menthe sur les pommes de terre Royal Jersey. Le plus fameux des chefs anglais, Jamie Olivier, cuisinait, lui, pour les premières dames, qui dînaient dans une autre salle.

Prêts donc, pour le G20? «Ca va chauffer» prévient The Guardian qui promet de tenir ses lecteurs informés de «chaque clash, chaque communiqué et chaque petit-four». Car ce sommet économique mondial est une grand-messe. Avec, aussi, ses gaffes, rapporte The Independent, qui titre «Honte à Philip», époux de la reine et tête de turc préférée des journalistes: «Vous faites comment pour les distinguer?» aurait-il demandé à Barack Obama, qui lui faisait la liste de ses rencontres prévues avec plusieurs chefs d’Etat, avant d’y aller de son commentaire savoureux: «En fait, vous essayez juste de rester éveillé». Ce qui, pour parler de croissance économique, de paradis fiscaux et de régulation mondiale, est plutôt recommandé.