Selon la formule consacrée, le Kosovo représente le «berceau» de la Serbie. La dynastie médiévale serbe des Nemanjic, qui apparaît à la fin du XIIe siècle, est d'abord ancrée en Raska, une petite région située au nord-ouest du Kosovo. Très vite, cette dynastie étend ses possessions au Kosovo, où elle multiplie les fondations d'églises et de monastères.

La bataille de Kosovo Polje, en 1389, marque l'effondrement de l'Etat serbe face à la poussée ottomane. Durant les siècles d'occupation ottomane, le Kosovo est habité par des populations parlant différentes langues et pratiquant différentes religions. Le phénomène de conversion à l'islam a été plus tardif qu'en Bosnie. La définition des identités nationales a également été un phénomène lent et progressif. Contrairement aux assertions nationalistes des uns et des autres, il est bien difficile de savoir qui était Serbe et qui était Albanais dans le Kosovo du XVIIIe ou du XIXe siècle.

L'Etat serbe, qui recouvre l'indépendance à partir de 1830, va engager, avec le soutien de l'Eglise, une survalorisation idéologique du Kosovo, «cœur de la Serbie». Le Kosovo occupe également une place majeure dans l'émergence du nationalisme albanais, puisque les premières revendications nationales sont formulées en 1878 par la Ligue de Prizren, une réunion de notables représentant les différentes régions albanaises de l'Empire ottoman.

Lorsque le Kosovo revient dans le giron de la Serbie, après la guerre balkanique de 1912, la majorité de sa population est déjà albanaise. Après la Première Guerre mondiale, le gouvernement de Belgrade va essayer, mais en vain, de modifier cette situation démographique, en poussant les Albanais au départ vers la Turquie et en favorisant l'arrivée de colons serbes.

A partir de 1945, le Kosovo dispose d'un statut de province autonome au sein de la République fédérée de Serbie. Cette autonomie est élargie, surtout après les changements constitutionnels de 1974, qui ouvrent un «âge d'or» du Kosovo. Les Serbes locaux dénoncent pourtant la captation du pouvoir par les dirigeants communistes albanais. L'émigration des Serbes vers la Serbie s'est poursuivie tout au long du XXe siècle: les premiers à quitter un Kosovo pauvre et sous-développé ont toujours été issus des couches les plus riches et les plus éduquées.

Depuis 1999, la présence serbe se réduit à 100000 personnes, terrées dans le secteur nord et une poignée d'enclaves. Si le Kosovo devient indépendant, un nouvel exode paraît inéluctable, et la présence serbe risque fort de se limiter à des «réserves d'Indiens» gardées par des troupes internationales. Resteront les monastères qui n'auront pas été détruits, derniers témoins d'un passé glorieux.